Facture d’énergie mensuelle ou facture d’acompte: laquelle privilégier?    

Ilse De Witte Journaliste chez Trends Magazine

Selon sa consommation d’énergie et ses capacités financières, il est parfois conseillé d’opter pour une facturation mensuelle en lieu et place d’une facturation d’acompte. Explications.  

À partir de 2024, tous les fournisseurs d’énergie actifs dans le Nord du pays devront proposer une facturation mensuelle. C’est ce qu’a décidé le gouvernement flamand, selon la ministre de l’Énergie, Zuhal Demir (N-VA). Avec ce système de facturation mensuelle, les clients reçoivent chaque mois un relevé pour le gaz ou l’électricité, plutôt qu’une facture sur acompte (ou facture anticipée). Jusqu’à présent, seuls les grands fournisseurs, avec plus de 200.000 clients, étaient tenus de le proposer. Plus de 100.000 contrats en Flandre sont désormais passés à la facturation mensuelle, selon Zuhal Demir. 

Au cours des trois dernières années, les prix du gaz, et dans une moindre mesure de l’électricité, était bien difficile à prévoir. Les factures sur acompte étaient privilégiées à une époque où les prix de l’énergie étaient plus ou moins prévisibles et où les contrats d’énergie à prix fixe dominaient. Mais les temps changent. 

  1. Davantage de contrats à prix variables 

Aujourd’hui, la situation est complètement différente d’il y a trois ans. En 2021, environ 70 % de tous les ménages avaient un contrat d’énergie à prix fixe pour l’électricité. Aujourd’hui, ce chiffre n’est plus que de 18 %. Pour le gaz naturel, encore moins de ménages disposent d’n contrat à prix fixe, soit 17,5 %.  

Avec un contrat à prix fixe, le seul facteur imprévisible est la consommation. Les ménages peuvent largement influencer cette consommation. Par exemple, en baissant le thermostat d’un degré, ils peuvent réduire la facture énergétique. De plus, cette consommation est assez prévisible si la consommation de l’année précédente a été établie. À moins qu’un ménage adopte des habitudes radicalement différentes ou qu’il y ait eu une modification considérable de la composition familiale, la consommation restera globalement similaire à celle de l’année précédente. 

Pendant des mois, il n’était pas possible d’obtenir de contrat à prix fixe en Belgique. Personne ne savait comment évoluerait les prix du gaz. Dans un tel contexte de prix variables et peu prévisibles, il était très difficile de prédire le montant de la facture énergétique pour une année complète. Un acompte mensuel n’est rien de plus ni de moins qu’un douzième de la facture totale attendue. Ces dernières années, certains consommateurs avec un tarif variable ont payé des acomptes mensuels bien trop bas, se retrouvant soudainement avec une facture de régularisation importante à payer. D’autres consommateurs ont payé beaucoup trop d’acomptes.  

Depuis peu, quelques grands fournisseurs d’énergie affichent à nouveau des tarifs fixes, mais ils pourraient inclure des primes de risque élevées pour se protéger contre le risque de voir les prix sur les marchés internationaux augmenter à nouveau. Si la différence entre le tarif variable et le tarif fixe n’est pas trop importante, il peut être intéressant de revenir à un tarif fixe. 

  1. Le prix du gaz reste assez imprévisible 

Le prix de référence pour un mégawattheure (MWh) de gaz a oscillé entre 30 et 50 euros au cours des trois derniers mois. Il s’agit de contrats à terme pour la livraison dans un mois qui sont négociés à la bourse d’Amsterdam (Dutch TTF Natural Gas Futures). Lorsque ce prix a atteint son pic de 311 euros fin août 2022, personne n’osait prédire l’effondrement qui suivrait. De même, presque personne n’a anticipé l’explosion du prix du gaz, conséquence de la guerre en Ukraine qui a fait chuter les relations entre l’Union européenne et son principal fournisseur de gaz, la Russie, au plus bas. 

