Olivier Mouton
Oui aux présidents de parti dans le gouvernement
Il est grand temps de conclure. La Belgique a besoin d’un gouvernement pour remettre de l’ordre dans son budget, réformer sa politique socio-économique et répondre aux préoccupations des entreprises en matière de compétitivité. “Il est temps de clarifier les choses parce que tout le monde s’énerve”, disait, à juste titre, le formateur Bart De Wever, avant d’être reconduit dans sa mission par le roi, mardi 7 janvier. Une dernière fois, on l’espère, avant d’atterrir fin janvier. Près de huit mois après les élections !
Cette trop longue gestation aura permis, disent les négociateurs, de rédiger une déclaration gouvernementale plus précise que lors des législatures précédentes. Un gage d’efficacité : les arbitrages devant être effectués en cours de route sont souvent les plus délicats, car ils ne participent pas à un “grand marchandage d’ensemble”. Si tout ce temps a permis de fixer un cap clair en termes de fiscalité, d’emploi, de pension, d’énergie, il n’aura pas été perdu. On peut en douter, les profondes divergences induisant une procrastination des partis en matière socio-économique.
La Belgique a besoin d’un pilote fort dans le cockpit en ces temps incertains. Le contexte géopolitique est tendu et l’arrivée de Donald Trump à la tête des États-Unis, ce 20 janvier, est lourde d’incertitudes. L’Europe ne cesse de dévisser face à la concurrence américaine et chinoise, son moteur franco-allemand étant grippé au plus mauvais moment. Or, les entreprises doivent investir massivement pour faire face au défi climatique, innover et conquérir des marchés. Ce ne sont pas des aides qu’elles réclament, mais bien un cadre réglementaire clair et stable. Bref, une gouvernance.
La Belgique est devenue, plus que jamais, une particratie. Pour le meilleur ou pour le pire.
Il serait “bénéfique” que les présidents de parti montent à bord du futur gouvernement, insistait Georges-Louis Bouchez, dans un entretien au Soir. Texto : “Le volume de réformes est tellement important que les présidents qui négocient l’accord, qui posent les choix, prennent les décisions, peut-être qui ont incarné comme jamais leurs partis pendant la campagne électorale – ce fut une campagne de présidents –, ceux-là devront, selon moi, assumer leurs responsabilités”, justifie-t-il. À juste titre.
Le président libéral est d’ailleurs l’illustration de cette nécessité. Lors de la législature qui s’achève, il n’a cessé de torpiller la Vivaldi en multipliant les déclarations critiques de l’extérieur. À la tête d’un super-ministère de la sécurité, façon Sarkozy, peut-être appuiera-t-il davantage “sa” politique gouvernementale ? Ironie mise à part, un monstre sacré de la politique belge, Wilfried Martens, le disait dans les années 1980-1990 : pour réformer le pays en profondeur et prendre des décisions difficiles, il est indispensable d’impliquer les présidents de parti au sein du gouvernement.
La réticence d’un Conner Rousseau (Vooruit) ou d’un Sammy Mahdi (cd&v) à l’idée de monter au gouvernement témoigne déjà de la fragilité du futur édifice. Un manque de courage ? “Les mesures que le futur gouvernement devra prendre ne seront pas toutes populaires, mais elles sont nécessaires, nous disait Maxime Prévot (Les Engagés), début novembre. On ne trouve pas de recette miracle sous le sabot d’un cheval pour réduire de 16 milliards les dépenses publiques.” Ceci explique peut-être cela.
Cette implication de tous les présidents de parti est nécessaire alors que le pays vacille. Il est temps d’agir, car l’heure est grave. Ce serait un signal fort pour le laisser entendre. Même si cela confirmerait, aussi, une dérive démocratique: la Belgique est devenue, plus que jamais, une particratie. Pour le meilleur ou pour le pire.
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