“Contrat du siècle” : la SNCB reporte son choix, après un Conseil d’administration tendu

Sophie Dutordoir
Baptiste Lambert

Tout indiquait que la SNCB allait choisir le constructeur CAF pour réaliser le contrat du siècle. “Mais les pressions politiques sont énormes”, nous dit-on, dans ce dossier. Ce qui devait être une formalité a tourné l’indécision : le CA de la SNCB reporte son choix.

L’enjeu est immense : un contrat potentiel de 3,4 milliards d’euros et la construction de 600 rames de train. La CAF était sortie vainqueur du marché public, mais un recours d’Alstom, qui emploie 1.900 personnes en Belgique, a modifié la donne.

Le Conseil d’État a suspendu la décision. La SNCB était priée de mieux motiver sa décision et de faire preuve de plus de transparence. Elle a donc décidé de réaliser une analyse technique et juridique, et s’apprêtait, ce vendredi, a validé son choix de départ : le constructeur espagnol.

Le CA n’a pas tranché

Composé de représentants des différents partis, le CA n’est toutefois pas parvenu à trancher la question.

Le Conseil d’administration a “pris connaissance des documents présentés et des réponses du management aux remarques formulées par le Conseil d’Etat sur la décision de désigner CAF en tant que soumissionnaire préférentiel pour le marché d’acquisition des AM30″, explique la compagnie dans un communiqué. 

Le CA indique que l’avis que la SNCB a sollicité “valide les évaluations réalisées par le management“. Prenant encore acte “des éléments de motivation supplémentaire du dossier“, il reporte sa décision à la prochaine réunion.

Un CA indécis

Que s’est-il passé ? Le CA aurait été plus indécis que prévu. Il nous revient que les administrateurs socialistes ont joué de tout le leur poids. Au nord du pays, le cd&v pousse désormais ses administrateurs à soutenir l’emploi en Belgique, c’est-à-dire à remettre Alstom en selle.

Pas de quoi récolter une majorité et revoir la décision, mais visiblement de quoi la reporter. Pour rappel, le CA compte 14 administrateurs, dont l’administratrice déléguée Sophie Dutordoir. Outre le PS et le cd&v, Vooruit, Ecolo, Groen, N-VA, Open Vld et MR sont représentés. Les libéraux hésiteraient également, entend-on.

Ailleurs, on entend que “les pressions politiques sont énormes dans ce dossier, alors que l’offre de CAF est pourtant bien la meilleure”.

On sait que le patron d’Alstom Belgique, en mars dernier, avait adressé un courrier à plusieurs mandataires politiques, leur faisant part d’une décision “choquante” de la SNCB. La multinationale emploie 600 travailleurs à Bruges et encore davantage sur ses sites de Charleroi.

“Les décisions doivent être prises”

Le ministre de la Mobilité Jean-Luc Crucke (Les Engagés) a pris acte du report. Dans un communiqué envoyé vendredi après-midi, il dit “comprendre que le conseil d’administration souhaite prendre le temps nécessaire pour mesurer tous les enjeux d’un projet structurant pour le rail belge”.

“Lorsque viendra le moment des choix et dans le respect des dispositions légales le permettant, je veillerai à ce que les décisions reposent sur des critères à la fois techniques, environnementaux et socio-économiques“, a-t-il ajouté.

S’il comprend qu’un délai soit nécessaire pour prendre une telle décision, il appelle le CA à ne pas faire traîner les choses en longueur et à saisir ses responsabilités. “Les trains doivent rouler, et les décisions doivent suivre. Le conseil ne peut se retrancher derrière le pouvoir politique pour retarder une décision qui relève de sa seule compétence.”

Un nouveau marché public entrainerait des retards importants, “sans doute de 4 ans“, nous indiquait le ministre, cette semaine.

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