Les taxes des communes bruxelloises font-elles fuir les entreprises vers la Flandre ?
Une étude commandée par Voka Metropolitan, la branche bruxelloise de l’organisation patronale flamande, montrerait qu’une entreprise bruxelloise paie, en moyenne, trois fois plus de taxes locales que ses voisines flamandes. “Les communes bruxelloises taxent les entreprises jusqu’à les faire fuir”, explique René Konings, directeur de Voka Metropolitan. Elles trouveraient refuge dans le Brabant flamand et wallon.
La fuite des entreprises bruxelloises vers la Flandre n’est pas une vue de l’esprit. En 2022, selon les chiffres de Statbel, 1.847 entreprises bruxelloises ont déménagé vers la Flandre. Dans l’autre sens, seules 1.292 entreprises flamandes ont fait le trajet inverse. Ce qui laisse un trou de 555 entreprises en défaveur de la capitale.
On évoque souvent les problèmes de mobilité et de sécurité pour expliquer cet exode économique. Une étude d’Ayming, une société de conseil financier, apporte un nouvel élément : la pression fiscale au niveau communal. Dans cette étude, commandée par Voka Metropolitan, Ayming a comparé la charge fiscale des 19 communes bruxelloises à celle des 22 communes du Brabant flamand et wallon. Notamment au niveau du précompte immobilier.
Il apparait que les entreprises qui se situent à Zaventem payent 5 fois moins chère que dans la commune bruxelloise où la pression fiscale est la plus lourde, Ganshoren. Ainsi, pour un immeuble de bureaux moyen (5.000 m², avec revenu cadastral de 100.000 euros non-indexé, c’est-à-dire 217.630 euros en 2024 ), l’entreprise paye 64.000 euros de précompte dans la commune aéroportuaire, contre 323.000 euros à Ganshoren.
Disparité intrarégionale
L’étude montre aussi une grande disparité entre les communes bruxelloises. Ainsi, à Schaerbeek ou Saint-Josse, cette entreprise aurait payé 280.000 euros contre 143.000 euros pour Koekelberg, la commune la moins chère de Bruxelles. Une situation absurde, selon Konings : « Les entrepreneurs bruxellois doivent débourser plus d’argent, en fonction de leur code postal, que leur concurrent situé à quelques rues de là, dans une autre commune. Mais les services économiques dont ils bénéficient, souvent au niveau régional, sont les mêmes. »
Par ailleurs, dénonce Voka Metropolitan, à cette taxe communale sur le précompte immobilier vient s’ajouter une taxe sur les surfaces de bureaux, pratiquée par quasiment toutes les communes bruxelloises. Sans oublier, dans 12 communes, la taxe sur les places de stationnement non publiques.
Au final, la conclusion d’Ayming est sans appel : “Les communes périphériques sont beaucoup plus intéressantes du point de vue des coûts opérationnels et administratifs. Le montant des différentes taxes et la forte pression fiscale sur les immeubles de bureaux s’expriment principalement à Bruxelles. La taxe foncière en périphérie est beaucoup plus attractive, principalement en raison des faibles surtaxes, et du fait qu’il n’existe pas, dans la plupart des cas, de taxe communale sur les immeubles de bureaux et les places de parking.”
Un appel
Selon Voka Metropolitan, un dangereux glissement de terrain est en cours dans le tissu économique de la capitale : “En effet, les emplois qui disparaissent de Bruxelles sont souvent des emplois à haute valeur ajoutée qui impliquent également beaucoup de création d’emplois indirects (…). À Diegem (Flandre), par exemple, de nouveaux immeubles de bureaux sortent de terre ; à Bruxelles, ils se transforment en complexes d’appartements ou en maisons de retraite. Le monde à l’envers : Bruxelles deviendra-t-elle une ville dortoir ?“
En perspective des élections, la branche bruxelloise du Voka lance un appel aux autorités pour une “paix fiscale”. Un cadre fiscal stable, transparent et harmonisé en guise de première étape. Ensuite, dans un second temps, une baisse du handicap fiscal de la capitale par rapport à ses deux provinces voisines. “Bruxelles dispose de suffisamment d’atouts pour figurer toujours en tête de liste des implantations économiques possibles. Elle possède le plus grand vivier de talents, une population multilingue, jeune et cosmopolite, un réseau de transports publics bien développé, plusieurs quartiers commercialement intéressants avec un beau patrimoine bâti”, conclut l’organisation patronale.
Au cours de la précédente législature, les communes bruxelloises ont été contraintes d’augmenter leurs taxes pour maintenir leur budget à l’équilibre. Une sorte de “tax shift” s’y déroule. Les communes bruxelloises ont tendance à baisser la pression fiscale sur l’IPP au détriment de l’impôt communal sur le précompte immobilier, ce qui leur rapporte davantage, mais qui met une pression supplémentaire sur les propriétaires et entreprises.
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