La trêve aura été de courte durée dans le dossier de l’azote

Le Conseil d’Etat pointe du doigt les diverses inégalités de traitement envisagées entre entreprises industrielles ou agricoles.

Votée dans la hantise des élections à venir, la troisième mouture du décret sur l’approche programmatique de l’azote se trouve une nouvelle fois remise en cause, tant par le monde agricole que par les défenseurs de l’environnement.

Le Conseil d’Etat n’avait pourtant pas ménagé ses critiques mais le gouvernement flamand est passé outre, et a-t-il de la sorte déposé une bombe à retardement dans le panier du gouvernement actuellement en cours de constitution ? C’est à craindre. Mettant sa menace à exécution, le Boerenbond vient d’introduire ce 20 août trois recours en annulation auprès de la Cour constitutionnelle.

Dans la foulée, l’Algemeen Boerensyndicaat (AB) a, lui aussi, engagé une procédure similaire. Côté écologiste, trois associations, Dryade, groupement bruxellois qui “utilise la force du droit pour protéger l’environnement”, le Bond Beter Leefmilieu (BBL) – pendant néerlandophone d’Inter Environnement – et Greenpeace demandent à cette même Cour l’annulation des dispositions relatives à l’octroi de permis d’environnement. C’est là en effet que le bât blesse.

Si personne ne conteste la nécessité de réduire de manière structurelle et systématique les dépôts d’azote dans les zones bénéficiant d’une protection spéciale, il reste toutefois la manière. Dans un avis solidement charpenté, le Conseil d’Etat s’était longuement interrogé sur l’intelligibilité du dispositif prévu et, plus encore, la transparence de sa pièce maîtresse, le score d’impact. Basé sur la valeur critique de dépôt (KDW), ce dernier exprime en kilo par hectare et par an le seuil au-delà duquel un habitat peut être altéré de manière significative par un dépôt d’azote. Considérées comme trop empiriques, ces valeurs sont contestées, tout comme les modèles de calcul utilisés par l’administration flamande.

Si personne ne conteste la nécessité de réduire les dépôts d’azote, il reste toutefois la manière.

Et après 2030 ?

Le Conseil d’Etat avait également estimé que le régime proposé introduisait diverses inégalités de traitement parmi lesquelles l’introduction de seuils différents entre entreprises, selon qu’elles sont industrielles ou agricoles. Lors d’une demande de permis, aucune évaluation des incidences des dépôts atmosphériques n’est en effet requise si le score d’impact est égal ou inférieur à 1%, sauf pour les exploitations d’élevage où il est ramené à 0,025%. Enfin, le texte ne prévoit rien au-delà de 2030, ce qui, personne n’aimant se lancer dans l’inconnu, freine en pratique tout investissement lourd.

Puisse le chemin de croix de ce dossier, initié de manière anodine avec l’interdiction par un tribunal d’un poulailler campinois susceptible d’émettre trop d’azote, rendre attentif au prochain dossier qui, déjà, se pointe. A Geel, un magistrat vient en effet d’annuler le permis d’exploitation d’Ineos Aromatics au motif que cette entreprise spécialisée dans la production de composants pour la fabrication de fibres, de films et d’emballages rejette trop de cobalt dans la Grande Nèthe. Le moteur risque une nouvelle fois, si l’on n’y prend garde, de s’emballer et cela d’autant plus vite que la Flandre ne compte qu’un seul cours d’eau en bon état sur 195 !

Guillaume Capron

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