Pékin ne sait plus comment enrayer la chute des actions chinoises

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Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Depuis 2021, les actions chinoises ne font que baisser. Pékin a décidé d’injecter 260 milliards d’euros pour les soutenir. Mais ce ne sera pas suffisant pour compenser le départ des investisseurs étrangers.

Ce n’est pas une baisse, c’est un krach rampant. Les actions chinoises et hongkongaises ont perdu plus de 6 000 milliards de dollars de valeur depuis leur sommet de 2021. Mais depuis plus de trois ans maintenant, l’indice CSI, l’indice de référence du marché chinois, perd de l’altitude. En trois ans, il a vu s’évaporer plus d’un tiers de sa valeur. Comme le fait remarquer l’agence Bloomberg : « Cela équivaut à peu près à la capitalisation boursière totale du Japon ».

Mesures insuffisantes

Pour contrer cette tendance délétère, le gouvernement chinois a décidé de mobiliser les comptes offshores des entreprises publiques chinoises pour financer un plan de 2.000 milliards de yuan (environ 260 milliards d’euros) pour soutenir le marché boursier. « Mais, fait observer l’économiste en chef de CBC, Bernard Keppenne, sur son blog, cette annonce a eu un effet très limité, car, pour beaucoup de gestionnaires, elle est largement insuffisante, et surtout il faut régler les problèmes de fond et pas se contenter d’injecter des capitaux dans la bourse ». Le Conseil des affaires de l’État, autrement dit le gouvernement central, a appelé lundi à un renforcement de la régulation financière, à davantage de transparence dans le marché et à des efforts pour améliorer la qualité des entreprises cotées en bourse.

La chute des actions chinoises s’explique par plusieurs éléments. Le premier est la nervosité des investisseurs locaux après les problèmes immobiliers et la décélération de la croissance chinoise. L’économie chinoise est confrontée à plusieurs vents contraires : des  forces déflatoires, une baisse de la confiance des ménages et des entrepreneurs et un vieillissement de la population qui commence à poser des problèmes structurels. Par ailleurs, l’endettement des entreprises et des pouvoirs publics est très élevé. Un autre élément, et ce n’est pas le moins important, est le retrait des investisseurs étrangers qui quittent le marché chinois pour aller vers d’autres marchés émergents. « Selon les estimations de l’Institute of International Finance, les sorties de fonds des portefeuilles chinois en 2023 s’élèvent à 82,2 milliards de dollars, tandis que les marchés émergents, hors Chine, ont enregistré 261,1 milliards de dollars d’entrées dans les portefeuilles des non-résidents », souligne Bernard Keppenne. Ce retrait des investisseurs va de pair, évidemment, avec les sanctions mises en place aux Etats-Unis depuis la présidence de Donald Trump. Une réélection de celui-ci ne serait pas une très bonne nouvelle pour l’économie chinoise.

Europe et indépendance stratégique

Mais en Europe aussi, des plans cherchant à dénouer les liens avec Pékin sont en préparation.

La Commission européenne présente d’ailleurs ce mercredi un plan stratégique sur ce thème. Selon Politico, « il renforcera les règles des prises de contrôle étrangères. L’idée est de protéger les joyaux de la couronne européenne, tels que les entreprises de robotique, de biotechnologie ou d’aérospatiale, afin d’éviter qu’ils ne soient happés par la Chine ou d’autres pays ». Les Etats-membres seront tenus de vérifier certaines prises de contrôle étrangères afin de s’assurer qu’elles ne portent pas atteinte aux intérêts de l’UE en matière de sécurité.

Toujours selon Politico : Bruxelles plaidera également en faveur d’une “certaine uniformisation” des contrôles des exportations de l’UE – qui sont actuellement décidés individuellement par chaque pays de l’UE – afin de combler certaines faiblesses et pour éviter que des  technologies sensibles à double usage (civil et militaire) puissent tomber dans des mains russes ou chinoises. Ces mesures européennes sont encore loin des mesures américaines, mais elles soulignent une tendance qui se renforce chaque jour : celle d’une mondialisation qui ne se fera plus qu’entre amis.

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