Elon Musk dans l’administration Trump: révolution ou futur chaos?
Patron visionnaire et génie de l’entrepreneuriat, Elon Musk, le patron de Tesla, SpaceX et X, a été appelé par le nouveau président pour rendre l’administration américaine plus “efficace”. Au vu de son style managérial et de ses intérêts dans le privé, cette nomination pose pas mal de questions.
C’est un poste qui lui aura coûté des millions de dollars. Pas loin de 200 millions d’après certains observateurs. Mais une goutte d’eau dans sa gigantesque fortune. Après avoir largement soutenu Donald Trump dans sa reconquête de la Maison Blanche, l’entrepreneur milliardaire Elon Musk se voit confier un rôle officiel dans l’équipe gouvernementale du nouveau président américain. Le patron de Tesla, SpaceX et X, deviendra “ministre de l’Efficacité gouvernementale”. Une surprise pour beaucoup… qui n’est pas sans poser question.
Cet électron libre est désormais chargé de rationaliser une bureaucratie américaine tentaculaire. Donald Trump lui a, en effet, donné carte blanche pour réinventer le fonctionnement du gouvernement fédéral. Et le mandat est très clair : supprimer la bureaucratie inutile, réduire les dépenses de 2.000 milliards de dollars et transformer les agences gouvernementales en machines ultraperformantes. Sur papier, une mission qu’Elon Musk pourrait relever haut la main vu son profil de bulldozer, sa vision des plus originales et son tracé record dans les entreprises privées. Inutile de rappeler qu’après avoir révolutionné le secteur du paiement électronique avec PayPal (qu’il avait codirigé), l’homme a fait bouger les lignes de l’automobile mondiale avec Tesla et du vol spatial avec SpaceX.
Mais si tout semble lui réussir, ses décisions radicales et ses méthodes managériales ne plaisent pas vraiment à tout le monde. Son arrivée chez Twitter, par exemple, ne s’est pas faite sans heurts. Lors de l’acquisition du réseau social pour la somme astronomique de 44 milliards de dollars, l’homme a fait le ménage. Sur les 7.500 employés, plus de 50% avaient reçu un e-mail leur annonçant leur départ forcé de manière souvent peu élégante. Si vous y ajoutez plusieurs centaines de départs préalables d’employés craignant son arrivée à la barre, Elon Musk aura finalement fait fondre de 75 % les effectifs du réseau social qui allait être rebaptisé X. Et pour ceux qui restaient, il a imposé un rythme de travail effréné avec un niveau d’exigence placé très haut. Il a aussi aboli des avantages jugés non essentiels et a drastiquement réduit le temps de télétravail, les congés parentaux ou encore les budgets de formation.
Excellence et pression constante
Menant cette politique managériale “ultra-hardcore”, l’homme le plus riche de la planète exige de ses équipes une implication sans limites. Il se prend ainsi comme le standard sur lequel ses collaborateurs doivent se calquer. Comme, c’est aussi le cas chez Tesla, où les horaires de 80 heures par semaine ne sont pas des exceptions, particulièrement durant les périodes de lancement de nouveaux modèles. Le patron qui instaure un contexte d’urgence constante dans ses entreprises fixe également des objectifs particulièrement élevés, qui peuvent même sembler irréalistes, et s’attend à ce qu’ils soient atteints. Une culture d’entreprise jugée brutale mais qui porte ses fruits en matière de résultats. Avec comme contrepartie, un stress élevé au sein des équipes. Ce qui entraîne logiquement un turn-over assez important.
Avec son objectif d’optimisation du fonctionnement gouvernemental, on pourrait donc craindre la suppression de milliers de postes jugés redondants par un Elon Musk qui a d’ailleurs indiqué, dans une publication sur X, qu’il recherche des “révolutionnaires à haut QI, adeptes des petits gouvernements, prêts à travailler plus de 80 h par semaine sur des réductions de coûts pas glamour”. Le milliardaire pourrait également insuffler une dose d’innovation technologique dans l’administration fédérale. L’adoption de l’intelligence artificielle pour optimiser le travail des équipes (et pour en réduire le nombre) semble une évidence, alors que Musk développe des tas d’outils d’IA à destination du grand public, via sa start-up xAI ou en interne pour ses équipes. On peut imaginer une numérisation accélérée des services publics américains, une réduction drastique de la paperasse et une automatisation des processus bureaucratiques. Ce qui, sur papier, n’est pasforcément une mauvaise chose.
Sa nomination soulève aussi de nombreuses interrogations sur les liens étroits existants avec ses propres entreprises. Musk, dont la fortune avoisine les 320 milliards de dollars, dirige un empire tentaculaire comprenant notamment Tesla, SpaceX, X-Twitter, Neuralink, xAI et The Boring Company (qui veut populariser l’hyperloop). Toutes ces entreprises ont largement bénéficié du soutien financier de l’administration américaine : SpaceX aurait des contrats avec la Défense américaine à hauteur de 3,6 milliards de dollars et avec la Nasa pour pas moins de 12 milliards. Sa firme de voitures électriques a, quant à elle, décroché pour quasi 3 milliards de dollars de subventions fédérales afin de financer ses usines. Sans compter que les activités nombreuses et variées du milliardaire peuvent dépendre de décisions des autorités américaines et des diverses agences de régulation. Les politiques en matière de sécurité routière peuvent impacter Tesla et celles concernant le secteur aéronautique et spatial auront forcément un impact sur les activités de SpaceX. Sans oublier, la fameuse FDA, le gendarme américain de la santé, qui peut plus ou moins aider (ou entraver) les développements de Neuralink, le projet de développement d’implants cérébraux d’Elon Musk.
Les méthodes d’Elon Musk, brutales et sans concession, pourraient susciter une résistance interne importante dans le public.
Par ailleurs, le patron milliardaire a développé des intérêts un peu partout sur la planète grâce à ses entreprises. Mais ses liens avec des gouvernements étrangers – on pense ici aux Chinois ou aux Qatariotes par exemple – soulèvent d’autres questions également. Tout comme l’influence qu’il pourrait jouer dans la résolution ou non du conflit en Ukraine, lui qui aurait, selon certains médias américains, des contacts réguliers avec Vladimir Poutine.
Enfin, n’oublions pas que le duo Trump-Musk pourrait bien réserver d’autres surprises. Ces deux personnalités à l’ego surdimensionné et aux décisions imprévisibles n’en sont pas à leurs premiers contacts. En 2017 déjà, Musk avait déjà été conseiller de Trump avant de démissionner, suite au retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat. Récemment réconciliés, les deux hommes pourraient vite se fritter de nouveau en cas de désaccord ou de désalignement de leurs intérêts respectifs. Est-ce que le pari audacieux de Donald Trump d’intégrer Elon Musk à son administration mènera à une révolution administrative ou écrira-t-il un chapitre chaotique de son deuxième bail à la Maison Blanche ?
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