Vers la création d’une nouvelle Silicon Valley plus verte? Le projet fou des géants de la tech

Silicon Valley
En Californie, le logement est depuis longtemps un problème insoluble. © Getty Images
Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste

Plusieurs milliers d’hectares de terrains vendus à une mystérieuse société, à proximité de San Francisco. Qui se cache derrière cet étrange achat qui table à 800 millions de dollars. Et pour quoi faire ?

Bâtir une nouvelle Silicon Valley plus propre, plus verte et plus saine? Tel est le nouveau projet loufoque de plusieurs gros noms du secteur de la tech, dont Marc Andreessen (a16z), Michael Moritz (Sequoia Capital) ou encore Reid Hoffman, le cofondateur de LinkedIn. Une sorte de ville idéale où les transports publics viendraient remplacer la voiture, où l’énergie serait propre et où des milliers d’emplois verraient le jour… Aux manettes de ce projet, la mystérieuse société Flannery Associates, qui a investi plus de 800 millions de dollars dans des terres agricoles à une centaine de kilomètres de la métropole californienne, rapporte le New York Times.

À l’origine du projet

En Californie, le logement est depuis longtemps un problème insoluble. Entre les difficultés d’agrandir la Silicon Valley, la montée des prix de l’immobilier, mais aussi la hausse de l’insécurité, du sans-abrisme et de la congestion… Les géants de la Tech sont frustrés par ce gel immobilier. Mais que faire quand l’espace est limité? Déménager!

En 2017, Michael Moritz – investisseur en capital risque britannique et ancien membre du conseil d’administration de Google inc. – contacte des investisseurs potentiels pour leur parler d’une opportunité. Celle d’investir dans la création… d’une nouvelle ville californienne, à quelques encablures de San Francisco. Et plus précisément dans le comté de Solano. En raison de sa situation – la zone est aride et coupée par une autoroute à deux voies – les terrains y sont en effet bon marché. Bref, le lieu semble tout trouvé pour créer ce nouvel eldorado.

Une grande ferme d’énergie solaire, des vergers avec plus d’un million de nouveaux arbres et plus de 5.000 hectares de nouveaux parcs et d’espaces ouverts.

Immédiatement, les plus grands de l’industrie mettent la main au portefeuille. Il faut dire: l’idée de construire une nouvelle ville qui reverrait tout de A à Z – de la conception aux méthodes de construction en passant par les nouvelles formes de gouvernance – séduit. Et l’argent, ils l’ont. 5 années et 800 millions de dollars plus tard, Flannery Associates rachète les terres convoitées.

Cette cité où je règne en maître…

Construire une ville à partir de rien. Encore une lubie de géants trop fortunés ne sachant que faire de leur argent? Ce n’est pas la première fois qu’un tel projet est imaginé par des milliardaires: certains rêvent de coloniser Mars, quand d’autres souhaitent bâtir leur propre empire. Quitte à réinventer la démocratie ou le capitalisme…

On peut notamment penser au projet hors normes de Marc Lore, fondateur de Jet.com et ancien directeur de Walmart. Lui rêvait d’une ville de 5 millions d’habitants plus équitable et plus inclusive et surtout… libre d’impôts. Aujourd’hui, la ville a un nom – Telosa, inspiré du mot grec « telos », qui signifie « accomplissement » – mais personne n’en a encore posé la première pierre.

Rêve ou réalité? Cette cité 2.0 ambitieuse a tout l’air d’une utopie.

Plus récemment, Elon Musk a lui aussi annoncé son intention de créer sa propre ville dans le Texas pour y loger ses employés. Ce projet – qui porte le nom de “Snailbrook” – devrait aboutir à la création d’une centaine d’habitations. Le patron de Tesla a acheté des milliers d’hectares de terrain aux États-Unis, le long de la Colorado River.

Du rêve à la réalité? Ces cités 2.0 ambitieuses ont tout l’air d’une utopie. Mais le passé nous le prouve: avec un budget et un objectif, on peut (presque) tout faire. Même construire une ville entière. Souvenez-vous, le père de la bombe atomique J. Robert Oppenheimer a fait bâtir la cité de Los Alamos au cœur du désert du Nouveau-Mexique afin d’y dissimuler un laboratoire ultra-secret. C’est là qu’il mettra au point une arme révolutionnaire jusqu’alors inégalée: la bombe atomique.

Projet écolo ou greenwashing?

“Une grande ferme d’énergie solaire, des vergers avec plus d’un million de nouveaux arbres et plus de 5.000 hectares de nouveaux parcs et d’espaces ouverts.” Sur le papier, cette future cité semble cocher toutes les cases du parfait projet écolo. Mais en observant certains détails – la localisation, l’objectif ou le brouhaha immobilier que cela risque d’engendrer – n’est-il pas légitime de douter de la bienfaisance du projet ? Est-ce là une forme de greenwashing poussé à l’extrême ? La volonté de certains riches d’améliorer leur image en utilisant l’Argument de ce siècle, à savoir la protection de l’environnement ?

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