Les mots et expressions à connaître en 2023

CISLUNAIRE Ce terme désigne l'espace entre la Terre et l'orbite lunaire. © NASA

En 2020 et 2021, le monde a été embarqué dans un cours accéléré d’épidémiologie et de vaccination. De nouvelles expressions comme aplanir la courbe, charge virale, protéine de pointe et vaccins à ARN messager ont fait leur entrée dans le langage courant. Puis, en 2022, la guerre en Ukraine nous a contraints à étoffer notre jargon militaire avec des notions comme Himars et tir de contrebatterie.

Quels seront les nouveaux termes techniques que devra apprendre le commun des mortels en 2023? Voici nos propositions, avec une définition pour chacune d’entre elles, afin d’enrichir votre vocabulaire pour l’année à venir.

Cislunaire

Les Etats-Unis ont l’intention d’envoyer des astronautes sur la Lune dans les années à venir avec l’objectif, à long terme, d’y établir une base permanente. Dans le cadre de leur programme Artemis, ils comptent lancer une station spatiale, dénommée Lunar Gateway (portail lunaire), en orbite autour de la Lune pour faire office de centre de communications, de laboratoire scientifique et d’espace de vie temporaire. Elle devrait être envoyée dans l’espace en 2024. Une série de missions robotiques préparatoires sur la Lune devront décoller en 2023. Les choses s’accélèrent dans l’espace cislunaire, à savoir l’espace entre la Terre et l’orbite de la Lune.

Les mots et expressions à connaître en 2023
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Energie solaire spatiale

L’idée de capter l’énergie dans l’espace en utilisant d’immenses panneaux solaires attachés à des satellites en orbite pour ensuite la renvoyer sur Terre sous forme de micro-ondes existe depuis qu’Isaac Asimov l’a décrite dans un ouvrage de science-fiction en 1941. Mais le calcul n’était jamais bon: lancer des objets dans l’espace coûte tout simplement trop cher. Cela pourrait changer si les coûts de lancement diminuent suffisamment ou si de nouvelles techniques de fabrication spatiale émergent, comme l’exploitation minière des astéroïdes pour en extraire des matières premières. Et dans une orbite suffisamment élevée, un satellite fonctionnant à l’énergie solaire pourrait rester face au soleil en permanence, fournissant ainsi une source d’énergie propre et fiable. L’Agence spatiale européenne a parrainé une démonstration au sol en Allemagne en 2022 dans le cadre de la proposition d’un plan appelé Solaris. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Chine et le Japon allouent également des budgets à la recherche dans ce domaine, qui connaît un regain d’intérêt.

ESim

Ces petites puces insérées dans votre smartphone et liées à vos données de facturation et votre numéro de téléphone, appelées cartes Sim (pour Subscriber Identity Modules, modules d’identification des abonnés), sont vouées à disparaître. La technologie appelée eSim va remplacer les puces physiques par des codes numériques qui peuvent être envoyés d’un ancien appareil vers un nouveau. Cette technologie existe dans les téléphones depuis 2017 mais la décision d’Apple de lancer sa gamme d’iPhone 14 aux Etats-Unis uniquement avec des eSim contraindra des millions de personnes à l’employer dès 2023. Comme pour les souris et les écrans tactiles, le choix d’une nouvelle technologie par Apple déclenchera une adoption généralisée. Cela incitera les opérateurs mobiles du monde entier à passer aux eSim et permettra d’assurer de meilleurs transferts entre appareils. Cette technologie permettra également de passer plus facilement d’un réseau à un autre en installant plusieurs eSim.

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Cryptographie post-quantique

Les ordinateurs quantiques exploitent l’étrangeté du royaume subatomique pour réaliser des opérations dont sont incapables les ordinateurs conventionnels. Ceci comprend le décryptage de codes: en effet, un ordinateur quantique opérationnel, s’il est possible d’en créer un, pourrait craquer le cryptage actuellement utilisé pour les communications sécurisées et la protection des données sensibles. Pour se protéger contre cette éventualité, de nouvelles normes de cryptographie “post-quantique”, conçues pour être invulnérables même pour les ordinateurs quantiques, ont été approuvées en 2022. Leur mise en oeuvre commencera véritablement en 2023.

