Les guerres de Don McCullin

Near Checkpoint Charlie, Berlin, 1961. © TATE 2019/COURTESY OF DON MCCULLIN

Le travail de l’exceptionnel reporter anglais est présenté dans une importante expo londonienne à la Tate Britain où ses images de conflits, comme de paysages, n’occultent jamais les fêlures humaines.

Vous connaissez sans doute le travail de Donald McCullin – né à Londres le 9 octobre 1935 – sans forcément identifier son nom ni son histoire. L’une de ses plus fameuses images est celle d’un marine prise en 1968 pendant la bataille de Hué alors que l’armée américaine tente de reconquérir la ville vietnamienne. Le jeune soldat, photographié à courte distance, accroché à son fusil, les yeux dans l’objectif, semble intégralement paralysé par ce qui se passe autour de lui. Cette guerre interminable, hors champ. Le portrait est aussi remarquable par l’utilisation d’un noir et blanc cru et charnel, dont les teintes anthracite ont le talent de reproduire à ce point la réalité charbonneuse. Cette utilisation de la photographie qui ignore la couleur est donc au coeur des 259 négatifs tirés sur épreuve gélatine, installés dans les 10 salles de la Tate Britain jusqu’en mai.

Don McCullin
Don McCullin© TATE 2019/COURTESY OF DON MCCULLIN

Don McCullin a énormément chassé la guerre, en particulier pour le Sunday Times, voyageant pendant au moins trois décennies de l’Asie à Chypre en passant par le Biafra, le Liban ou le Cambodge. L’histoire qu’il raconte offre des témoignages vibrants, comme celui de cet enfant africain albinos d’une terrifiante maigreur annonçant sa mort imminente. Le photographe n’a jamais eu de cesse d’accorder un intérêt particulier au voisinage naturel du Royaume-Uni et de l’Irlande. C’est dans le quartier londonien où il grandit, Finsbury Park, que McCullin réalisa ses premiers clichés vendus à la presse à l’âge de 23 ans : un gang de loubards, posant la morgue haute sur un échafaudage. Il éprouva aussi beaucoup d’attachement pour l’Irlande du Nord, photographiée durant les troubles interminables qui opposent les communautés catholique et protestante. Tous ces spasmes faisant l’histoire contemporaine ont laissé place, la cinquantaine venue – dans les années 1980 -, à une autre approche : celle de photographier les paysages. Ceux de son lieu de vie, le Sommerset, puis du Mur d’Hadrien séparant Ecosse et Angleterre et enfin des vestiges de l’Empire romain en Méditerranée, notamment ceux de la Syrie massacrée par l’Etat islamique. Comme si on ne quittait jamais vraiment ses sources.

” Don McCullin ” à la Tate Britain de Londres jusqu’au 6 mai, www.tate.org.uk/visit/tate-britain

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