Carte blanche
“Filigranes ne peut pas mourir”, carte banche de Marc Filipson
Il y a 42 ans, j’ai investi un petit espace de 20 m2 au 27 rue de l’Industrie.
Aujourd’hui, après un déménagement, de nombreuses extensions, une trentaine de livres d’or, quelques milliers d’artistes et d’auteurs en rencontres-dédicaces, de l’emploi pour près de 1000 libraires et employés passionnés, une cinquantaine de magazines Filiber, 20 ans de Foire du livre, 22 ans de soirées caritatives entre novembre et décembre, quelques ouvertures dont Ixelles et Knokke et quelques fermetures, le lancement en Belgique de la Fureur de lire, le Prix Filigranes, 4 maisons d’édition (pas facile d’être éditeur en Belgique), un LISEZ NOM DE DIEU qui a essaimé, des Fiat 500 inoubliables qui traversaient les rues bruxelloises, des concerts, un site WEB créer dans l’urgence lors de la Covid et la volonté de rester ouvert durant cette période en proclamant « le livre d’utilité publique » et en montrant l’exemple au Français avec l’ouverture de nos librairies (eh oui, nous avons réussi à convaincre les autorités), après avoir fait tout ce que nous pouvions pour rendre le livre et la lecture accessibles à tous… Filigranes va mal, très mal même (et moi aussi, on s’en doute, mais ce n’est pas le sujet)
« J’ai entendu que Filigranes pourrait fermer »
Techniquement, c’est vrai. Nous avons entamé une procédure auprès du tribunal de l’entreprise de Bruxelles pour tenter de trouver un ou plusieurs repreneurs pour les activités et le personnel de Filigranes.
Filigranes doit, en effet, se réinventer.
Les fortes augmentations des salaires (+ de 14 %) et des frais généraux (loyers, frais de transport, etc.), combinées à la diminution des marges due à la suppression de la tabelle, nous imposant un prix unique du livre, ont gravement affecté la stabilité de Filigranes, tout comme celle de nombreuses librairies. En effet, en Belgique, nous subissons des indexations automatiques, ce qui n’est pas le cas dans les pays voisins, rendant la situation encore plus difficile.
Et « l’affaire Filipson ? », me direz-vous ? Même si les faits tendent à prouver que je ne suis pas tout à fait le monstre décrit par certains, il est indéniable que le bashing subi depuis 2 ans a contribué à la situation actuelle -même s’il est difficile de quantifier dans quelle mesure.
Comme fondateur et patron, j’ai sûrement été exigeant et parfois pénible pour mes collaborateurs (j’en profite pour tordre le cou à une légende urbaine : il n’y a jamais eu de plaintes pour harcèlement sexuel ). Mais je me suis aussi engagé corps et âme pour défendre une certaine vision de la librairie en Belgique, le plaisir de lire et de partager, la désacralisation de la littérature pour en faire profiter le plus grand nombre.
Avec les équipes passionnées et très compétentes de Filigranes, nous avons non seulement créer l’une des toutes premières librairies indépendantes d’Europe, mais aussi un lieu de destination sans égal à Bruxelles, qui a contribué à animer un quartier déserté le week-end, le rendez-vous de toutes et tous 7 jours par semaine, 365 jours par an pendant près de 4 décennies !
Aujourd’hui, une page se tourne, mais Filigranes ne peut pas mourir.
La librairie a été en partie remise sur les rails par notre CEO, Véronique Croisé, tant sur le plan organisationnel que financier. Cependant, malgré les efforts conjoints des équipes de Filigranes, ces actions n’ont pas suffi à rétablir rapidement un équilibre financier.”
Nous avons 4 mois pour repenser le projet, trouver un ou plusieurs repreneurs, faire fonctionner toutes les imaginations pour sauver un lieu et une marque de qualité unique.
J’ai fait un pas de côté, mais ma passion pour ce métier reste intacte, et je la mettrai au service de toutes les énergies qui auront envie de s’engager dans cette renaissance.
Plus que jamais, Bruxelles a besoin de Filigranes, et Filigranes a besoin de vous.
Marc Filipson, fondateur de Filigranes
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