Pologne: son nouveau rôle international depuis la guerre en Ukraine
La Pologne, dont la position internationale avait nettement faibli après l’arrivée au pouvoir des nationalistes populistes en 2015, s’applique, avec conviction et succès, à redorer son blason, comptant désormais parmi les acteurs incontournables de la coalition soutenant l’Ukraine.
Il y a un an, elle a ouvert sa frontière aux millions d’Ukrainiens fuyant les frappes russes et, dans ce que certains nomment “un soulèvement humanitaire”, sa population a massivement accueilli ces réfugiés dans leurs maisons. La Pologne, à l’instar des pays baltes, s’est vite faite un des plus grands avocats de la cause ukrainienne, a transmis de grandes quantités d’armes et d’autres équipements militaires à Kiev, devenant aussi une plaque tournante pour l’aide internationale destinée à ce pays en guerre.
Voisine directe de l’Ukraine, elle a accueilli sur son sol d’importants dispositifs de l’Otan, dont elle est membre depuis 1999, notamment environ 10.000 soldats américains, et vient de se lancer dans d’imposants achats d’armes afin de renforcer ses propres capacités de défense. Son budget militaire devrait dépasser en valeur quatre pour cent de son produit intérieur brut cette année, selon le Premier ministre Mateusz Morawiecki.
“Frontière morale”
La Pologne sert aussi d’escale à la majeure partie des dirigeants occidentaux se rendant à Kiev. Mardi, pour la deuxième fois en douze mois, le président américain Joe Biden a entamé une visite officielle de deux jours à Varsovie, juste après son passage surprise à Kiev, à l’occasion du premier anniversaire de la guerre que la Russie a déclenchée contre l’Ukraine.
La veille, s’arrêtant dans la capitale polonaise juste avant de prendre le train pour celle de l’Ukraine, la Première ministre italienne Giorgia Meloni déclarait devant la presse : “face au conflit en Ukraine, la Pologne représente la frontière morale et matérielle de l’Occident”. “C’est un pays auquel nous, en tant qu’Européens, devons dire merci pour le travail extraordinaire qu’elle fait en soutien à l’Ukraine”, a-t-elle insisté.
Soutien unanime
Un message balsamique pour les oreilles polonaises, notamment celles des membres du gouvernement du parti Droit et Justice (PiS), sous le feu des critiques pour le non respect des principes de l’Etat de droit et pour le recul de la Pologne dans les classements internationaux concernant le respect des règles démocratiques et de la liberté des médias. La semaine dernière, la Commission européenne a annoncé saisir la justice de l’UE contre ce pays, à la suite d’arrêts du Tribunal constitutionnel polonais contestant la primauté du droit européen, une étape pouvant conduire in fine à de nouvelles sanctions financières.
“Cette guerre a montré que la Pologne était un pays indispensable, sans lequel l’aide à l’Ukraine serait beaucoup plus difficile, sinon impossible (…). Nous avons gagné en importance”, a reconnu sur les ondes de la radio TOK FM Marek Belka, un ancien Premier ministre de gauche et ex-chef de la Banque centrale de Pologne, aujourd’hui eurodéputé. Et d’ajouter que, pour se maintenir dans ce nouveau rôle, “il faudrait une amélioration des relations avec l’Europe”.
Une chose est certaine, la cause ukrainienne est un des domaines rarissimes où le gouvernement nationaliste populiste peut compter sur un soutien unanime de tous les acteurs sur la scène politique intérieure, un point important dans la perspective des prochaines élections législatives à l’automne.
“Pour l’instant, il s’agit d’un élément qui relie toutes les forces politiques en Pologne”, s’est félicité mardi l’ancien ministre polonais des Affaires étrangères Adam Daniel Rotfeld, à la radio TOK FM. “Cette classe politique qui manque de classe, s’est montrée dans ce cas à la hauteur de l’enjeu”, a-t-il ajouté.