Le Mexique, nouvelle Manufacture du Monde ?
De nombreuses entreprises occidentales essayent de s’éloigner de la Chine. Des pays profitent de cette “relocalisation”, dont le Mexique. Mais le miracle économique cache une autre vérité : le pays serait une porte dérobée pour les entreprises chinoises qui veulent éviter les droits de douanes américains.
La pandémie et les tensions internationales comme la guerre commerciale, fiscale et économique entre les Etats-Unis (ou l’Occident plus largement) et la Chine mène à un phénomène de relocalisation de la part de nombreuses sociétés. C’est-à-dire qu’avant, de nombreuses entreprises délocalisaient leur production ailleurs, surtout en Chine, pour réduire les coûts. Mais maintenant, elles cherchent à réduire leur dépendance à la Chine et rapprochent au moins une partie de la production vers le marché auquel elle est destinée.
Dans cette tendance, quelques acteurs se distinguent. L’Inde par exemple, parce qu’elle est juste à côté de la Chine ou la Turquie pour sa proximité avec l’Europe (pour les entreprises européennes). Mais également le Mexique, pays voisin des Etats-Unis (les pays ont conclu un accord de libre échange en 2020, incluant aussi le Canada). C’est une piste suivie par les entreprises américaines, logiquement, mais pas que : même les entreprises chinoises s’y installent.
Le Mexique est ainsi devenu la première origine des importations vers les Etats-Unis en 2023. Notamment grâce aux produits manufacturés, dont surtout des voitures et des pièces de voitures. Les chiffres devraient continuer à augmenter dans les années à venir. Les importations chinoises aux Etats-Unis ont quant à elles chuté de 20% en un an.
Les grands investissements et l’installation de nouvelles grosses usines d’entreprises américaines se font encore attendre, mais il y a en tout cas un sentiment de boom, du moins dans le nord du pays. Certaines entreprises ont déjà sauté le pas, comme Tesla, qui a annoncé la construction d’une nouvelle “méga-usine” dans le pays.
Chine – US via le Mexique, une porte dérobée ?
Le principal concurrent de Tesla, BYD, a également annoncé vouloir s’installer dans le pays, avec la construction d’une usine. Le constructeur de véhicules électriques n’est pas la seule entreprise chinoise à lorgner le Mexique, pour y construire des usines. Le pays deviendrait ainsi une manufacture du pays souvent appelé la “Manufacture du Monde”.
Les entreprises chinoises ne s’y rendent pas forcément pour délocaliser des activités de production qui seraient moins coûteuses au Mexique et vendre les produits en Chine, comme l’Occident l’a fait avec la Chine. C’est surtout pour se rapprocher du marché américain. La chaine d’approvisionnement serait ainsi plus courte et le lieu de production plus proche du lieu de vente. Ce qui ressemble en soi au principe de relocalisation énoncé plus haut, mais un peu à l’envers.
Mais l’attrait pour le Mexique est aussi fiscal. En y produisant leur marchandise, les entreprises chinoises pourraient éviter les droits de douane élevés qu’elles doivent payer en important directement depuis la Chine. Autant Biden que Trump promettent d’ailleurs, dans leur campagne électorale, d’augmenter ces taxes.
Les entreprises chinoises n’attendraient en réalité même pas d’y installer une entreprise. Elles exportent de nombreux produits (dont acier et aluminium, pour la production de pièces de voitures) vers le Mexique, qui sont ensuite acheminés vers les Etats-Unis. C’est ce que rapporte CNN, analyses économiques à l’appui. Voilà qui expliquerait aussi la hausse des chiffres des exportations mexicaines vers les Etats-Unis. Les hommes et femmes politiques américains commencent à s’inquiéter de cette porte dérobée et veulent plus de transparence de la part de Mexico City. Cette hausse rapide de la production et des exportations mexicaines pourrait donc être freinée, et le Mexique pourrait ne pas devenir, si vite, une nouvelle plaque tournante mondiale de la manufacture.
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