Réalité mixte

La réalité virtuelle (RV) s’apparente au port d’un masque numérique qui vous permet d’effacer le monde réel et de vous plonger dans une réalité alternative, générée par ordinateur. La réalité augmentée (RA), en revanche, superpose des éléments générés par ordinateur à votre vision du monde réel. La réalité mixte (RM) va encore plus loin, en permettant à des objets réels et virtuels d’interagir. Par exemple, vous pourriez jouer au ping-pong avec de vraies raquettes mais avec une balle générée par ordinateur. C’est un terme plus facile à saisir et moins hasardeux que la réalité augmentée. La grande question pour 2023 est de savoir quel nom Apple va choisir pour désigner la technologie à l’annonce de son premier casque de RA/RV/RM qui, selon la rumeur, tourne sur un logiciel dénommé realityOS.

Conflit gelé

Un conflit gelé est un face-à-face militaire où les combats réels ont cessé mais où le conflit sous-jacent n’est pas résolu (par exemple, grâce à un traité de paix ou à un accord politique). Le risque d’une reprise des hostilités à tout moment est bien réel. Il résulte souvent d’une ingérence par une grande puissance. Vladimir Poutine a créé plusieurs conflits gelés dans des régions de l’ex-Union soviétique (y compris, depuis fin 2014 jusque début 2022, dans l’est de l’Ukraine) comme moyens pour déstabiliser des pays voisins. Ce genre de conflit peut durer plusieurs dizaines d’années, comme c’est le cas en Ossétie du Sud et en Abkhazie, des républiques soutenues par la Russie et qui se sont séparées de la Géorgie au début des années 1990. En 2023, la faiblesse russe risque de remettre le feu aux poudres dans certains conflits gelés.

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Regazéification

Le gaz naturel est normalement acheminé par pipeline car contrairement au pétrole, il est difficile à charger et à décharger dans des bateaux. Par conséquent, les marchés du gaz naturel sont bien moins liquides que ceux du pétrole, car un pipeline est généralement nécessaire entre l’acheteur et le fournisseur. Mais le gaz naturel liquéfié (GNL) change la donne. En effet, à -162 °C, le gaz naturel se liquéfie et son volume est 600 fois moins important, ce qui lui permet d’être transporté sur de longues distances en utilisant des navires-citernes spéciaux dotés de capacités de refroidissement cryogénique.

Cela permet d’assurer le commerce mondial du gaz naturel, ce qui est pratique pour les pays européens qui souhaitent réduire leur dépendance au gaz russe livré par pipeline. Dernièrement, les pays européens ont commencé à en acheter aux Etats-Unis et au Qatar, deux gros exportateurs de GNL. Le processus permettant de retransformer le GNL en gaz afin qu’il puisse être réinjecté dans les pipelines et utilisé comme carburant s’appelle la regazéification. Cette opération a généralement lieu dans un terminal GNL sur la côte. Mais la construction d’installations côtières prend du temps. Une solution plus rapide consiste donc à louer des bateaux appelés “unités flottantes de stockage et de regazéification” pour s’en occuper. Le gouvernement allemand a affrété cinq de ces bateaux pour renforcer sa capacité d’importation de GNL.

Emissions de scope 1, 2 et 3

Les émissions de scope 1 sont celles directement provoquées par les activités d’une entreprise, comme la combustion de carburant par les usines ou les véhicules. Les émissions de scope 2 sont les émissions indirectes (d’une centrale nucléaire, par exemple) résultant de la consommation d’énergie d’une entreprise. Les émissions de scope 3 sont toutes les autres émissions découlant des activités des fournisseurs et des clients d’une entreprise. Pour une compagnie pétrolière, les émissions issues de la combustion du pétrole qu’elle vend à ses clients sont des émissions de scope 3. Les entreprises devraient-elles être responsables de ces émissions? En 2023, de plus en plus de législateurs devraient défendre ce point de vue.

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Aridification

A quel moment les termes “sec” ou même “mégasec” ne suffisent-ils plus pour décrire une période de sécheresse? A certains endroits, les scientifiques et les responsables parlent désormais d’aridification, soit une sécheresse à long terme d’une région. La hausse des températures due au changement climatique a de nombreuses répercussions indirectes. En effet, dans des régions déjà arides, comme le sud de l’Europe, la côte australienne et le sud de l’Afrique, le changement climatique fait fondre le manteau neigeux et assèche les rivières, les sols et les forêts. En Californie, en Espagne et ailleurs, l’été menace d’entraîner dans son sillage des feux de forêt encore plus graves. En 2023, ces régions seront aux prises avec des températures plus élevées, des feux plus intenses et un manque d’eau plus cruel que jamais. L’aridification contraindra les puissances agricoles, comme la Californie et la Chine, à tenir compte de la diminution des réserves d’eau. Et les villes desséchées s’attelleront à plafonner la croissance démographique, qu’elles observeront d’un mauvais oeil.

