Est-ce qu’on se rend compte à quel point on est gâtés ?
Notre incroyable prospérité repose sur un équilibre très fragile.
Quelle misère abrutissante ! Le week-end dernier, le Hamas a franchi plusieurs lignes rouges en semant la terreur. Aucune personne raisonnable ne peut considérer cela comme une résistance légitime. Samedi, le Hamas a déclenché une guerre sans merci, une guerre qu’il ne peut pas gagner contre un adversaire plus fort que lui. Israël, furieux et traumatisé, a répondu par un siège de Gaza, afin de briser les terroristes du Hamas une fois pour toutes. 2 millions de Palestiniens, dont la moitié a moins de 18 ans, sont piégés à Gaza. Sans électricité, sans eau, sans nourriture, alors que les bombes explosent tout autour d’eux. Le nombre de morts ne cesse de grimper, le ressentiment encore plus. Une solution pacifique au conflit israélo-palestinien est impossible dans les années à venir. En outre, les semaines qui viennent risquent d’être déterminantes, car nul ne sait si l’Iran va entrer dans la danse et si le conflit dégénère en une guerre majeure au Moyen-Orient.
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Cette guerre constitue également une menace pour nous, même si c’est dans une moindre mesure. Si une guerre majeure venait à perturber l’approvisionnement en pétrole, une nouvelle crise pétrolière pourrait survenir. Un petit pays comme la Belgique serait alors condamné à assister, impuissant, à cette crise. C’est justement là que le bât blesse. Nous rendons-nous compte à quel point nous sommes gâtés ? Nous vivons dans l’un des pays les plus sûrs et les plus riches du monde, entourés de bons voisins. Tous les problèmes que nous rencontrons sont des problèmes de luxe. La guerre en Israël devrait nous réveiller, mais en réalité, nous aurions dû nous secouer depuis l’invasion russe de l’Ukraine il y a un an et demi.
Notre incroyable prospérité repose sur un équilibre très fragile. Les dividendes de la paix obtenus après la chute du mur de Berlin ne sont plus qu’un souvenir. Nous devrions investir encore bien plus de milliards dans une stratégie européenne de défense et de sécurité. La présidence belge imminente de l’UE ne doit pas non plus nous faire oublier le déclin de notre influence jadis relativement importante au sein de l’Union européenne. L’Europe de l’Est, et en particulier la Pologne, ne se contente plus d’un rôle secondaire. Seule une offensive diplomatique peut reconquérir cette perte de pouvoir. Sauf qu’une impasse politique se profile après les élections de 2024. Si la bisbille domine interne, d’autres États membres de l’UE en profiteront.
Et nos défis économiques dépassent encore ces problèmes. Nous ne parvenons pas à résoudre les problèmes structurels de notre économie. Qui plus est, la crise énergétique a affaibli notre compétitivité. Dans le même temps, nous nous sommes heurtés à nos limites. La crise de l’azote et d’autres crises environnementales donnent à la Flandre une leçon brutale. Nous devons verdir notre industrie et notre agriculture à un rythme effréné. Mais nous sommes complètement bloqués. Au sein du gouvernement flamand, la crise de l’azote a été très cyniquement utilisée pour régler des comptes. Entre-temps, une gigantesque incertitude juridique a été créée, ainsi qu’une crise politique qui dont les conséquences vont se faire encore sentir pendant des années. Elle illustre une fois de plus l’absence de prise de conscience de la fragilité de notre prospérité et de notre sécurité.
Pendant des années, les hommes politiques belges se sont comportés comme un bus de clowns qui aurait accidentellement foncé dans une mine d’or. Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, a déjà utilisé cette métaphore pour décrire la direction de Twitter. Une direction qui perdait son temps en querelles idiotes et en excès, sans se rendre compte de la chance qu’elle avait d’être autorisée à gérer l’un des sites de réseautage les plus emblématiques et les plus addictifs de tous les temps. Depuis combien d’années la Belgique est-elle à l’arrêt ? Cela fait des années que nous nous regardons le nombril, dans une fièvre électorale permanente et paralysante. Si nous sommes tout à fait honnêtes, nous devons admettre que nous avons les politiciens que nous méritons. Il n’y a pas de soutien aux réformes structurelles, sauf si c’est un autre qui paye la facture. Nous devons abandonner cette mentalité. C’est la seule façon de protéger notre fragile prospérité.
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