Après 40 ans de service, le réacteur nucléaire de Tihange 2 sera définitivement arrêté mardi soir

Tihange 2 © Belgaimage

Le réacteur nucléaire de Tihange 2 sera définitivement mis à l’arrêt mardi soir, après pile 40 ans de service. Cela n’engendrera toutefois aucune perte d’emploi pour la centaine de travailleurs qui y sont employés, assure-t-on vendredi chez Engie Electrabel, l’exploitant des centrales nucléaires de Tihange et de Doel.

Conformément à la loi sur la sortie du nucléaire, la centrale nucléaire de Tihange 2, d’une puissance de 1.008 MW, sera donc définitivement déconnectée du réseau le 31 janvier à 23h59, après 40 années de production d’électricité “en toute sûreté”, insiste Antoine Assice, le directeur des différentes centrales de Tihange. Elle était en effet entrée en fonction le 1er février 1983 et a, depuis, produit 270 milliards de KWh, soit trois fois la consommation annuelle de toute la Belgique.

Il s’agit du deuxième réacteur mis à l’arrêt, après Doel 3 en septembre dernier -là aussi après 40 ans de service-, et du premier à l’être en Wallonie.

Une centaine de personnes travaillent sur le site de Tihange 2 et chacun d’eux aura une nouvelle fonction à l’issue de la fermeture, souligne Antoine Assice. Certains resteront ainsi actifs sur ce réacteur dans le cadre des opérations de mise à l’arrêt définitive en toute sûreté puis de démantèlement. D’autres iront travailler sur les centrales de Tihange 1, qui sera déconnectée à son tour le 1er octobre 2025, et de Tihange 3, qui devrait voir sa durée de vie prolongée de 10 ans, ou encore dans d’autres services. “Il n’y aura aucune perte d’emploi”, assure le directeur du site.

Ce dernier se dit très fier des équipes de Tihange 2, qui ont produit de l’électricité pendant 40 ans “en toute sûreté et avec respect pour l’environnement”.

Emotion et sentiment de “gâchis”

Des membres du personnel ont pourtant récemment qualifié de “gâchis” la fermeture prochaine de leur instrument de travail. “Je peux comprendre l’émotion que cela suscite. Nous discutons de cela à chaque fois que je me rends dans la salle de contrôle. Mais nous savons depuis 20 ans que la centrale doit fermer et les équipes se rendent compte de manière pragmatique que cela va devenir réalité”, confie Antoine Assice.

Il salue des travailleurs qui sont restés et resteront professionnels jusqu’au bout. “Ils sont émus, ils ont la machine dans les tripes, mais, dans le même temps, ils ont la sûreté nucléaire dans la tête.”

Compétences “parfaites”

Engie Electrabel aura d’ailleurs besoin de l’ensemble des équipes de Tihange 2 pour leur expérience et leurs connaissances, répète-t-il. D’une part pour la mise à l’arrêt définitive, pour laquelle leurs compétences actuelles sont “parfaites” puisqu’ils arrêtent déjà parfois la centrale dans le cadre d’opérations de maintenance, fait remarquer le directeur de la centrale. Mais aussi dans le cadre du démantèlement, qui nécessite une transformation des compétences. Engie Electrabel prévoit d’ailleurs un important volume de formations pour ceux qui veulent changer de métier.

Tout comme pour Doel 3, l’exploitant des centrales nucléaires a chiffré le démantèlement et le déclassement de Tihange 2 à environ un milliard d’euros, provenant des provisions qu’il a constituées. Un montant total de 6,3 milliards d’euros est prévu pour le démantèlement des sept réacteurs de Doel et de Tihange.

Planning des arrêts

Après Tihange 2, c’est en effet la centrale de Doel 1 qui suivra, en février 2025. Puis viendra le tour de Tihange 1, qui devrait bien fermer ses portes en octobre 2025, toujours en application de la loi de 2003 sur la sortie du nucléaire.

Son éventuelle prolongation n’est pas sur la table des discussions entre son exploitant et l’Etat belge et n’est donc pas à l’ordre du jour, glisse Antoine Assice.

La construction de Tihange 2 a débuté en 1975 et la centrale, située en bordure de Meuse, près de Huy (province de Liège), a été mise en service le 1er février 1983.

D’une capacité électrique nette de 1.008 MW, la centrale aura connu plusieurs moments marquants dans son histoire. En 2001, les trois générateurs de vapeur y seront remplacés en 62 jours, un record mondial à l’époque. En 2010, le réacteur bat le record de production annuelle en Belgique avec 8.824 GWh produits, mais se fait aussitôt dépasser, l’année suivante, par Tihange 3.

L’année 2012 sera marquée par une révision à rallonge après la détection, tout comme à la centrale de Doel 3, de défauts dûs à l’hydrogène, des “microfissures“, dans les parois en acier de la cuve du réacteur. Un nouvel arrêt non programmé a ensuite lieu en mars 2014, toujours à cause de ces défauts. Des études supplémentaires sont alors menées et l’AFCN, le gendarme du nucléaire, donne finalement le feu vert au redémarrage de l’installation en novembre 2015.

Du 18 août 2018 au 3 juillet 2019, Tihange 2 totalisera 318 jours d’arrêt – son arrêt le plus long – pour des réparations au niveau d’un bâtiment bunkerisé qui abrite des équipements de sûreté de second niveau de protection. L’objectif de celui-ci est de compenser la perte des équipements de premier niveau, par exemple, suite à des agressions qui n’ont pas été prises en considération lors de la conception du premier niveau de protection, explique-t-on chez Engie Electrabel.

Sur ces quatre décennies, la centrale a connu 29 révisions et quelques arrêts non programmés. Elle aura sinon produit de l’énergie durant 11.963 jours.

En 40 ans, 1.793 assemblages d’éléments combustibles y auront été utilisés et plus de 100.000.000 de tonnes de CO2 évitées grâce à la production d’électricité nucléaire décarbonée de Tihange 2, pointe son exploitant.

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