Dans quelques années, rares sont ceux qui auront encore de l’argent liquide sur eux. Si l’on en croit Keith Jordan, vice-président de l’innovation chez Mastercard, même les cartes de paiement seront bientôt des pièces de musée. La technologie et l’intelligence artificielle sont en train de changer : « Le paiement par empreinte digitale ou au moyen de lunettes intelligentes sera bientôt la norme. » Henri Dewaerheijd, Country manager Belgium & Luxembourg, est quant à lui convaincu de la facilité et de la sécurité de ce mode de paiement : « Commander ses courses et les payer avec sa voix ? Cela fera partie de notre quotidien ». Zoom avant vers un avenir (très) proche.
La vitesse à laquelle la numérisation et l’intelligence artificielle générative remodèlent notre monde et notre économie est impressionnante. C’est même un euphémisme. Le nombre d’heures que nous passons sur les réseaux sociaux ou à jouer par écran interposé augmente à vue d’œil. La frontière entre les mondes physique et numérique s’estompe chaque jour un peu plus.
Alors qu’aujourd’hui, nos yeux sont rivés aux petits et grands écrans, Keith Jordan, vice-président de l’innovation chez Mastercard, voit déjà nos smartphones prendre la poussière dans un musée. « La réalité augmentée et les lunettes intelligentes fusionneront les mondes physique et numérique. Ce monde numérique ne sera pas un copier-coller du monde physique, mais une nouvelle réalité dans laquelle je pourrai vivre des expériences que je n’aurais jamais pu imaginer auparavant. En fonction de notre localisation et de nos préférences personnelles, les marques interagiront avec nous. Par exemple, si je veux une nouvelle voiture, je peux me faire accompagner par mon avatar bancaire commandé par une intelligence artificielle qui peut me donner des conseils instantanés parce qu’il connaît mes antécédents familiaux, financiers et d’assurance. Ou pensons à un événement en direct. Ainsi, lorsque votre groupe préféré se produira, il sera parfaitement possible de vivre des expériences numériques supplémentaires sur place : une visite des coulisses, des interviews exclusives avec les stars du rock… le prix de ces expériences uniques sera payé instantanément en scannant votre carte Mastercard au moyen de vos lunettes intelligentes. »
Une nouvelle expérience de shopping
Des études ont révélé que ce type de lunettes intelligentes pourrait remplacer les smartphones d’ici 2032. Une estimation plutôt prudente, estime Keith Jordan : « L’iPhone a changé le monde en 10 ans à peine. Les lunettes intelligentes pourraient le faire en cinq ans. Et quand on sait qu’Apple lancera la Vision Pro au début de l’année prochaine… Pour l’instant, ce produit est encore un peu lourd, mais plus pour longtemps.
Les nombreuses innovations déjà en cours ouvrent la voie à des expériences d’achat ultra personnalisées. Dans un futur proche, toute personne entrant dans un magasin recevra aussitôt une offre personnalisée en fonction de ses goûts, de son poids, de sa couleur, de sa taille, de sa largeur… Le secteur de la vente au détail sera un fabuleux mélange d’expériences physiques et numériques. D’ores et déjà, de grandes marques font comprendre qu’elles souhaitent échanger une bonne partie des rayons des magasins contre des espaces d’expérience. Ainsi, vous pourrez essayer un nouveau manteau d’hiver sur les flancs de l’Himalaya. »

Une super expérience pour des millions de supporters
L’agence spatiale américaine NASA fait déjà un usage intensif des lunettes de réalité virtuelle. Pour que ces lunettes fassent leur entrée parmi le grand public, il faut attendre l’application phare, celle pour laquelle tout le monde ou presque se précipitera. « En fait, il s’agit d’une solution à la recherche d’un problème », explique Keith. « Apple prend les devants et achète déjà de nombreux droits mondiaux sur des événements sportifs. La formule 1, le basket, le base-ball, le foot… La marque pourra ainsi offrir des expériences de visionnage et d’expérience extraordinaires via son Apple TV. Des expériences exclusives que vous pourrez acheter instantanément grâce à vos lunettes intelligentes. Le frisson que procure un match sera cent fois plus grand, croyez-moi. Et le plus chouette, c’est que ce public cible de fans, Apple ne doit pas le constituer, il existe déjà. Des millions de supporters sont prêts à payer un supplément pour une super expérience. Quel supporter ne voudrait pas écouter en direct ce que l’entraîneur a à dire aux joueurs à la mi-temps ? Physiquement, bien sûr, il n’y a pas de place pour des milliers de personnes dans le vestiaire, mais numériquement, c’est possible. C’est génial, non ? »
Une révolution culturelle
Selon Keith, la prochaine vague d’innovations technologiques ouvre la voie à une révolution culturelle. « C’est un phénomène de très grande ampleur. Déjà, pour la génération Alpha, le jeu est la forme de divertissement la plus importante. Le sport qui connaît la plus forte croissance dans le monde est l’eSport. Ces jeunes passent déjà une grande partie de leur vie en ligne, se connectant avec leurs pairs du monde entier par le biais des jeux. Pouvez-vous imaginer comment les marques peuvent y accrocher leur charrette commerciale ? »
