Paul Magnette et Maria João Rodrigues : seul un New Deal à la Roosevelt peut sauver l’UE

Antoine Denis Journaliste

La crise sanitaire et économique combinée que nous vivons actuellement touchera à coup sûr l’ensemble de l’UE. D’après Paul Magnette et Maria João Rodrigues, un New Deal comme celui du président Roosevelt aux États-Unis en 1933, pourrait sauver le projet européen.

Selon Paul Magnette, président du PS, et Maria João Rodrigues, présidente de la Fondation européenne d’études progressiste, dans une opinion accordée à Euronews : “En période d’incertitude, nous avons non seulement besoin de mesures fortes et urgentes, mais aussi d’une vision claire de la direction que nous voulons prendre une fois que le pic de la crise sanitaire sera passé.”

Jusqu’à présent, le scénario de la crise économique de 2008 est en train de se répéter. Les États agissent en cavalier seul alors que l’UE reste discrète. En l’absence d’une réponse commune forte, elle pourrait perdre sa légitimité déjà fragile aux yeux de ses citoyens.

Nous pensons que seul un plan très audacieux et ambitieux, comme le New Deal de Franklin D Roosevelt, peut sauver le projet européen.

“Le New Deal est un programme politique interventionniste lancé par Franklin D Roosevelt en 1933 (jusqu’en 1938) qui avait pour objectif de soutenir les plus démunis, de réformer les marchés financiers et de booster l’économie affaiblie par la crise économique de 1929.”

D’après Paul Magnette et Maria João Rodrigues, même si “certains États pourraient être en mesure de mettre en place leur propre plan de relance avec les budgets nationaux. Mais cela ne les sauvera pas. Si certains pays sont confrontés, dans les mois à venir, à une crise structurelle de leurs services de santé publique et à une récession profonde et durable, tous les États membres seront, à un moment donné, touchés. Le problème est européen et la réponse doit être européenne.”

Premier point du New Deal européen : constituer une véritable union bancaire

Aujourd’hui, il semblerait que l’UE ne soit pas assez équipée pour faire face à une telle crise systémique. Selon les auteurs de l’opinion, “l’absence d’un véritable Trésor européen et d’une véritable union bancaire apparaissent plus que jamais comme des faiblesses tragiques de l’UE. Les outils de sauvetage existants (mécanisme européen de stabilité, fonds de solidarité, etc.) sont beaucoup trop limités et conditionnés pour offrir le niveau de réaction dont nous avons besoin maintenant.”

L’émission d’un type spécifique d’obligations européennes pour compléter l’effort gigantesque déjà consenti par les États membres pour renforcer leurs systèmes de santé et leurs économies serait le moyen le plus intelligent et le moins coûteux d’empêcher une destruction violente de vies humaines et de millions d’emplois. Toujours d’après Paul Magnette et Maria João Rodrigues, “il est également nécessaire d’adapter le pacte de stabilité et de croissance afin de permettre aux États membres d’utiliser les investissements publics comme un outil pour soutenir la croissance économique lorsque l’écart de production est négatif.”

Deuxième point du New Deal européen : développer la capacité fiscale de l’UE

La lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, la taxation des transactions financières internationales et des importations en provenance de pays qui ne contribuent pas à la lutte contre le changement climatique seront indispensables pour soutenir le budget à long terme de l’UE, élément essentiel pour faire face à cette crise.

Troisième point du New Deal européen : une relocalisation des secteurs critiques

Comme mentionné au début de cet article, l’UE reste (pour l’instant) silencieuse ce qui montre bien que l’étendue de sa coordination et de ses interventions n’est pas assez adaptée aux défis de notre temps. En Belgique, et plus généralement en Europe, la recherche et le développement ainsi que les systèmes de santé publique sont parmi les plus efficaces au monde. Malgré cela, nous assistons à des phénomènes de pénurie et de rupture des chaînes d’approvisionnement. Dans l’avenir, “la réorganisation de nos systèmes de santé publique et la correction de ces défauts impliquent une profonde refonte de notre marché intérieur, axée sur la relocalisation des secteurs critiques et une intégration accrue des chaînes de production et d’approvisionnement dans des domaines vitaux, tels que la santé et la sécurité alimentaire.”

Quatrième point du New Deal européen : soutenir l’emploi et les entreprises

Dans cette période de crise, mais surtout après, beaucoup de personnes perdront leur emploi ou feront face à des difficultés. Selon Paul Magnette et Maria João Rodrigues, “il faut sauver des emplois immédiatement et mettre un terme à la spirale destructrice de l’offre et de la demande. Les entreprises qui seront aidées par les pouvoirs publics, par des prêts ou des prises de participation, devront se rappeler qu’elles ont été aidées à sauver des emplois et qu’elles partagent cette responsabilité. Une nouvelle politique européenne en matière d’industrie, d’innovation et de formation devrait soutenir activement cette transformation.”

Cinquième point du New Deal européen : renforcer le Green Deal

Cette crise sanitaire ne doit pas tout engloutir. L’état de notre planète, du réchauffement climatique lui n’attendra pas que nous nous relevions d’une crise économique. C’est pour cela que “malgré cette crise sanitaire, le Green Deal européen n’est pas devenu moins urgent. La perte de biodiversité et nos modes de production et de consommation axés sur les déchets sont en grande partie responsables de la propagation du virus et de notre incapacité à réagir correctement. La crise COVID-19 rend plus urgente que jamais la transition de nos économies et de nos sociétés vers un mode de vie plus durable.”

Source : opinion accordée à Euronews

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