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De l’usage des oxymorons en politique

Le budget est enfin bouclé! Ce qui m’a frappé, c’est la politique de communication du gouvernement, une politique de communication extrêmement bien rodée.

Tous les ministres, sans exception, ont refusé comme un seul homme de parler d’austérité mais tous parlent de rigueur. C’est bien joué! En principe le mot rigueur est censé faire moins peur aux citoyens qu’austérité qui a une connotation très négative.

En France, mon autre pays d’adoption, les hommes politiques jouent au même jeu sémantique. Le président François Hollande tout comme son prédécesseur Nicolas Sarkozy refusent et refusaient de parler de récession, un mot trop rugueux aux oreilles de leurs concitoyens. Les deux présidents – l’ancien et le nouveau – préfèrent donc le terme de…croissance négative !

Les puristes vous diront qu’une croissance négative, c’est ce qu’on appelle un oxymoron, un mot savant pour désigner le rapprochement de deux mots dont le sens est contradictoire. L’expression “croissance négative”, c’est un oxymoron, puisque par définition, une croissance ne peut pas être négative. En revanche, cela sonne bien aux oreilles de citoyens.

En réalité, en période de crise, ce qui reste, quand les marges des gouvernements ont fondu, c’est jouer sur les mots, donc faire de la communication. En Belgique, on vous parlera de rigueur et pas d’austérité et vous expliquera même que le pouvoir d’achat des Belges a été sauvegardé. En réalité, le gouvernement a piqué cette idée de communication – et sans doute qu’ils ne le savent même pas – aux altermondialistes et aux objecteurs de croissance. Quand ces derniers parlent de sobriété heureuse, d’abondance frugale, de décroissance sereine, ce sont autant d’oxymorons. Et on peut comprendre que cela surprenne un peu, cela en est même l’objectif. C’est une manière fine de rendre désirable une forme de décroissance qui aux yeux des Belges est souvent synonyme de sacrifice douloureux. La décroissance, personne n’en veut, mais si elle est sereine, c’est autre chose. Donc, aujourd’hui, qu’on soit de gauche ou de droite, les mots ont valeur de somnifère.

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