Trump, un électrochoc pour l’Europe

L’Europe doit-elle aller dans la même direction que celle des Etats-Unis de Donald Trump ? (Photo by Chip Somodevilla/Getty Images) © Getty Images
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Les patrons belges ne sont pas trop inquiets après l’élection de Donald Trump à la tête des États-Unis. “Notre développement aux USA n’est absolument pas menacé”, souligne François Michel, CEO de John Cockerill, saluant le fait que notre partenaire commercial reste “une grande démocratie”. “Cette élection doit devenir un moment d’opportunité pour la construction européenne”, estime Roberto De Primis, CEO d’EURintelligence. Le retour de Trump doit avant tout servir d’électrochoc !

La ligne du président républicain sera plus radicale que lors de son premier mandat, après une réélection s’apparentant à un raz-de-marée électoral sans précédent. Ses premières nominations de secrétaires d’État ne trompent pas : Trump II sera ultra-protectionniste. Il pourrait lâcher l’Ukraine afin de se concentrer sur le bras de fer avec la Chine et sera sans complaisance avec ses alliés européens. C’est la confirmation d’un monde qui change à une vitesse fulgurante, dans le sens d’une démondialisation. “Je n’ai pas attendu la victoire de Donald Trump pour dire que l’on doit prendre notre destin en mains, nous dit Fabrice Brion, CEO d’I-care. Nous devons réindustrialiser et arrêter d’attendre que les autres décident pour nous. Nous devons retrouver de l’ambition.” Voilà l’Europe au pied du mur. Le président français, Emmanuel Macron, ne s’y est pas trompé lorsqu’il a utilisé cette métaphore : nous ne pouvons plus être des herbivores entourés de carnivores. Voici venu le moment d’une saine agressivité.

L’Europe doit oser se récréer une place parmi les acteurs de ce monde en changement.

Les pays européens ont des atouts en matière de compétences, de capacités d’innovation ou de pluralisme démocratique. Si leur compétitivité est menacée, les réponses sont couchées dans des rapports rédigés par les anciens Premiers ministres italiens Letta et Draghi : investissements massifs dans l’innovation, union des capitaux, gouvernance économique renforcée… La solution est : “plus d’Europe”. Y compris sur le plan stratégique et de défense, face à un ogre russe qui se sent pousser des ailes.

“Le véritable wake-up call sera géopolitique”, estime Yves Delatte, CEO de la Sonaca. Qui insiste : “Nous avons besoin d’une impulsion politique pour soutenir une vraie vision de l’industrie de la défense”. Dans ce monde de carnivores, l’Europe doit consommer européen, créer des champions à l’échelle du continent comme ce fut le cas avec Airbus et oser se récréer une place parmi les acteurs de ce monde en changement, en Afrique ou dans les pays émergents. Jouer finement la multipolarité !

Si l’avenir du projet européen est écrit dans des rapports… ce ne sont encore que des rapports. Bernard Kouchner, ancien ministre français des Affaires étrangères, saluait ce travail d’écriture dans un entretien à LCI, tout en doutant de la détermination à les concrétiser. Le moteur politique franco-allemand de la construction est affaibli, la Pologne et les pays de l’Est comptent sur leur partenariat bilatéral avec Trump : bref, une sérieuse thérapie collective s’impose pour assumer ces “impulsions politiques”.

La Belgique doit montrer l’exemple de ce sursaut européen. Encore faut-il qu’elle soit en capacité de le faire. Bart De Wever, formateur royal, s’est empêtré dans les tensions internes à la coalition Arizona et la formation d’un gouvernement fédéral reste à un stade balbutiant, cinq mois après le scrutin. Notre pays, souvent présenté comme un laboratoire de l’Europe, témoigne de la difficulté à prendre notre destin en main. Nos dirigeants d’entreprise ont bien du mérite à appeler à un sursaut. Il est temps de les écouter !

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