Le prix du gaz va-t-il à nouveau flamber en 2025 ?

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Baptiste Lambert

S’échangeant à 45 euros le MWh, le prix du gaz (TTF néerlandais) est toujours deux à trois fois supérieur à la période pré-crise énergétique. Pourrait-il encore grimper ? L’accord de transit par pipeline du gaz russe via l’Ukraine est sur le point d’expirer.

Il faut toujours le rappeler : il n’existe pas d’embargo sur le gaz russe. L’UE a fortement réduit sa demande, mais continue de se fournir chez son ennemi. C’est vrai via le GNL, qui a atteint des niveaux records en 2024, mais aussi par pipeline. Pour la première fois en presque deux ans, les importations en provenance de Russie ont été plus importantes que celles des États-Unis, selon le think tank Bruegel. Au total, l’UE reste le 4e importateur de gaz russe derrière la Chine, la Turquie et l’Inde.

Mais les exportations de gaz russe par pipeline sont sous pression. Car en 2025, l’accord de 5 ans entre la Russie et l’Ukraine prendra fin. Le président Volodymyr Zelensky refuse de le prolonger, alors que la Russie continue de pilonner les sources énergétiques de l’Ukraine. En 2024, environ 50% du gaz russe acheminé par pipeline a transité par l’Ukraine, l’autre moitié par la Turquie, car les pipelines Nord Stream et Yamal (via la Pologne) sont à l’arrêt.

Une Europe divisée

L’Europe, elle, est divisée sur la question. La semaine dernière, un porte-parole de la Commission européenne a déclaré que “la Commission n’a aucun intérêt à ce que le transit du gaz russe via l’Ukraine se poursuive“, et que l’UE ne soutient pas “les discussions sur une prolongation du contrat”. Cette réaction a poussé les prix du gaz à la hausse de 10%.

Mais plusieurs pays d’Europe de l’Est font cavaliers seuls. C’est vrai pour la Hongrie qui se fournit déjà en gaz russe via la Turquie et qui va intensifier cette route. Et désormais de la Slovaquie, dont le Premier ministre, Robert Fico, s’est rendu à Moscou, dimanche dernier, pour négocier directement avec la Russie. Notons que l’Autriche, l’Italie et la République tchèque seront également affectés par la fin du contrat entre la Russie et l’Ukraine.

Lors du dernier sommet européen, les discussions ont été vives entre Fico et Zelensky. Le Slovaque a estimé que “Kiev n’avait pas le droit de nuire aux intérêts économiques d’un État membre“. L’Ukrainien a répondu que l’Ukraine perdait beaucoup plus que de l’argent : “Nous perdons des gens”.

Credit : Bruegel

Impact contenu

À l’échelle du continent, l’impact d’un arrêt du pipeline ukrainien serait contenu. Tout d’abord, car cet arrêt a déjà été largement anticipé par le marché. Ensuite, parce que les pays qui le peuvent vont compenser par le pipeline turc. Le reste du continent continuerait à diversifier ses sources, notamment au niveau du GNL.

Les spécialistes ne s’attendent donc pas à une explosion des prix, sauf peut-être en cas d’hiver très rude. Les stocks de gaz ne sont remplis qu’à 75%, contre 85% l’année dernière à la même époque. “Mais ce n’est pas véritablement alarmant, juge Adel El Gammal, professeur en géopolitique de l’énergie à l’ULB. Il n’y a pas vraiment d’élément structurel qui annoncerait une nouvelle crise du gaz”, ajoute-t-il.

“On ne peut jamais jurer de rien avec les prix de l’énergie, mais on ne reviendra toutefois probablement jamais à des prix du gaz pré-invasion en Ukraine, nuance le spécialiste. Car la majorité du gaz importé en Europe est désormais du GNL. Or, on sait que la chaîne d’approvisionnement du GNL est plus coûteuse que le gaz par pipeline, parce qu’on doit le comprimer le gaz, puis le transporter par méthanier à très basse température, et enfin le regazéifier. À mon avis, en 2025, les prix vont se situer dans une fourchette comprise entre 35 à 45 euros le MWh, en l’absence de nouvelle crise géopolitique majeure.”

Le GNL russe dans la ligne de mire

Un élément pourrait néanmoins pousser les prix un peu plus haut. Il s’agit des éventuelles sanctions contre le GNL russe. 2025 signera l’arrivée de la Pologne à la présidence de l’Union européenne et on sait que Varsovie à le GNL russe en ligne de mire. Le Premier ministre Donald Tusk sera sans doute soutenu par de nombreuses capitales européennes, mais sera opposé aux mêmes protagonistes.

Des sanctions contre le GNL russe signifieraient qu’il faudra intensifier nos importations de GNL américain, plus cher. À cet égard, la Commission européenne et Ursula von der Leyen ont déjà un plan : convaincre Donald Trump de baisser ses barrières douanières contre l’importation de grandes quantités de GNL américain.

Rappelons que l’UE a pour objectif de se passer de tous les hydrocarbures russes d’ici 2027.

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