L’accessoire incontournable cet automne est le harnais. Cette ceinture élargie en cuir raffiné et délicat rendra toute tenue somptueuse. Eva Longoria, Gwen Stefani et Shakira le connaissaient déjà, et depuis que Kylie Jenner a fait sa déclaration d’amour sur Instagram, les fashionistas connaissent désormais le nom de la créatrice de ces harnais: Yvonne Reichmuth, fondatrice et Creative Director de la marque suisse YVY.
Jusqu’à ce que je rencontre la créatrice Yvonne Reichmuth et son assistante Luisa au pied de la tour Eiffel, je n’aurais jamais imaginé qu’un harnais en cuir pouvait transformer une tenue de manière aussi élégante. La première chose qui me vient à l’esprit quand je pense aux harnais en cuir, ce sont les pratiques SM ou… oui, l’équitation. Mais voir Yvonne, dans sa combinaison en lin, dont le haut est ficelé d’un “gilet” en cuir et Luisa, dans sa longue robe blanche, avec un accessoire en cuir marron similaire… Les déesses romaines en tomberaient en pâmoison. Et c’est ce que font les déesses contemporaines comme Billie Eilish ou Monica Bellucci, vues portant un accessoire YVY, la marque fondée par Yvonne Reichmuth en 2014.
C’est la ceinture à franges que Kylie Jenner a publiée sur Instagram en 2015 qui a lancé la marque YVY
Vous avez commencé votre carrière en tant que créatrice de mode pour femmes, mais comment est née votre passion pour le cuir?
“Le cuir m’a toujours fascinée. Au début de mon parcours, quand je travaillais tant le tissu que le cuir, j’ai constaté que mon coeur s’emballait quand je touchais du cuir. À un moment donné, j’ai voulu choisir une spécialité. Le cuir est une matière durable. Les gens investissent dans une belle pièce en cuir et la gardent longtemps. On peut donc réellement créer un modèle qui tiendra plusieurs saisons, voire plusieurs années.”
Il existe aujourd’hui de nombreuses alternatives véganes au cuir. Faites-vous des essais dans ce domaine?
“Nous suivons de près toutes sortes d’évolutions et nous faisons également des essais en utilisant des matières alternatives. Mais je dois avouer que jusqu’à présent, aucune de ces matières n’a réussi à nous séduire. Elles ne répondent pas encore à nos exigences quant au toucher, à l’odeur, à la malléabilité, à la longévité, à la durabilité, etc. Jusqu’à présent, le cuir traditionnel reste ma matière préférée et, tant qu’il est disponible, nous nous en tiendrons à cette matière. Mais entre-temps, bien sûr, nous restons informés des dernières évolutions. Nous accordons beaucoup d’attention à la façon dont le cuir est tanné. Près de 90% de nos créations sont en cuir à tannage végétal de Toscane, qui est fabriqué sans chrome ni produits chimiques.”
C’est la ceinture à franges que Kylie Jenner a publiée sur Instagram en 2015 qui a lancé la marque YVY, mais comment réussissez-vous à atteindre des stars comme Monica Bellucci?
“Cela se fait de différentes manières. J’ai rencontré Monica Bellucci par l’intermédiaire des photographes qui ont réalisé un édito à propos de moi pour Marie Claire à New York. Un peu plus tard, ils m’ont écrit qu’ils avaient besoin, pour une séance photo avec Monica, de quelques pièces pour donner à son look une touche plus audacieuse et sexy. J’étais ravie de la voir porter ma création, car elle est pour moi l’une des plus belles femmes du monde. Elle a une aura singulière, si sensuelle. Mais le contact se lie aussi souvent par l’intermédiaire de notre agente Bea Akerlund de The Residency Experience à Los Angeles. De nombreux stylistes de célébrités y vont pour choisir des pièces pour leurs clients.”
Pourquoi pensez-vous qu’autant de célébrités adorent YVY?
“Le fait que les pièces YVY transforment instantanément n’importe quelle tenue — sobre ou non — en une tenue unique, une pièce maîtresse. Comme si c’était un accessoire qui ne se contente pas d’être un élément accessoire à votre style, mais transforme vraiment votre style en tout autre chose.”
YVY coopère également avec d’autres marques. Quel est le projet le plus cool que vous ayez réalisé ces dernières années?
“Incontestablement, la montre Longines DolceVita x YVY. Lorsque la marque m’a contactée il y a environ un an et demi, c’était pour moi un rêve qui se réalisait. Par cette collaboration, nous avons voulu rendre hommage au lien très fort qui unit Longines au monde équestre. Nous voulions traduire ce lien dans le produit: tant dans sa conception que dans sa finition. Il me semblait aussi très important d’en faire une montre unisexe, pour qu’elle puisse être portée par tout le monde. Mon approche était très ludique, c’est pourquoi cette montre est modulable, avec deux bracelets de montre que l’on peut également porter comme simples bracelets et, last but not least, nous devions respecter l’ADN de Longines en articulant tout le processus autour de l’élégance. Le résultat est une montre qui se porte de manière très classique, avec un bracelet normal, mais que l’on peut aussi transformer en accessoire tendance en y ajoutant l’élément harnais.”
Quelles autres collaborations figurent sur la liste d’envies d’YVY?
“Avec YVY, j’ai encore toute une série de projets intéressants en cours. Par exemple: deux jours par semaine, je travaille au sein de l’équipe de création de Piëch, un fabricant suisse de voitures électriques. Piëch a été fondée en 2017 par Anton Piëch (fils de l’ancien PDG du groupe Volkswagen Ferdinand Piëch et arrière-petit-fils de Ferdinand Porsche) et Rea Stark Rajcic. C’est très intéressant de découvrir ce secteur d’activité. J’aime les deux mondes. Je ne me suis jamais considérée comme une créatrice de mode, mais plutôt comme une créatrice en général. Je pense que dans notre monde, chaque chose peut être vue comme “belle” d’une certaine manière. Donnez-moi n’importe quel objet, je serai intéressée de le reconceptualiser. Je pense que l’industrie automobile, tout comme l’industrie horlogère, est intéressante parce que l’on peut travailler sur un projet pendant longtemps et l’utiliser pendant longtemps. Ce n’est pas éphémère comme dans l’industrie de la mode. Je me sens donc attirée par ce type d’industries.”
Les designers du monde de l’automobile sont toujours soumis à de nombreuses restrictions, car il faut tenir compte de la réglementation. Ne limitent-elles pas votre créativité?
“Selon moi, les contraintes peuvent décupler la créativité. Par exemple, quand j’ai décidé de ne pas être créatrice de collections entières de prêt-à-porter pour femmes, mais de me concentrer sur une seule matière, cette contrainte m’a semblé très porteuse, car je n’avais que le cuir noir à tannage végétal pour créer. Voilà huit ans que je travaille exclusivement avec cette matière, ce qui intensifie encore le défi: que puis-je en faire pour créer de la nouveauté? Je pense donc que les contraintes, qu’il s’agisse de créer un objet à porter au poignet ou une voiture qui doit passer tous les tests de l’industrie automobile, obligent à penser différemment et à trouver de nouvelles façons de créer quelque chose d’intéressant.”
Vous voulez donc tout recouvrir de cuir noir?
“(rires) Absolument! Sans aucune hésitation.”
