Comment la Belgique va-t-elle réussir sa 4e révolution industrielle ?

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Depuis 1990, les émissions de gaz à effet de serre diminuent de 0,9% par an. Trop peu. Le Congrès des économistes planchera la semaine prochaine sur la transition vers une économie net zéro à Charleroi. Les explications de la présidente de l’événement, Estelle Cantillon.

Réussir la transition vers une économie zéro carbone. C’est le thème, très actuel, du prochain congrès des économistes qui se tiendra le 16 novembre prochain à Charleroi et qui est organisé par l’université ouverte de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

« Le congrès est un événement qui se passe tous les deux ans. Il mêle des contributions d’académiques et de praticiens, et il aborde les grands sujets sociétaux belges », explique Estelle Cantillon, professeure à l’ULB qui  préside le Congrès. Six thématiques seront plus spécialement abordées, chacune par une commission. Elles se pencheront sur les boites à outils et les modèles disponibles pour engager ces politiques de transition, sur  le rôle des entreprises, celui des ménages, celui des instruments de financement, celui des indices et des statistiques et une sixième commission élargira l’horizon géographique et traitera  de « l’action climatique dans un monde globalisé » …

Nos émissions baissent de moins de 1% par an. Seulement.

En présentant le programme ce mardi, Estelle Cantillon a rappelé quelques chiffres qui montrent l’étendue du chemin qui reste à faire.

« En Belgique les énergies fossiles constituent 87% de la consommation finale d’énergie. Et ces énergies fossiles représentent 74% des émissions de gaz à effet de serre (GES) », dit-elle. Estelle Cantillon souligne qu’en Belgique, « depuis 1990, les émissions de GES ont diminué de 24%, soit à un rythme de 0,88% par an, ce qui est bien inférieur au taux de réduction annuel nécessaire pour atteindre les objectifs européens de 2030 (5,7% à partir de 2021) ou encore celui nécessaire pour atteindre la neutralité climatique en 2050 (9% à partir de 2021). Les émissions dans les secteurs de l’énergie, de l’industrie, des bâtiments résidentiels, de l’agriculture et des déchets ont diminué. Au contraire, les émissions ont continué à augmenter dans le secteur du transport routier et des bâtiments non résidentiels ». Si l’on veut atteindre l’objectif zéro carbone, nous devrons donc  décupler nos efforts.

Voilà le point de départ. Mais attention au chemin emprunté.  « Réussir la transition, cela veut dire arriver à atteindre ces objectifs mais aussi à le faire à un coût économique acceptable et réparti de façon équitable entre tous les acteurs de la société, poursuit Estelle Cantillon.  Et cela signifie aussi réfléchir à une transition qui jette les bases de notre futur bien-être. Il faut donc réfléchir à comment organiser la société pour avoir et maintenir notre bien-être et la qualité de vie dans le pays ».

Trois piliers d’actions…

L’action doit reposer sur trois piliers complémentaires, ajoute la professeure de l’ULB. « D’abord remplacer les énergies fossiles par des sources d’énergie bas carbone (éolien, solaire, biomasse, nucléaire etc.). Ces énergies sont consommées sous forme électrique, cela explique donc pourquoi lorsque l’on parle de transition énergétique, on parle aussi d’électrification des usages ».

Mais il ne faut pas uniquement se contenter de décarboner les énergies utilisées, car « il n’est pas possible à consommation constante de toute électrifier, poursuit Estelle Cantillon. C’est pour ça qu’il est important de se reposer sur deux autres piliers ». Il s’agit d’abord de travailler sur l’efficacité énergétique, en améliorant le ratio de l’énergie consommée, en isolant les bâtiments, en allégeant les carrosseries, … Et il s’agit ensuite de consommer et de produire autrement.  Si on parle de mobilité, on peut remplacer chacune des voitures aujourd’hui en Belgique par un véhicule électrique et s’assurer qu’elles sont alimentées par de l’électricité verte, mais « une autre façon de procéder est de créer un shift modal entre les voitures, les transports en commun … et d’encourager le car sharing, observe l’économiste. Un autre exemple est le recyclage et tout ce qui tombe sous le vocable de l’économie circulaire et les changements de comportements. On parle de slow tourisme, slow dans ce pilier de sobriété slow tourisme slow heat … », ajoute-t-elle.

…et cinq défis

Le débat portera sur les actions à mener mais aussi les enjeux et les défis. Estelle Cantillon en cite cinq : « Le premier est la forte dépendance de l’économie belge aux énergies fossiles. Le deuxième concerne le coût de la transition qui est assez loin aujourd’hui du moindre coût. Il faudrait améliorer les politiques publiques. Le troisième enjeu sera de gérer les aspects redistributifs. L’énergie représente une grosse partie du budget des ménages, et notamment des ménages les plus précaires. Le quatrième défi ce sont les questions de coordination des politiques publiques : les choses se passent au niveau européen, au niveau fédéral, au niveau régional. Et le dernier sera de s’assurer de l’acceptabilité sociale de toutes ces mesures car on parle d’un shift radical, au point que l’on parle d’une quatrième révolution industrielle », conclut Estelle Cantillon.

Le Congrès est ouvert au public. Modalités d’inscriptions et les tarifs.

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