Justice rendue

Marc Metdepenningen, " Crimes et châtiments dans l'histoire judiciaire belge ", éditions Racine, 192 pages, 19,95 euros.

A la ritournelle du ” C’était mieux avant “, pas sûr que Marc Metdepenningen y réponde par la positive, du moins en ce qui concerne son sujet de prédilection, l’actualité judiciaire qu’il suit depuis plus de 30 ans pour les lecteurs du journal Le Soir. Les cas d’espèce repris dans son ouvrage Crimes et châtiments dans l’histoire judiciaire belge datent tous du 19e siècle ou du tournant du 20e. Et force est de constater que la nature humaine n’a pas énormément changé depuis. Voici un siècle, l’appât du gain motivait déjà le criminel, et les amants cherchaient déjà à se débarrasser du conjoint encombrant. ” A cette période, le crime était bien plus répandu “, résume le journaliste.

Les drames d’hier semblent souvent être la première version de ceux qui surviennent aujourd’hui.

Recueil de chroniques parues dans le quotidien bruxellois et d’histoires inédites, l’ouvrage entend montrer la manière dont la justice était rendue durant les premières décennies de la jeune Belgique à travers la relation documentée de quelques affaires marquantes. Pour la sélection, le journaliste s’est fait aider notamment par le Centre d’histoire du droit et de la justice de l’UCLouvain et a pris un malin plaisir à jouer les historiens pour des affaires ” que j’aurais bien voulu suivre “, dit-il.

Crime banal

” En fin de compte, le crime est toujours banal “, résume Marc Metdepenningen, mais les histoires racontées ont de quoi mettre en évidence les tensions de l’époque, qu’elles soient idéologiques, sociales ou politiques. Il en est ainsi de l’affaire des ” feux de la Saint-Genois ” quand l’évêque de Bruges enjoignait à ses ouailles de refuser de se faire inhumer dans le nouveau cimetière communal laïc. Les paroissiens échauffés par des sermons incendiaires s’en allèrent bouter le feu aux biens de certains élus communaux libéraux. Autre exemple : condamné à mort en 1851 pour avoir empoisonné son beau-frère, le comte Hippolyte Visart de Bocarmé se voit refuser la grâce royale par Léopold Ier, qui craignait s’attirer les foudres populaires s’il sauvait un aristocrate.

Peine capitale

De peine capitale, il en est d’ailleurs souvent question dans ce livre. La Belgique de 1830 la prévoyait bien dans son Code pénal mais l’appliquait de manière modérée. ” La révolution de 1830 se voulait humaniste. Très tôt, la peine de mort sera mise en question, de manière à montrer aux puissances voisines que la Belgique est un pays développé. Si on trace l’appétence du public pour ce genre de peine, elle est à mettre en balance avec la résistance des souverains à son application. ” Cela n’empêchera toutefois pas le passage sous la guillotine d’un Couvinois de 17 ans, qui avait tué son père.

Si les salles des tribunaux grouillent de monde, c’est que la presse de l’époque harangue souvent ses lecteurs. D’où la nécessité d’une certaine prudence à la lecture des comptes rendus d’audience, prévient Marc Metdepenningen : ” Il faut se méfier du transcrit des débats. La presse était essentiellement réservée à un public de nantis. Mais comme on dit dans le métier, toutes les affaires se valent, tout dépend de la manière dont on les raconte “.

Et l’auteur de nous faire part d’une réflexion sur son propre métier qui a parfois tendance à tomber dans l’excès inverse. ” Le chroniqueur judiciaire doit-il être le sténographe de l’audience ou le meilleur spécialiste de l’affaire, laissant sa plume pointer des détails au final importants, mais en restant un témoin indépendant des débats ? “. On imagine que le choix de notre interlocuteur se porte sur la seconde option.

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