Les dirigeants américains s’attendent à une victoire de Trump (mais cela ne les empêche pas de dormir)

Trump
© Getty

Tant en public qu’en coulisse, les dirigeants américains ne font plus mystère qu’ils se préparent à un retour de Trump. Selon la chaîne économique américaine CNBC, les dirigeants de Wall Street sont même convaincus que l’Amérique se « porterait bien » s’il revenait à la Maison-Blanche. L’ex-président Donald Trump devrait, sauf grosse surprise, représenter les républicains pour la présidentielle de novembre. Le retrait de DeSantis dimanche sonne, en effet, le glas de tout suspense.

A Davos, le sujet qui a dominé les conversations est sans conteste un éventuel retour de Trump à la Maison-Blanche en 2024. C’était aussi la question récurrente qui était posée à tous ceux qui s’installaient dans le studio pop-up de la chaîne économique CNBC. Ils y furent nombreux à dire qu’il était fort probable que Trump redevienne président. Et si les chefs d’entreprises européens ne cachent que difficilement l’horreur qu’ils éprouvent à cette idée, il n’en va pas de même parmi les PDG et milliardaires américains. Eux sont nettement plus confiants.

Ce n’est pas parce qu’un chien aboie, qu’il mord

Notamment parce que, selon la chaîne, ils connaissent mieux les freins et contrepoids qui existent dans la législation américaine. Ainsi, si Trump peut vociférer tout un tas de choses et même émettre des décrets, il est loin d’être certain qu’il parvienne à tout appliquer. Comprendre : ce n’est pas parce qu’il aboie qu’il est capable de mordre. Ainsi, un PDG a anonymement déclaré  “Nous avons un système judiciaire. Le Congrès sera probablement divisé. Il est normal d’être prudent, mais ce ne sera pas la fin du monde”. Jamie Dimon, PDG de JPMorgan Chase, s’est même montré particulièrement positif.  “Prenons un peu de recul et soyons honnêtes. Il avait en quelque sorte raison au sujet de l’OTAN. Il avait raison sur l’immigration, il a fait croître l’économie de manière satisfaisante. La réforme fiscale a fonctionné. Il avait raison à propos de la Chine. Je n’aime pas la façon dont il a parlé du Mexique, mais il n’avait pas tort sur certaines de ces questions essentielles. Et c’est pour cela qu’ils votent pour lui”.

Trump ou Biden, une même déconvenue

Stephen Schwarzman, PDG de Blackstone, a lui exprimé un autre point commun entre les dirigeants américains. A savoir, peu importe que ce soit Trump ou Biden qui remporte l’élection, dans les deux cas c’est une mauvaise chose. Car beaucoup de dirigeants ne sont guère plus à l’aise avec l’idée d’un Biden réélu. Ce dernier souhaite en effet taxer davantage les entreprises et réglementer plus strictement les banques et les entreprises technologiques. Jamie Dimon prend même la peine de préciser qu’il saurait survivre aux deux : « Nous saurons gérer les deux. Mon entreprise survivra et prospérera dans les deux cas.» Le grand manitou de l’IA, Sam Altman (OpenAI), s’est par ailleurs exprimé dans les mêmes termes : “Je pense que l’Amérique se portera bien quoiqu’il arrive pendant cette élection. Je pense qu’elle se portera également bien avec l’IA, quoi qu’il arrive au cours de cette élection”.

Souvent on se trompe à Davos

Ben Smith, cofondateur du média économique Semafor, nuance tout de même. Pour lui, les prédictions de Davos ces dernières années sont souvent à côté de la plaque. Elles sont même de tellement piètre qualité que cette tendance à faire de Trump le nouveau président pourrait se révéler être une excellente nouvelle pour Biden. Un avis partagé par l’historien Alexander Soros. Celui qui est aussi le fils de George estime lui aussi que les chances que Biden devienne le nouveau président sont élevées. “Le consensus de Davos est que Trump gagne. Mais ce consensus a la réputation notoire de toujours se tromper.» D’autant plus qu’aux États-Unis, précise-t-il, « ce n’est pas le président qui obtient le plus de voix qui gagne, mais celui qui a le plus d’États derrière lui. Ce qui fait que la décision finale est prise dans six ou sept “swing states” ».  Soit là où le moins polarisant Biden a encore ses chances.

Le New Hampshire décisif

Et puis Trump n’est pas encore officiellement le candidat républicain. Les primaires républicaines ne sont pas encore terminées. Une nouvelle a même lieu le 23 janvier au New Hampshire. Ce n’est que la seconde étape rituelle du parcours des prétendants à la Maison-Blanche, mais elle devrait néanmoins déjà mettre fin à tout suspense. Après le retrait ce dimanche du gouverneur de Floride, Ron DeSantis, nombreux sont ceux qui considèrent les primaires comme déjà jouées. Seuls demeurent en effet en piste Donald Trump et Nikki Haley. Avec un net désavantage pour la seconde.

Cette ancienne ambassadrice aux Nations unies et gouverneure de Caroline du Sud était pourtant jusqu’il y a peu la chouchoute des patrons. Des patrons qui avaient ouvert leur portefeuille pour soutenir sa campagne. Chacun espérant un « miracle » capable d’éviter d’avoir à choisir entre Trump et Biden. Avant la première primaire, on retrouvait ainsi parmi ces donateurs l’investisseur et CEO du fond de couverture Pershing Square Capital Management Bill Ackman, le président-directeur général de la banque JPMorgan Chase Jamie Dimon (le même qui s’est montré si clément envers Trump à Davos), le milliardaire et lobbyiste Charles Koch, de Koch Industries, l’investisseur milliardaire Stanley Druckenmiller ou encore Reid Hoffman, cofondateur de LinkedIn. Du beau monde donc et une aide plus que bienvenue dans ce pays où les campagnes présidentielles se remportent à coups de millions de dollars. Sauf que ces dons provenant de chefs d’entreprises et figures de Wall Street l’ont également desservi. Ils en ont fait la candidate de l’establishment.

C’est donc avec un certain cynisme que beaucoup de milliardaires qui la soutenaient hier attendent aujourd’hui la primaire du New Hampshire. Histoire de savoir si elle a encore une petite chance. La victoire fracassante de Trump dans l’Iowa a fait plus que refroidir les ardeurs.

Avant l’annonce du retrait de DeSantis, Nikki Haley pointait pour sa part 15 points derrière Donald Trump dans les moyennes des sondages de RealClearPolitics et FiveThirtyEight, et la récente bonne dynamique dont elle a bénéficié semble s’être tassée. Mais une performance inattendue mardi pourrait la placer dans une bonne position pour le prochain scrutin fin février, dans son Etat de Caroline du Sud, dont elle a été gouverneure.

Haley n’a donc aujourd’hui d’autre choix que de s’imposer au New Hampshire ou de jeter le gant. Car «personne n’aime jeter de l’argent dans un trou noir » précise Ken Langone, cofondateur de la chaîne Home Depot, au Financial Times.

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