“Une décision choquante” : la SNCB écarte Alstom Belgium d’un contrat de plus de 3 milliards d’euros
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
La SNCB a ouvert un marché public pour la construction de centaines de rames automotrices AM30. Alstom Belgium espérait bien remporter le gros lot, mais la filiale belge de la multinationale française s’est fait subtiliser la première place par l’espagnol CAF, apprend-on. Ce qui est considéré comme “le contrat du siècle” s’envole chez un concurrent. Danger pour l’emploi ?
Dans nos colonnes, jeudi dernier, le patron d’Alstom Benelux, Bernard Belvaux, lorgnait avec envie cet immense contrat de la SNCB qui pourrait durer 12 ans. “C’est le contrat le plus important pour le ferroviaire en Belgique depuis plusieurs années, qui peut aller, sans doute, jusqu’au remplacement de 600 rames (de train).”
Mais vendredi, le couperet tombe. La SNCB choisit finalement l’espagnol CAF qui a pourtant déposé une offre plus chère de 100 millions d’euros, pour atteindre 3,4 milliards d’euros, d’après nos informations. Siemens, qui avait déposé une offre à 3,6 milliards, a également été écarté.
La subtilité, c’est que le score global de CAF était très légèrement supérieur à l’offre d’Alstom. Rappelons que, dans le cadre d’un appel d’offres d’un marché public européen, il ne peut y avoir de préférence géographique. Après la STIB, la TEC et De Lijn, c’est une percée inédite au sein de la SNCB pour le constructeur espagnol.
Un coup dur pour l’emploi ?
Mais selon nos sources, l’emploi ne faisait pas partie des critères de sélection du marché public. Or, Alstom Belgium, c’est 480 salariés dans son usine de Bruges, qui construit les rames de train, et plus de 1.000 personnes sur son site de Charleroi, fortement lié à la recherche et au développement.
Bernard Belvaux s’en offusque et a envoyé un courrier au ministre fédéral compétent, Jean-Luc Crucke (Les Engagés). Ce courrier nous est parvenu. Le patron d’Alstom pour le Benelux parle “d’une décision choquante”.
Dans le cadre d’un investissement public, “comment peut-on promouvoir une offre plus chère sans différenciation du score global et avec un impact défavorable pour notre site de production de Bruges et de toute l’industrie ferroviaire belge ?”, se demande Bernard Belvaux, qui rappelle également les “coûts indirects” d’une telle décision sur l’emploi et les sous-traitants.
Une entreprise autonome
Du côté du cabinet du ministre, on nous renvoie vers la SNCB. “Nous sommes dans une procédure de marché public initiée et gérée par la SNCB, laquelle est une entreprise autonome. L’attribution du marché public a donc été faite par le conseil d’administration de la SNCB.”
À la SNCB, on nous confirme le choix “d’un soumissionnaire préférentiel” sur base “d’une évaluation de critères techniques et financiers”. Dans le jargon d’un appel d’offres, cela signifie que des négociations exclusives seront entamées avec cet acteur.
Alstom Belgium met la pression sur le monde politique et pourrait s’opposer à cette décision par un recours.
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