Amid Faljaoui
Trump 2.0 : 100 jours pour saborder l’Amérique
Donald Trump voulait secouer le cocotier. Il a foutu l’arbre entier par terre.
En cent jours, Donald Trump n’a pas seulement gouverné : il a joué aux quilles avec l’économie mondiale, et il a pris la démocratie américaine pour une salle de jeu privée.
Son arme favorite ? Le chaos organisé. Ce que Steve Bannon, son ancien conseiller média, appelait, avec l’élégance d’un vieux sorcier, “flood the zone” : noyer la zone, noyer le système médiatique et politique sous une avalanche de décisions pour l’empêcher de réagir.
Résultat : en cent jours, Trump a signé plus de décrets qu’un hyperactif en cure de caféine. Même Franklin Roosevelt peut aller se rhabiller !
Sauf que Roosevelt avait hérité d’une crise économique. Trump, lui, a hérité d’une économie plutôt florissante… et il l’a attaquée à la tronçonneuse.
Première secousse: la guerre commerciale totale. En mode “liberation day”, il a taxé tout ce qui bouge – même les pingouins d’îles désertes ont pris 10 % de droits de douane. Oui, vous avez bien lu, des îles… inhabitées.
Résultat ? Wall Street s’est pris une gamelle historique. Le Nasdaq a dégringolé, le dollar a dévissé, et les patrons américains commencent à consulter leur psy.
Deuxième secousse : l’instabilité. Les entreprises adorent la croissance mais elles détestent l’imprévisibilité. Avec Trump 2.0, elles ont eu droit à une overdose : un jour c’est la baston contre l’Europe, le lendemain on lève le pied avec la Chine. À force de renverser la table, même ses propres alliés ne savent plus à quel jeu il joue.
Comme l’écrit Giuliano da Empoli dans son dernier livre (L’heure des prédateurs) : “L’apogée du pouvoir ne coincide pas tant avec l’action qu’avec l’action… irréfléchie, la seule à même de produire l’effet de sidération sur lequel se fonde le pouvoir du Prince”. Et Trump a transformé cette maxime en plan de carrière.
Troisième secousse : l’explosion judiciaire.
Quand un président commence à défier ouvertement la Cour suprême, à ignorer les décisions de justice et à menacer l’université américaine, on sait que l’État de droit prend cher.
Même Harvard, d’ordinaire plus connue pour ses banquets en faveur de ses sponsors que pour ses barricades, s’est mise à sortir les griffes contre la Maison-Blanche.
Bref, en cent jours, Trump a prouvé que la pire menace pour l’Amérique… pouvait venir de l’intérieur. Pas besoin d’espions russes quand on a un président en mode bulldozer.
Pour l’heure, ses partisans adorent : pour eux, mettre le boxon, c’est prouver qu’on agit. Ils ont voulu un “dur à cuir” à la Maison Blanche, ils ont eu droit à une tornade.
Et dans les tempêtes, il est facile de confondre mouvement et progrès.
Pendant ce temps, les investisseurs commencent à voter avec leur portefeuille. Le dollar, hier champion du monde, est aujourd’hui le punching-ball des marchés. Les taux d’intérêt flambent. Et le FMI vient d’abaisser la croissance américaine de presque 1 point. Du jamais vu pour un président aussi tôt dans son mandat. A ce stade, on pourrait dire que : “Ce n’est pas la Chine qui affaiblit l’Amérique. C’est Trump lui-même.”
Alors oui, l’économie américaine tient encore debout, dopée aux stocks de précaution des entreprises et aux achats anticipés des ménages. Mais l’ivresse du court terme masque la gueule de bois qui vient.
En100 jours, Donald Trump a prouvé qu’il pouvait secouer le monde sans vraiment savoir ce qu’il voulait en faire.
Que gouverner par instinct, c’est parfois galvaniser. Mais gouverner sans cap, c’est finir droit dans le mur… en klaxonnant.
La question n’est désormais plus de savoir si Trump va continuer à faire des dégâts. La vraie question est : combien de temps l’Amérique pourra-t-elle encaisser les secousses avant de dire stop ?
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