Olivier Mouton
Sauve qui peut les villes wallonnes
Avant de voter pour la future équipe dirigeante de votre commune, ce dimanche 13 octobre, pensez à regarder sa situation budgétaire. Ce n’est sans doute pas le réflexe habituel : on trouve son bourgmestre “sympa” ou l’animation de la localité dynamique, voire ses voiries convenables. La comptabilité, ce n’est pas sexy. Pourtant, voilà le grand enjeu de ces prochaines années : nos pouvoirs locaux vont-ils survivre à une situation financière désastreuse ?
Le degré d’urgence a été rappelé juste avant le scrutin par la banque ING. Au vu de la dégradation des chiffres, elle a refusé de donner son feu vert à un plan de financement wallon destiné à donner de l’oxygène à des entités surendettées. Trop risqué. On parle d’un montant de 350 millions d’euros, pour sept villes : Charleroi, Liège, Mons, Ath, Namur, La Louvière et Verviers. En Région bruxelloise, la situation est aussi préoccupante.
Les communes sont certes touchées de plein fouet par un contexte structurel difficile: indexation des salaires à répétition, pensions galopantes, explosion des dépenses des CPAS… Mais ce sont aussi, Namur mis à part, des localités aux mains de majorités socialistes, incarnant une gestion dépassée faite de cadeaux, de services et de clientélisme. Cette époque-là sera-t-elle révolue au lendemain des élections communales ? La “révolution” initiée le 9 juin sera-t-elle confirmée ?
Il y a de la marge pour agir. Une étude sur le poids des administrations réalisée par Jean Hindriks et Alexandre Lamfalussy, de l’UCLouvain, assène : “Nous dépensons pour l’administration publique belge 6.718 euros en plus par habitant que la moyenne européenne (UE 27). En particulier, nous dépensons 1.697 euros en plus par habitant que la France, 2.194 euros supplémentaires que les Pays-Bas, 3.072 euros que l’Allemagne et 5.092 euros que l’Italie.” En tête de cette “surconsommation” : les pouvoirs locaux. Une piste : des fusions entre communes.
Les conséquences de cette débâcle risquent d’être concrètes. Pour éviter la cessation de paiement, le périmètre d’action pourrait être revu, des projets reportés, l’entretien des infrastructures malmené ou des services privatisés. “Il faut remettre à plat le système afin de stabiliser les finances communales, dit François Desquesnes (Les Engagés), ministre wallon des Pouvoirs locaux. Si on ne le fait pas, la situation va retomber sur la Région.”
La Région wallonne, pouvoir de tutelle, voit venir avec inquiétude cet autre orage budgétaire. La nouvelle majorité MR-Engagés vient elle-même d’entamer son conclave et les 10 prochaines années s’annoncent délicates avec un trou de 2,7 milliards à combler. La couleur a été donnée : on va rationaliser les structures publiques, évaluer tous les subsides, revoir les modes de fonctionnement…
Nous avons vécu trop longtemps au-dessus de nos moyens. L’argent injecté massivement pour la relance wallonne, notamment à travers les fonds européens, n’a pas porté ses fruits. Les moyens octroyés aux pouvoirs locaux n’ont pas généré des projets cohérents. La culture de l’effet levier – cette capacité à multiplier l’argent – ne s’est pas enracinée.
“Les Wallons aiment profiter de la vie, est-ce si mal?”, demandait en février Paul Magnette, président du PS et… bourgmestre de Charleroi. Il ne se représente plus et cédera la tête de la ville après le 13 octobre à Thomas Dermine ou à un maïeur d’une autre couleur. La lutte sera âpre, comme à Mons ou ailleurs. L’enjeu de ces combats est clair : à l’avenir, nos élus devront mettre l’accent sur l’efficacité. Et la rigueur.
Avant de voter pour la future équipe dirigeante de votre commune, ce dimanche 13 octobre, pensez à regarder sa situation budgétaire.
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