En particulier lors de journées froides d’hiver, le prix du gaz pourrait augmenter. Bien que la probabilité d’une crise énergétique comme celle que nous avons connue en hiver 2022 soit très faible. 

  1. Moins de prévisibilité  

Un des arguments contre la facturation mensuelle de la consommation réelle est que les personnes ayant du mal à joindre les deux bouts ont besoin de prévisibilité sur leurs acomptes mensuels. Avec des tarifs variables, cette prévisibilité n’existe pas. Il est alors difficile de déterminer un acompte mensuel approprié et d’éviter les (mauvaises) surprises lors de la régularisation finale. Le nombre de plans d’étalement accordés par les fournisseurs d’énergie aux consommateurs a fortement augmenté ces dernières années. Lorsque de nombreux contrats à tarif fixe seront à nouveau disponibles, lorsque la concurrence sur ce marché redeviendra active, lorsque les prix du gaz seront à nouveau prévisibles, nous serons à nouveau dans une situation différente. 

74 % de la consommation de gaz a lieu pendant les mois d’hiver, de novembre à mars. Cela signifie des factures beaucoup plus élevées en hiver qu’en été avec une facturation mensuelle de la consommation réelle. Tout le monde n’a pas suffisamment d’argent de côté pour payer ces factures élevées en hiver. Plutôt que des acomptes basés sur des prédictions difficiles, les personnes disposant de peu de ressources financières pourraient également effectuer des paiements basés sur leur consommation réelle. Notons également que en cas de faillite d’un fournisseur d’énergie, les acomptes pourraient être perdus. 

Nous devons tous devenir un peu plus maîtres de notre propre consommation d’énergie. Pour le moment, tous les ménages n’ont pas encore de compteur numérique. Mais avec cette facturation mensuelle, les personnes sont plus conscientes de leur consommation et voient plus rapidement les effets des mesures d’économie d’énergie. Le gestionnaire de distribution d’électricité et de gaz flamand Fluvius promet que d’ici 2024, 80 % des ménages auront un compteur numérique, et d’ici juillet 2029, ce sera le cas pour 100 % d’entre eux. Il serait alors plus judicieux de passer à la facturation basée sur la consommation réelle au lieu de travailler avec des prévisions.  

Et en Wallonie?  

Qu’en est-il en Wallonie ? Il est déjà possible de passer volontairement d’une facture anticipée à une facture mensuelle. C’est le cas pour les ménages qui possèdent un compteur numérique. Depuis le 1er avril 2022, les principaux fournisseurs d’énergie sont en effet tenus de permettre aux consommateurs disposant d’un compteur numérique de passer d’une facture d’acompte à une facture mensuelle, même si les entreprises ne l’indiquent pas toujours clairement. 

Il n’y a toutefois pas d’obligation de facturation mensuelle de la part des fournisseurs. Le ministre wallon de l’énergie, Philippe Henry, indique à Sud Presse que cette obligation de facturation mensuelle n’est pas envisagée au sud du pays. « Nous ne voulons rien rendre obligatoire. » La tarification mensuelle existe (Engie la propose, Luminus devrait suivre en 2024) mais elle n’est pas imposée.  

Cette différence de traitement entre le nord et le sud peut s’expliquer par une inégalité dans le déploiement des compteurs communicants, nécessaire au bon fonctionnement de la tarification mensuelle, explique le site d’actualité. Là où la Flandre se distingue positivement, la Wallonie est, elle, à la traîne. On en compte un peu plus de 260.000 sur les un peu moins de 2 millions de « points d’accès » wallons (codes EAN).  

Le nombre de Wallons qui passent au numérique est donc assez restreint pour l’instant, mais ces compteurs intelligents vont être déployés à grande échelle. Dès cette année et jusqu’en 2030, les compteurs communicants feront progressivement leur entrée dans les foyers, ce qui permettra aux consommateurs d’opter plus facilement pour la facturation mensuelle en fonction de leurs besoins.  

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