Une vibe nineties originale
Quand l’architecte Alex Holloway a acheté son appartement à Londres il y a plus de deux ans, il a décidé d’appliquer tout ce que ses clients ont trouvé «trop spécial» ou «trop coloré». Le résultat: une cuisine inspirée du bar à pita, des meubles orange vif et une baignoire en plein dans le séjour. «Vous ne trouvez pas que ça marche?»
«Je ne sais pas trop pourquoi, mais nous, les Britanniques, aimons tout ce qui est ancien. Même dans l’immobilier: tout le monde cherche à acheter de vieilles maisons. C’est la raison pour laquelle j’avais décidé de ne pas faire pareil. Mais rien ne se passe jamais comme on l’avait imaginé et avant même d’y réfléchir, nous avions acquis les étages supérieurs d’une maison de maître victorienne.» Peu de temps après, en 2020, le premier confinement a été déclaré au Royaume-Uni, ce qui a laissé à l’architecte Alex Holloway le temps de rénover son nouveau logement. Cinq ans plus tôt, Alex Holloway avait fondé avec l’architecte Na Li le bureau Holloway-Li. Ce bureau d’architectes concentre ses activités sur le marché des projets: bars, restaurants, hôtels… Holloway-Li a conçu des propriétés pour le Soho Group et a collaboré à la rénovation de la gare de Battersea.
Quand nous organisons des fêtes, la baignoire sert de seau à glace géant
Réaction rapide
Au moment de dessiner ses plans, Alex Holloway a puisé ses idées dans son expérience d’architecte de bars et d’hôtels. «Au début, j’ai imaginé une baignoire dans la chambre, comme dans les chambres d’hôtel», explique Alex Holloway. Mais une fois toute la plomberie refaite, Alex Holloway prend soudain conscience que c’est dans cette chambre que la lumière est la plus belle. «Il faut être capable de réagir vite dans ces cas-là. J’ai démoli presque tous les murs intérieurs et j’ai installé le séjour et le bureau là où j’avais initialement prévu la chambre à coucher.» Et c’est la raison pour laquelle une baignoire sépare désormais le canapé et le bureau. «On n’imagine pas le plaisir de regarder la télé depuis sa baignoire», s’amuse Alex Holloway, «et quand nous organisons des fêtes, la baignoire sert de seau à glace géant.»
Big Brother
Pour le choix des meubles, tout le mérite revient à la compagne d’Alex Holloway, Elle Parmar Jenkins, qui a fondé une plateforme vintage en ligne en 2019: Goods In. «Comme elle achète et revend en continu, notre mobilier se renouvelle souvent», explique Alex Holloway. Ce qui ne change pas, c’est le siège lounge orange vif du salon. Celui-ci a été conçu par Holloway-Li en collaboration avec le fabricant de meubles Uma Objects et présenté au London Design Festival de l’année dernière. Le siège T4 est très futuriste, tout comme la cuisine, d’ailleurs, en inox brossé. «Je suis un enfant des années nonante. À l’époque, les intérieurs étaient assez futuristes. J’ai l’impression que cette tendance revient», nous dit Alex Holloway. «L’inox me rappelle aussi des magasins de bonbons et les bars à pita que je fréquentais dans les années nonante. Pour la cuisine, je me suis aussi inspiré de la toute première maison de l’émission Big Brother. Aujourd’hui, tout cela semble tellement évident, mais Big Brother était vraiment révolutionnaire, tout le pays était collé au petit écran.»
Told you so
«Il y avait aussi un côté thérapeutique à concevoir un projet pour moi», explique Alex Holloway. «Une frustration que de nombreux architectes partagent, c’est que les clients refusent souvent de prendre des risques, ils choisissent les plus grands dénominateurs communs, des matériaux et des couleurs qu’ils ont vus chez leurs amis, par exemple. Quand arrive le moment de la réception, les idées sont souvent très diluées. Pour une fois, je n’avais pas envie que cela arrive. Par exemple, j’avais proposé ces plinthes en pierre pour un projet. Je les adore, mais le client n’a pas aimé l’idée. Les voir ici tous les jours, c’est un plaisir renouvelé. Une véritable sensation de ‘I told you so’.» Et Alex Holloway a aussi utilisé d’autres idées qui ont été rejetées par ses clients. Du plâtre brut sur les murs, par exemple. «Il n’y a rien de plus pratique. Cela me permet de facilement installer de nouveaux tuyaux ou de boucher un trou dans le mur. Grâce au côté brut du plâtrage, on ne soupçonne même pas les modifications apportées.»
Showroom
«Je suis heureux que nous puissions utiliser cette maison comme une sorte de showroom», déclare Alex Holloway. «La prochaine fois que je proposerai des plinthes en pierre, j’inviterai le client ici (rires).» Sa compagne Elle utilise également l’appartement pour mettre en valeur le potentiel de ses objets vintage. «Mais ce que ce lieu illustre avant tout, c’est à quel point il est essentiel d’oser suivre son intuition, de faire ce qui nous rend heureux et de ne pas se résigner à une sorte d’intérieur modèle.»
London interiors
L’intérieur singulier de l’architecte Alex Holloway figure dans le tout nouveau livre «London Interiors» d’Emma J. Page, une journaliste lifestyle et architecture d’intérieur qui réside également à Londres. «Ce livre pose une question très importante: ‘Qu’est-ce qui caractérise l’intérieur londonien? ’ Ce livre m’a fait prendre conscience que les intérieurs étaient le reflet de la vie dans une ville. Londres est une ville très éclectique, où cohabitent de nombreuses cultures. Et les Londoniens n’ont pas peur d’expérimenter, ils ont une soif d’aventure. J’ai veillé à ce que le livre ne présente pas uniquement des maisons de maître traditionnelles, mais aussi des habitants à contre-courant qui font radicalement ce dont ils ont envie, comme Alex.»
London Interiors de Emma J. Page (256 pages, 49,99 €, en anglais) a été publié à Lannoo www.lannoo.beVous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici