Et si Trump coupait le robinet du gaz ? L’Europe sous pression énergétique

Le gaz naturel, autrefois simple ressource énergétique, est devenu un puissant levier géopolitique dans la guerre commerciale entre les États-Unis et l’Union européenne. Donald Trump utilise cette ressource pour influencer Bruxelles. Il propose à l’UE d’acheter 350 milliards de dollars de gaz américain pour réduire son déficit commercial.
L’Europe, premier consommateur mondial de gaz, a longtemps dépendu de la Russie pour la moitié de ses approvisionnements. Depuis 2022 et le début de la guerre en Ukraine, elle a diversifié ses sources, notamment en augmentant ses importations de gaz naturel liquéfié (GNL) des États-Unis.
Aujourd’hui, 16,5 % du gaz européen provient des États-Unis, contre 18 % de la Russie à la fin 2024. Cette double dépendance inquiète les analystes, qui craignent un effondrement de l’approvisionnement en cas de rupture avec l’un des deux fournisseurs. “L’Europe est devenue structurellement dépendante de deux fournisseurs extérieurs,” alerte Jilles van den Beukel, analyste énergétique au The Hague Centre for Strategic Studies (HCSS) dans De Standaard.
« L’Europe est devenue extrêmement dépendante de la Russie et des États-Unis pour son gaz. Le plus grand consommateur mondial couvre à peine 10 % de sa consommation par sa propre production. Le reste doit être importé : 45 % par gazoduc, 45 % sous forme liquéfiée, dont la moitié vient des États-Unis. Ce sont les deux piliers de notre approvisionnement. Si l’un s’effondre, l’Europe a un très gros problème”, analyste l’expert.
« Freedom gas »
Trump n’en est pas à son premier coup d’essai en matière de diplomatie du gaz, rappelle le quotidien flamand. Lors de son premier mandat, il s’était opposé au gazoduc Nord Stream 2. Il avait poussé à l’époque l’Allemagne à acheter du GNL américain, qu’il qualifiait de “freedom gas”. Son objectif reste d’imposer les exportations américaines comme outil d’influence stratégique, une tactique qui a déjà porté ses fruits en Asie. “Plusieurs pays asiatiques ont déjà cédé à la pression en s’engageant à acheter davantage de GNL américain,” note Thijs Van de Graaf, professeur de politique internationale à l’Université de Gand cité par De Standaard.
L’hypothèse d’un embargo ciblé est peu réaliste. Mais, Trump pourrait restreindre l’offre de gaz en bloquant des permis pour de nouvelles installations. L’incertitude plane également sur le retour potentiel du gaz russe, un accord de paix en Ukraine pourrait en effet éactiver les flux de gaz depuis Moscou, au détriment des Etats-Unis. “Ce qui serait catastrophique pour les producteurs américains,” note Van den Beukel.
Accélérer la transition energétique
Face à ces pressions, l’UE vise une sortie complète du gaz russe d’ici 2027. Cependant, cette démarche pourrait paradoxalement renforcer l’influence de Trump. La seule solution durable dans ce contexte est que l’Europe accélère sa transition énergétique afin de ne plus dépendre des puissances extérieures, qu’elles soient russes ou américaines. “Accélérer la transition énergétique pour ne plus dépendre de puissances extérieures, qu’elles soient russes ou américaines,” conclut le politologue de l’UGent.
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