Centres de résilience et trottoirs froids

Les villes des quatre coins du monde adoptent différentes mesures pour faire face à la menace de canicules, qui augmentent en fréquence et en intensité et exposent les personnes âgées et infirmes à un risque tout particulier. Des centres de résilience sont des bâtiments désignés (ou dans certains cas, des capsules créées avec des conteneurs) au sein d’une communauté afin d’assurer des lieux de refuge climatisés avec de l’eau potable, un accès à internet et des installations de chargement de téléphone. Les villes réduisent également les températures en introduisant des toits froids (couverts de peinture blanche ou de matériaux réfléchissants) et des trottoirs froids (traités avec un revêtement spécial) pour réfléchir la lumière du soleil et diminuer l’absorption de chaleur. Los Angeles, Phoenix et Tokyo sont des villes pionnières en matière de routes et de trottoirs froids.

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Dead pool

Pour la plupart d’entre nous, dead pool fait penser à l’antihéros sarcastique de Marvel incarné par Ryan Reynolds à l’écran. Mais dans les Etats occidentaux des Etats-Unis, la signification est tout autre. En effet, la plupart des grands réservoirs de l’Ouest américain ont été créés par l’endiguement des rivières au 20e siècle. Cependant, ces lacs artificiels ont fondu comme neige au soleil au cours des 20 dernières années, sous le coup de l’assèchement des rivières qui les alimentent. Quand un réservoir est épuisé au point que l’eau ne coule plus en aval, il se transforme en bassin statique, mort (dead pool en anglais). En 2023, certains réservoirs s’approcheront de cet état. En effet, le lac Mead et le lac Powell (les deux plus grands réservoirs des Etats-Unis, sur le fleuve Colorado) ont atteint des niveaux de sécheresse extrêmement préoccupants. Si le lac Powell (photo) devient un bassin mort, l’approvisionnement en eau baissera pour les 40 millions de personnes du sud-ouest qui dépendent du fleuve Colorado pour leur eau.

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E-carburants

Les carburants de synthèse, aussi appelés combustibles synthétiques, sont des alternatives complètes aux hydrocarbures conventionnels (comme l’essence, le diesel et le kérosène). Elles sont produites de manière artificielle plutôt qu’à partir du pétrole. Les électrocarburants ou e-carburants sont des carburants de synthèse créés grâce aux énergies renouvelables. L’énergie solaire ou éolienne est utilisée pour séparer l’hydrogène et l’oxygène de l’eau par électrolyse. L’hydrogène est ensuite combiné au dioxyde de carbone, soit issu de processus industriels, soit extrait de l’atmosphère, pour produire un hydrocarbure. En fonction du processus utilisé, le carburant obtenu peut avoir une empreinte carbone plus faible que le carburant conventionnel, voire être intégralement neutre en carbone. Les e-carburants n’ont pas vraiment d’intérêt pour les véhicules routiers (qui peuvent être facilement électrifiés) mais ils pourraient propulser les navires et les avions en reconditionnant l’électricité renouvelable sous forme de carburant liquide.

Jeudredi

Les craintes du début de la pandémie de Covid-19 selon lesquelles les travailleurs ne reviendraient jamais au bureau se sont révélées infondées. Tout comme l’espoir que les employés reprennent leurs anciennes habitudes de travail. Au contraire, de nombreux travailleurs ont tendance à ne venir au bureau que les mardis, mercredis et jeudis. Les villes ont beau refuser d’admettre cette tendance, en 2023, elles devront s’adapter aux jeudredis. En effet, les bars sont remplis les jeudis soirs, les travailleurs se souhaitant déjà un bon week-end. Les bistrots peuvent plutôt facilement s’adapter en modifiant les rotations de leurs équipes mais pour les bureaux, il va falloir se montrer plus créatif, soit en réduisant le personnel, soit en trouvant d’autres usages pour leurs espaces les jours creux. Les opérateurs des transports publics devront eux aussi s’ajuster. Plutôt que de réduire les services les lundis et vendredis, ils pourraient essayer de transférer la demande en diminuant les prix ces jours-là et en les augmentant entre le mardi et le jeudi.

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L’effet donut

En raison de la hausse du télétravail suscitée par la pandémie, les travailleurs privilégient davantage l’espace domestique plutôt que la proximité avec leur lieu de travail. Nicholas Bloom de l’Université de Stanford et Arjun Ramani, aujourd’hui correspondant pour The Economist, ont identifié un “effet donut” dans de grandes villes. En effet, à mesure que les travailleurs s’éloignent des centres-villes, les valeurs locatives en périphérie ont augmenté, créant ainsi un anneau de croissance. Ce nom fait référence au fait que ce beignet américain est troué au milieu. Les promoteurs de biens commerciaux espèrent que l’attrait pour les centres-villes repartira à la hausse grâce à des aménagements exceptionnels, comme de magnifiques bureaux et de splendides vues. Ils préféreraient ainsi un beignet britannique qui, plutôt que d’avoir un trou en son centre, est rempli de confiture.

