La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu ses taux d’intérêt inchangés jeudi, marquant une première pause après une longue série de baisses et soulignant “l’environnement exceptionnellement incertain” créé par les tensions commerciales avec les Etats-Unis.
La Banque centrale européenne (BCE) a confirmé jeudi le maintien de ses taux d’intérêt, comme prévu, marquant ainsi une pause après un long cycle de baisses. Cette décision permet à l’institution de mieux évaluer l’impact d’évolutions imminentes dans le bras de fer commercial entre Washington et l’Europe.
Ce statu quo met fin à huit reductions de taux entreprises depuis un an, suite à une stratégie visant à alléger progressivement le coût du crédit face au recul de l’inflation, dans le sillage de la pandémie et de la guerre en Ukraine. La hausse des prix à la consommation s’est désormais stabilisée autour de l’objectif de 2 %, après avoir culminé à des niveaux records.
Cependant, ces conditions plus favorables restent fragiles, notamment face à la menace de Donald Trump d’introduire de nouvelles surtaxes douanières sur les exportations européennes. L’incertitude étant grande, les responsables de la BCE souhaitent « plus de clarté… avant d’envisager tout nouvel ajustement de la politique monétaire », selon les analystes d’UniCredit.
Les effets possibles d’une hausse des droits de douane sur l’économie de la zone euro seront au cœur de la conférence de presse de Christine Lagarde à Francfort.
Cartouches en réserve
Après plusieurs semaines de négociations mouvementées, un accord commercial entre l’UE et les États‑Unis semblait se dessiner jeudi. D’après plusieurs sources européennes, il prévoierait une surtaxe de 15 % sur certaines exportations européennes vers les États‑Unis, avec des exemptions dans les secteurs de l’aéronautique, des spiritueux et de certains médicaments. Cette décision répond à l’annonce surprise de Trump le 12 juillet, prévoyant des droits de 30 % dès le 1er août pour toutes les importations en provenance de l’UE. L’imposition de nouvelles barrières commerciales pourrait nuire à l’économie de la zone euro et pousser la BCE à envisager de nouvelles baisses de taux à la rentrée.
Une reprise économique sous observation
Dirk Schumacher, économiste en chef de la banque publique allemande KfW, estime qu’« ni les données économiques, ni les dernières données sur la dynamique des prix n’exigent une réaction immédiate ». En juin, l’inflation était exactement à 2 % dans la zone euro. De plus, l’indice PMI Flash de S&P Global révèle que le secteur privé y connaît en juillet sa plus forte croissance depuis août 2024 – une expansion qui s’étend désormais sur sept mois consécutifs. Par ailleurs, Joachim Nagel, directeur de la Bundesbank, a soutenu le statu quo pour laisser le temps d’une « réévaluation » avant la réunion de septembre.
Euro fort et ajustements à venir
Outre la menace commerciale, le renforcement de l’euro face au dollar pourrait inciter la BCE à reprendre l’assouplissement monétaire après l’été. Depuis avril, la monnaie unique a grimpé de 1,08 à 1,18 dollar, ce qui pèse sur la compétitivité des exportations européennes tout en réduisant le coût des importations – notamment énergétiques – favorisant une désinflation. La BCE anticipe une inflation à 1,6 % en 2026, avant un retour vers l’objectif en 2027. Felix Schmidt, analyste chez Berenberg, note que « les mesures prises par la Maison Blanche pourraient à tout moment entraîner une nouvelle dépréciation du dollar, favorisant l’appréciation de l’euro ». En juin, le vice‑président de la BCE, Luis de Guindos, a reconnu qu’un euro au‑dessus de 1,20 dollar constituerait un facteur « compliqué » pour l’institution.