La fibre, un réseau de câbles noirs qui “défigurent” le paysage urbain bruxellois

câble télécom
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Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste

Le déploiement de la fibre dans la capitale ne se passe pas sans accroc. Couleur inadaptée, réseau trop abondant… L’ensemble des nouveaux câbles qui courent le long des façades bruxelloises sont loin de plaire à tout le monde. Même Ans Persoons, la secrétaire d’État à l’Urbanisme, le dit: les opérateurs télécoms se heurtent à quelques soucis urbanistiques.

Installer la fibre à Bruxelles, c’est encourager la prolifération de nouveaux câbles et boîtiers télécom sur les façades (parfois classées) bruxelloises. La capitale, défigurée? Voilà un sujet qui fâche, et qui suscite les critiques. L’arrivée du nouvel opérateur, Digi Communications Belgium, n’arrange rien à l’affaire… Face à cette colère, les autorités bruxelloises ont été forcées d’intervenir. La secrétaire d’État à l’urbanisme a ainsi mené son enquête et confirme: les opérateurs pourraient être dans une situation d’infraction.

Parfois 8 à 10 câbles sur une façade

Proximus, Orange, Telenet et maintenant Digi… Les opérateurs télécoms y vont chacun de leur fil. Sans compter tous les câbles existants, d’électricité, de télévision, d’anciens opérateurs aujourd’hui disparus, ou de technologies désormais dépassées… Bref, il peut y avoir 7, 8, voire 10 câbles et plusieurs boîtiers sur une seule maison. Même celles inscrites dans l’Inventaire du Patrimoine architectural ne sont pas épargnées. Or, quand cela touche des façades historiques classées, c’est là que le bat blesse.

Ces installations sont-elles toutes nécessaires? Une question à laquelle il est difficile de répondre, car les propriétaires n’ont pas d’inventaire à portée de main. Et dans le cas présent, qui serait responsable pour l’enlèvement de ces câbles devenus inutiles? Tout cela représente un coût que les opérateurs n’ont peut-être pas envie d’assumer…

Besoin d’un permis d’urbanisme?

À Bruxelles, la règle est la suivante: tous les travaux qui modifient l’aspect d’une façade visible depuis l’espace public doivent obligatoirement faire l’objet d’une demande de permis d’urbanisme. Mais comme pour tout, des exceptions ont été instaurées dans une ordonnance de 2008 afin de faciliter certains travaux. Les installations des opérateurs télécoms en font partie : la loi prévoit que tout opérateur est autorisé « à faire usage du domaine public et des propriétés pour établir des câbles, lignes aériennes et équipements connexes et exécuter tous les travaux y afférents. » Nul besoin donc de permis d’urbanisme, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas quelques règles à respecter.

Mauvais choix de couleur

Une circulaire éditée le 6 juin dernier par Ans Persoons apporte quelques précisions aux diverses communes bruxelloises. Ainsi, « la couleur du câble doit être similaire à la façade et son tracé doit suivre les lignes architecturales de l’immeuble telles que le seuil de la fenêtre, la corniche, les jointages entre façades, la rive de toiture », peut-on lire. « Les câbles, conduites et boites de raccordements visés sont ceux liés à l’ensemble des réseaux de communications électroniques ou numériques, quels qu’ils soient, y compris la fibre optique. »

Les installations ne peuvent pas non plus dépasser la façade de plus de 25 centimètres et leur volume ne doit pas être supérieur à 8 décimètres cubes (un cube de 20 cm d’arête).

Autrement dit, tous les câbles qui pendent sans suivre les traits de façades et toutes les installations qui ne sont pas aux couleurs du bâtiment sont en infraction urbanistique. Or, la grosse majorité des câbles et boîtiers installés à ce jour sont… noirs! En théorie, les opérateurs télécoms sont en infraction et devraient donc retirer ou repeindre l’ensemble des installations. En théorie…

Dans la pratique, les opérateurs se défendent. Pourquoi peindre un fil d’une autre couleur quand tous les autres sont noirs? « La manière dont on met les fils est qu’on suit un chemin de câbles noirs le long des maisons, donc ça ne se voit pas énormément. Et le boîtier est discret”, affirme le porte-parole de Proximus, interrogé par La Libre. Se retrouver avec une ligne blanche ou ocre dans un océan de câbles noirs n’a pas beaucoup de sens, estime-t-on. Ne faudrait-il pas, dès lors, s’attaquer à l’ensemble des câbles, anciens et nouveaux, et non seulement à la fibre? Et réinstaurer un permis d’urbanisme pour éviter ce genre de questions à l’avenir? La question se pose, mais ce n’est pas sans risque pour le déploiement futur de nouvelles installations télécoms…

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