” C’est la crise de 2008 qui m’a le plus marqué “

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Après 36 ans à scruter les marchés, le ” Monsieur Bonds ” de Degroof Petercam, aujourd’hui en quasi-préretraite, souligne la gravité de la crise économique actuelle, mais aussi celle de 2008.

1. Sur ces 36 années à patrouiller dans les marchés obligataires, quel a été l’événement le plus important ?

Même si je trouve la situation économique actuelle plus grave que celle qui prévalait alors, je pense que la crise de 2008 a été, avec l’avènement de l’euro en 1999, l’événement qui m’a le plus marqué. Car nous avons tout eu en même temps : crise économique, crise financière, crise souveraine (celle des obligations d’Etat), crise bancaire… Et nous avons assisté alors à un assèchement terrible du marché secondaire. Avec la crise bancaire et les nouvelles réglementations qui sont apparues (réduisant notamment les ” tradings ” pour comptes propres, Ndlr), les traders dans les salles de marché ont vu se réduire de manière très importante leur carnet d’ordres. On a dit aux traders de prendre moins de place. Et à cela se sont ajoutées ensuite les opérations de quantitative easing, les rachats d’obligations par les banques centrales pour des dizaines de milliards par mois. Cela a eu pour effet de réduire énormément les primes de risque sur le marché secondaire. Parce que lorsque des investisseurs veulent des obligations mais qu’il y en a peu, les cours montent et donc les rendements diminuent.

2. La crise de 2008, c’est aussi le début des taux zéro, voire négatifs, qui perdurent depuis près de 10 ans.

Il y a quelques obligations d’entreprises à taux négatif (Nestlé), mais les taux négatifs touchent surtout les obligations d’Etat. Et ce n’est pas près de s’arrêter puisque les opérations de rachats d’actifs se poursuivent en raison de la crise actuelle. Le bund allemand sur 10 ans est à -0,50%, l’OLO belge à -0,15%, ce qui est le même niveau que la France. Mais il y a toujours des investisseurs pour acheter des rendements négatifs, et notamment la dette belge puisqu’un investisseur préférera acheter une obligation à -0,15 qu’à -0,50% ! C’est clair, des taux négatifs, ce n’est pas normal. Or, nous allons les connaître encore pendant un moment, car les banquiers centraux n’arrivent pas à juguler les pressions déflationnistes et à atteindre leur objectif d’inflation de 2%.

3. Les taux bas actuels mettent en difficultés certains investisseurs ?

Bien sûr. Pour chercher du rendement, ils vont vers des obligations plus risquées et rallongent leurs échéanciers. L’Autriche a émis un emprunt à 100 ans assorti d’un taux de 0,85% qui a connu un succès spectaculaire. Mais il y a une limite à ce que les investisseurs peuvent faire. Pour les assurances groupe qui doivent offrir un rendement minimum garanti de 1,75%, c’est intenable.

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