Battery Belt

La Rust Belt (ceinture de la rouille) est le nom qui a été donné aux régions des Etats-Unis qui ont souffert du déclin de l’industrie manufacturière depuis les années 1950. Aujourd’hui, des efforts sont en cours pour revitaliser ces régions en encourageant les investissements dans de nouveaux secteurs écologiques, comme la fabrication de voitures électriques, ainsi que des giga-usines qui produisent des batteries pour l’automobile. Aussi, Ford investit 50 milliards de dollars pour étendre sa production de véhicules électriques ; son concurrent GM investit quant à lui 35 milliards de dollars, et, selon les estimations, 40 milliards de dollars sont injectés pour créer ou étendre la production de batteries dans cette nouvelle Battery Belt (ceinture de batterie).

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Yimby

Si les Nimby (acronyme de l’expression Not in my backyard, littéralement “pas dans mon arrière-cour”) ne veulent pas de nouvelles constructions dans leur jardin, les Yimby, quant à eux, disent oui au développement urbain. Préférant le développement à haute densité que l’étalement urbain nécessitant l’usage de la voiture, ce mouvement existe depuis des années mais n’avait qu’une influence limitée sur les règles d’urbanisme. Cela devrait changer en 2023. En effet, au mois de juillet, la loi sur le logement abordable et les emplois de haute qualité entre en vigueur en Californie. Il sera désormais plus facile de construire des maisons dans des quartiers actuellement dominés par des bureaux, des magasins et des parkings et la séparation rigide qui existait entre les quartiers résidentiels et les quartiers d’affaires, créée par les lois sur les zonings, sera assouplie. La Californie tempérera également les règles forçant les promoteurs à prévoir tant de places de stationnement. Ainsi, les obligations relatives aux parkings seront amoindries pour les nouveaux bâtiments proches des transports publics, ce qui devrait réduire les coûts et les prix de construction. Et quand la Californie évolue, le reste du monde a tendance à suivre.

Centrale électrique virtuelle

Un nombre croissant de résidences et d’entreprises se dotent de panneaux solaires et de batteries pouvant fournir de l’électricité non seulement à la propriété elle-même, mais aussi au réseau électrique en cas de besoin. S’ils sont utilisés ensemble en grande quantité et coordonnés via internet, des centaines de milliers de ces petits systèmes de génération et de stockage à petite échelle pourraient agir comme une centrale électrique virtuelle activée et désactivée dans des délais extrêmement courts. Les propriétaires doivent accepter que leur équipement soit ainsi utilisé et ils seraient payés pour l’énergie fournie. Ces centrales électriques virtuelles peuvent éliminer la nécessité de créer des “centrales de pointe” pour maintenir l’approvisionnement en période de pic. Elles peuvent également aider les compagnies d’électricité à réguler la fréquence et la tension, devant toutes deux être gérées avec soin pour équilibrer l’offre et la demande, particulièrement sur les réseaux électriques qui dépendent fortement de sources intermittentes, comme l’énergie solaire ou éolienne. Les centrales électriques virtuelles sont une des manières dont les “réseaux intelligents” pourraient faciliter la transition vers des sources d’énergie renouvelable. Elles ont été déployées en Australie, au Royaume-Uni, en Californie et en Allemagne.

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Vertiport

Les taxis aériens, également appelés voitures volantes ou eVTOL (pour electric vertical takeoff and landing, soit aéronef à décollage et atterrissage verticaux électrique), sont pour l’essentiel des drones multirotors suffisamment grands pour transporter des passagers. Plusieurs entreprises dans le monde espèrent que ce genre de véhicules obtiendra l’approbation des autorités réglementaires en 2023 pour devenir une forme rapide et durable de transport urbain. Mais les eVTOL ne peuvent pas décoller et atterrir n’importe où. Ils auront en effet besoin de lieux spécifiques, appelés vertiports, qui sont entre des aéroports et des stations de métro et qui permettent aux eVTOL de s’intégrer aux réseaux de transport existants, comme les infrastructures routières et ferroviaires. Cette nouveauté représente un sacré défi pour les architectes et les urbanistes, qui créent déjà des aménagements originaux.

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