Baisse des dépenses et résistance de l’administration : le mauvais exemple bruxellois

David Leisterh - HATIM KAGHAT/Belga Image
Baptiste Lambert

Comme toutes les autres entités du pays, la Région bruxelloise n’échappera pas à un exercice d’assainissement budgétaire. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que les administrations bruxelloises ne facilitent pas le travail du prochain gouvernement, qui peine toujours à se former.

Fin 2024, la dette bruxelloise est attendue à 11,5 milliards d’euros contre 10,4 milliards en 2023. La faute à un budget qui n’est toujours pas à l’équilibre. En juin dernier, le ministre bruxellois du Budget, Sven Gatz (Open Vld) tirait la sonnette d’alarme, en épinglant notamment la charge d’intérêt sur cette dette : “Elle est passée de 124 millions d’euros à 328 millions et continuera d’augmenter dans les années à venir.”

L’objectif d’équilibre budgétaire a donc été reporté à 2026. L’année dernière, le ministre avait demandé une réduction de 5% des dépenses aux administrations bruxelloises, en vue de l’exercice budgétaire 2024. Cette fois-ci, l’objectif est doublé pour 2025 : chaque Organisme d’intérêt public (OIP) était tenu de présenter un plan avec des pistes d’assainissement de l’ordre de 10%. C’est qu’il faut trouver 484 millions d’euros pour 2025 et 556 millions en 2026, estimait cet été le Comité de monitoring.

Des pieds de plomb

Ces plans sont désormais sur la table, mais étaient censés rester confidentiels. L’Echo a toutefois pu jeter un œil à l’ensemble des notes et le résultat de cette grande introspection est pour le moins hétérogène. Entre ceux qui n’ont rempli qu’une demi-page sans propositions chiffrées et ceux qui ont fait leur travail, mais en suggérant que c’était une très mauvaise idée, l’administration avancerait avec des pieds de plomb.

La Stib évalue par exemple qu’une réduction de 10% de ses dépenses mènerait à supprimer 1.053 ETP. La société de transport public suggère plutôt une augmentation de ses recettes. Autrement dit, une augmentation des tarifs. Actiris, en charge de l’emploi, a joué le jeu, mais aurait estimé qu’une coupe budgétaire serait “une erreur stratégique compromettant non seulement la mission de l’organisme, mais aussi l’objectif fédéral d’atteinte d’un taux d’emploi de 80% d’ici à 2030″.

L’Agence bruxelloise pour l’entrepreneuriat, hub.brussels, estime qu’une réduction de 10% de ses dépenses impacterait forcément les emplois. 350 personnes y travaillent : “70% de notre budget est consacré aux rémunérations de nos agents”, nous indique-t-on, tandis que “d’autres coûts sont incompressibles comme les loyers.” Faut-il dès lors revoir certaines missions ? “C’est au monde politique de décider.” C’est également le point de vue d’autres OIP : ils jugent l’exercice contre-productif, dans la mesure où ces coupes budgétaires seront le fruit de choix politiques : ce sera au prochain gouvernement, qui n’est pas encore en place, de trancher les missions. À ce stade, certaines administrations considèrent donc ce travail comme inutile.

La résistance

C’était une crainte de la majorité bleu azur en Wallonie, mais ça vaut tout aussi bien pour Bruxelles : que le changement de paradigme dans les urnes, le 9 juin dernier, se heurte à la résistance des syndicats, de l’opposition et de l’administration. Pour ces dernières, il pourrait s’agir d’une résistance aussi bien “intra” que “inter”

Une résistance “intra” de certains hauts fonctionnaires n’appartenant pas à la même couleur politique. On nous glisse d’ailleurs dans l’oreillette, qu’au niveau wallon, un grand balayage se prépare dans l’administration. Comme le suggère d’ailleurs la suppression du certificat de management public pour la désignation des top managers.

Une résistance “inter”, dans la mesure où chaque administration pense que le travail d’assainissement devrait plutôt se faire chez le voisin, suggérant que ses missions sont plus stratégiques que d’autres.

Voilà le formateur bruxellois prévenu. Après l’accouchement pénible de son gouvernement viendra la difficile tâche de mettre en place sa politique. Mais David Leisterh (MR), qui attend toujours une majorité côté flamand, ne semble pas vouloir attendre la bonne volonté de chaque administration et a chargé un “comité de pilotage” d’examiner la situation budgétaire de la Région de Bruxelles-Capitale en proposant des pistes d’assainissement.

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