Sans tracas, mais en toute sécurité
La chaîne de valeur économique devient de plus en plus numérique et internationale, confirme Henri Dewaerheijd, Country Manager Belgium & Luxembourg : « Non seulement les frontières entre les mondes physique et numérique s’estompent, mais celles entre les pays et les continents jouent également un rôle de moins en moins important dans le nombre de transactions commerciales en hausse exponentielle. »
« Mastercard y a un rôle crucial à jouer », souligne Henri, « car nous voulons bien sûr que ces centaines de milliards de paiements sur toutes les nouvelles plateformes possibles se déroulent avec le moins de tracas possible, comme des mots de passe ou des codes – “sans friction” dans le jargon –, mais qu’ils soient aussi sûrs que possible. Les banques qui émettent nos cartes de crédit et de débit Mastercard, ainsi que les commerçants qui les acceptent, comptent sur nous à cet égard. Notre travail consiste à faciliter au maximum l’accès à nos cartes et à nos services. »
L’argent liquide reste actuellement le principal concurrent des moyens de paiement numériques en Belgique. Ce n’est que récemment que le nombre de transactions numériques a dépassé le nombre de paiements en espèces. « Si les Pays-Bas et les pays scandinaves font mieux que nous dans ce domaine, notre pays n’en est pas moins l’un des précurseurs au niveau mondial. La France et l’Allemagne sont loin derrière », précise Henri Dewaerheijd. Les méthodes de paiement numérique se présentent sous différentes formes. « La carte à puce avec code PIN a longtemps occupé la première place, mais le paiement sans contact est passé en cinq ans de 7 pour cent à plus de 65 pour cent du nombre de paiements en Belgique. Pendant la pandémie, le sans contact s’est imposé en un rien de temps. Mais les paiements mobiles via Apple Pay ou Google Pay ont aussi rapidement conquis 20 % du marché européen, et la Belgique suit également cette tendance. »

Innover pour rester pertinent
« Mastercard doit innover en permanence pour rester pertinente et fournir les bonnes solutions à une économie en pleine transformation. Très tôt, nous avons remarqué que le smartphone commençait à jouer un rôle important dans la numérisation de l’économie et, aujourd’hui encore, nous décelons de nombreuses tendances, dont certaines ont été expliquées par Keith Jordan. Pour les paiements par smartphone, nous avons développé une technologie importante, que nous pouvons également déployer sur d’autres plateformes numériques. Il s’agit de ce que l’on appelle les tokens, des numéros de cartes numériques sécurisés par cryptage. Mercedes est la première marque automobile à intégrer cette technologie, ce qui permet de faire le plein avec une empreinte digitale ou d’effectuer des paiements en ligne. Cela nous amène tout naturellement à nos applications de service au volant, où vous passez une commande par la voix, par exemple, et allez l’enlever sans friction. Les possibilités du commerce conversationnel sont infinies, pensez aux intégrations avec WhatsApp ou TikTok. Il ne faudra pas attendre longtemps avant de pouvoir interagir en permanence avec des services entièrement personnalisés et des sélections de produits sur mesure. Vous voyez un personnage de votre série télévisée préférée porter un manteau qui vous irait à merveille ? Sans quitter votre fauteuil, vous saurez en un rien de temps où il est vendu et vous pourrez le commander dans votre taille. Grâce à nos tokens, nous veillerons à ce que les paiements puissent être effectués sans trop d’obstacles (sans friction). »
La confiance gagne en valeur
Pouvoir payer facilement sur toutes ces plateformes est une chose. Être sûr de faire affaire avec des fournisseurs fiables en est une autre. Ni le monde physique ni le monde numérique ne sont exempts de fraudeurs. La détection des transactions à haut risque est donc une tâche à ne pas sous-estimer. « Nous devons trouver un juste équilibre entre la facilité d’utilisation et la sécurité. C’est que le commerce électronique est plus exposé à la fraude que les ventes en face à face. Si nous soupçonnons un risque, nous augmentons les frictions : par exemple, nous demandons de nouveau des mots de passe ou des codes.
Être convivial à une époque où la technologie fait des pas de géant avec l’IA générative et où nous sommes de plus en plus confrontés à des deepfakes nécessite un investissement permanent dans des solutions qui permettent aux consommateurs et aux banques de continuer à compter sur des transactions correctes. « La valeur de la confiance dans les méthodes de paiement numérique augmentera massivement. La valeur de Mastercard dépendra également de la confiance que nous pouvons garantir et communiquer », conclut Henri Dewaerheijd.