Les “Bidenomics”, que signifie cette nouvelle terminologie du président américain ?
Roosevelt a eu son “New Deal”, Biden a ses “Bidenomics”… du moins, c’est avec cette terminologie que le président américain espère convaincre des électeurs peu enthousiastes de tous les bienfaits de ses grandes réformes économiques
Voici une tentative d’éclairage de ce terme que Joe Biden entend marteler jusqu’à la présidentielle de 2024, à commencer par un discours annoncé comme “majeur” à Chicago mercredi.
Centaines de milliards
En lançant le mot de “Bidenomics”, les conseillers de Joe Biden, en campagne pour sa réélection, espèrent donner enfin de la visibilité aux impulsions et aux réussites économiques dues, selon eux, au démocrate de 80 ans. Lequel se débat toujours avec une cote de popularité bien pâle. Le terme recouvre les grandes initiatives des deux premières années du mandat Biden, avant que le démocrate ne perde en partie le contrôle du Congrès. Il y eut d’abord le “American Rescue Plan”, une colossale enveloppe de 1.900 milliards de dollars votée peu après l’investiture pour tourner la page de la pandémie de Covid-19. Puis un programme de grands travaux pour remettre en état les infrastructures vétustes de l’Amérique: ponts, autoroutes, canalisations, réseaux internet… Le tout représentant une nouvelle dépense fédérale de 550 milliards de dollars.
Le “Inflation Reduction Act”, lui, est un programme de 430 milliards de dollars destiné à accélérer la transition énergétique avec des produits “Made in America” et à soulager certaines dépenses contraintes des ménages, notamment dans la santé. Vient enfin le “CHIPS Act”, lourd de 280 milliards sur dix ans, qui doit doper l’installation aux Etats-Unis d’usines technologiques de pointe.
Redémarrage économique
“La stratégie du président a encouragé la plus forte reprise de toutes les grandes économies du monde”, claironne la Maison Blanche dans un récent mémo. La croissance américaine est attendue à 1,6% cette année par le FMI, le double de celle prévue pour la zone euro. Le chômage est passé sous les 4% et, selon la Maison Blanche, plus de 13 millions d’emplois ont été créés depuis l’investiture du président démocrate. Les dépenses pour la construction d’usines aux Etats-Unis ont doublé depuis la fin 2021, assure le Trésor américain. Mais jusqu’ici, Joe Biden a bien du mal à profiter, politiquement, de ces statistiques robustes. Selon un sondage CBS News/YouGov début juin, 63% des Américains estiment que l’économie du pays va plutôt mal voire très mal.
Cols bleus
Si le terme “Bidenomics” est une référence aux “Reaganomics”, le programme économique mené par Ronald Reagan dans les années 1980, la logique de l’administration Biden est très différente. Là où l’ancien président républicain a conduit des réformes libérales, avec baisses d’impôt et austérité budgétaire, Joe Biden promet de “reconstruire l’économie de bas en haut”. En clair, de soutenir la demande des classes populaire et moyenne, en rejetant la théorie dite du “ruissellement”, selon laquelle miser sur les plus fortunés et les grandes entreprises profite in fine à tout le monde.
Le président américain répète que sa politique doit profiter surtout aux travailleurs sans diplôme universitaire. Joe Biden a fort à faire pour regagner du terrain auprès de l’électorat blanc et populaire, secoué par la mondialisation et les avancées technologiques, que son prédécesseur Donald Trump a su en partie séduire.
Une stratégie risquée
Miser aussi fortement sur l’économie et l’emploi n’est pas sans risque. Les Etats-Unis, après une reprise très forte suite à la pandémie de Covid-19, ne sont pas à l’abri d’une récession. En cas de coup d’arrêt marqué de l’économie avant la présidentielle de novembre 2024, le discours triomphant de Joe Biden pourrait lui revenir comme un boomerang. La stratégie de promotion des “Bidenomics” peut aussi se heurter au problème de l’inflation, qui n’est pas de l’histoire ancienne. Certes, le rythme de hausse des prix sur douze mois ralentit fortement: l’inflation est désormais deux fois moins élevée qu’en juin 2022, lorsque le pic de 9,1% avait été atteint, et plus basse que dans les autres grands pays industrialisés.
Mais la courbe statistique n’est pas le ressenti d’un ménage face à sa facture de supermarché. Selon un récent sondage du Pew Research Center, le coût de la vie reste la première préoccupation des Américains.
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