L’IA fascine, mais ne paie pas encore. Les stars technologiques dévissent en Bourse, sanctionnées par l’écart entre l’enthousiasme et la réalité économique d’une technologie qui peine à s’intégrer dans les entreprises.
Hier, les valeurs technologiques ont piqué du nez. Le Nasdaq, l’indice phare du secteur, a signé sa plus forte baisse depuis le 1er août. Et cette fois, ce n’est ni la guerre en Ukraine, ni une décision de la Fed, ni même le pétrole. Non. C’est l’intelligence artificielle elle-même qui a effrayé les marchés. Plus exactement, le décalage croissant entre la promesse de l’IA… et les résultats concrets sur le terrain.
Le détonateur ? Un rapport très sérieux du MIT, le Massachusetts Institute of Technology. Les chercheurs y expliquent que 95 % des entreprises ayant lancé des projets d’IA générative n’en retirent aucun bénéfice mesurable. 95%! Pas d’économies, pas de nouveaux revenus, pas de gains de productivité clairs. Bref, ça fait joli dans les présentations PowerPoint, mais ça ne change rien aux chiffres du bas de bilan. Et ça, les marchés n’aiment pas.
Résultat immédiat : les stars de l’IA ont dégringolé. Palantir a perdu 9 %, Oracle, AMD, Nvidia étaient dans le rouge. Même le bitcoin – qui n’a pourtant rien à voir avec l’IA mais qui prend souvent la température spéculative des marchés – a lâché 2,7 %.
Alors, doit-on conclure que l’IA est une bulle ? Est‑ce qu’on ne s’est pas emballés pour rien ? Pas tout à fait. Le vrai problème, c’est celui du timing économique.
Depuis deux ans, on nous répète que l’IA générative va tout bouleverser : productivité, créativité, formation, santé, vente, production… Et oui, la promesse est fondée. Techniquement, c’est bluffant. Il suffit d’essayer ChatGPT ou Midjourney pour s’en convaincre : on a changé d’ère.
Mais, entre un outil spectaculaire et une valeur économique mesurable, il y a un gouffre. Intégrer l’IA dans les processus de travail, les logiciels existants, les circuits de décision… ça prend du temps, ça coûte cher, ça oblige à repenser les métiers, à former, parfois même à casser ce qui fonctionne encore. En résumé, cela ne se fait pas en six mois.
Voilà pourquoi l’IA patine aujourd’hui en entreprise. Non pas parce qu’elle est inefficace, mais parce qu’elle n’est pas plug-and-play. Ce n’est pas un aspirateur Dyson. C’est une technologie de rupture, avec tout ce que cela implique de lenteurs, de résistances, de tâtonnements.
Pendant ce temps, la Bourse, elle, n’attend pas. Elle a déjà intégré la promesse de l’IA dans les cours. Elle a gonflé les valorisations de sociétés qui en parlaient le plus fort… sans toujours vérifier ce qu’il y avait derrière. Elle a spéculé sur l’IA comme jadis sur les dotcoms. Et aujourd’hui, c’est le retour de balancier.
« Entre un outil spectaculaire et une valeur économique mesurable, il y a un gouffre. Et ce gouffre, il s’appelle l’intégration. »
Même Sam Altman, le patron d’OpenAI, l’a reconnu cette semaine : “Oui, des investisseurs vont perdre beaucoup d’argent.” Phrase sobre, presque lancée en passant… mais lourde de sens. La technologie avance, mais la rentabilité ne suit pas encore.
C’est la vraie leçon : une IA bien intégrée peut réduire les coûts, faire gagner du temps, automatiser des tâches répétitives. Mais cela exige un travail de fond. Pas seulement un abonnement à ChatGPT.
Voilà pourquoi, pour l’instant, les entreprises qui réussissent vraiment avec l’IA sont rares. Elles avaient déjà une culture numérique forte, une capacité à expérimenter vite, à changer leurs façons de faire. Les autres testent, elles communiquent… mais elles ne transforment pas. Et les marchés, désormais, le voient.
En résumé, ce qui s’est passé hier en Bourse n’est pas un rejet de l’IA. C’est un rappel à l’ordre. Un signal clair : les promesses, c’est bien. Mais à un moment, il faut délivrer.