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L’invité surprise des négociations gouvernementales

Réconcilier les programmes de la N-VA et du PS, les deux gagnants du scrutin du 13 juin, s’apparente à un exercice de grand écart. Outre la gageure de former un nouveau gouvernement, les partis politiques devront composer avec un invité surprise à la table des négociations : les marchés financiers. Et ceux-ci, peu rompus à l’exercice du compromis à la belge, ne feront aucun cadeau à notre pays.

Réconcilier les programmes de la N-VA et du PS, les deux gagnants du scrutin du 13 juin, s’apparente à un exercice de grand écart. Outre la gageure de former un nouveau gouvernement, les partis politiques devront composer avec un invité surprise à la table des négociations : les marchés financiers. Et ceux-ci, peu rompus à l’exercice du compromis à la belge, ne feront aucun cadeau à notre pays.

En 2007, les différents partis avaient marchandé pendant des mois pour former un nouveau gouvernement. Sans pour autant inquiéter outre mesure les marchés financiers. Selon le professeur Philippe van Parijs, nos politiciens pouvaient alors se le permettre car « le franc belge n’était plus menacé et les gouvernements des entités fédérées pouvaient continuer à exercer leurs vastes compétences ».

Trois ans plus tard, la donne a changé. La crise a plombé les caisses des Etats et les marchés financiers ont les yeux rivés sur la dette publique et le déficit budgétaire. Ces derniers mois, les politiques menées pour assainir les finances et gérer la dette sont donc au centre de leurs préoccupations. Et rien ne leur échappe à l’échelon national. Luc Coene, vice-gouverneur de la Banque nationale, l’a bien compris. Pour lui, il est crucial de communiquer aux marchés financiers que la formation d’un gouvernement ne durera pas trop longtemps et qu’un consensus sera rapidement trouvé quant aux mesures d’assainissement nécessaires à mettre en place. Un tel message nous permettra de faire profil bas et d’éviter les spéculations sur notre capacité de remboursement.

Mais de grandes déclarations d’intention ne suffiront pas. Il faudra, avant tout, se montrer convaincant et démontrer que l’accord, tant politique qu’économique, bénéficie du soutien d’une majorité des Belges et est tenable à moyen terme. Sinon, l’effet sera aussi limité que lors de l’annonce du plan de sauvetage de l’euro pour un montant phénoménal de 750 milliards d’euros. Deux jours après ces déclarations, les dissensions entre différents pays européens ont fait retomber l’enthousiasme ambiant. Notre capacité à trouver, aux petites heures de la nuit, un accord tellement complexe et illisible que tout le monde s’y retrouve, n’est donc pas la bonne formule pour convaincre les marchés…

Etonnamment, la pression des marchés pourrait jouer en faveur des revendications francophones. Le scénario du pire, pour les marchés, semblerait la scission de la Belgique. « Une telle perspective serait extrêmement mal interprétée et très dangereuse », estime Philippe Ledent, économiste chez ING. Pourquoi les marchés financiers sont-ils favorables au maintien de l’unité de la Belgique ? Tout simplement parce qu’elle bénéficie d’un meilleur rating de sa dette que les Régions. Pour les bailleurs de fonds de la Belgique, se voir proposer de la dette wallonne, bruxelloise ou flamande sera beaucoup moins attractif que de la dette belge. L’équation se traduira, bien évidemment pour les Régions, par une augmentation des taux d’emprunt et donc, un coût beaucoup plus élevé pour les budgets régionaux. Un élément que nos hommes politiques, au Nord comme au Sud du pays, devront prendre en compte lors des négociations.

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