Amid Faljaoui

Taux d’intérêt : entre jeunesse et rentiers, l’équilibre financier en jeu

Ah, les taux d’intérêt : si chacun savait dans quelle direction ils allaient, ce serait quand même plus simple.

C’est généralement une question que se posent souvent les épargnants en quête de bons rendements, mais aussi, et surtout les chefs d’entreprise. Comme beaucoup d’investissements se font à base d’endettement, la hausse des taux a un impact négatif. Et je connais pas mal d’entrepreneurs qui reportent leurs projets parce qu’ils ne sont plus rentables avec la hausse des taux actuels. A défaut d’être Mme Irma et de pouvoir vous dire s’ils vont encore augmenter ou commencer à baisser, je peux au moins vous expliquer la magie cachée des taux d’intérêt.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que les taux d’intérêt ont un impact aussi bien humain qu’économique. Lorsque le curseur des taux d’intérêt est au plus bas, c’est l’avenir que l’on favorise. Et l’avenir, ce sont nos jeunes. Avec des taux bas, on leur permet d’emprunter pour se loger et donc se stabiliser. N’oubliez pas qu’une hausse de 1% des taux d’intérêt équivaut à une hausse de 10% de la mensualité. Donc, les taux bas, c’est un énorme avantage pour les jeunes, mais aussi pour les jeunes entrepreneurs, ceux et celles qui se lancent sans en avoir les moyens. Voilà pourquoi les taux d’intérêt bas sont associés à l’avenir.

Les taux hauts, je simplifie bien sûr, récompensent surtout ceux et celles qui ont un bas de laine bien garni. Ils sont souvent par définition plus âgés et donc, les taux d’intérêt hauts favorisent les rentiers. Quand je dis rentiers, ce n’est pas péjoratif, c’est juste une expression économique pour évoquer ceux et celles qui vivent de leur rente au sens économique du terme. D’ailleurs, avec la hausse des taux, les personnes plus âgées – les boomers comme on dit – ont à nouveau le choix. Il y a 18 mois encore, ces personnes n’avaient pas le choix : si elles voulaient du rendement, elles devaient aller en Bourse, et donc prendre un peu de risque. Aujourd’hui, c’est le grand retour des obligations et des placements rentables et sans risque ou très peu. Nous sommes donc passés du syndrome TINA – there is no alternative – au syndrome TIAA – there is an alternative.

Vous l’avez compris, les taux d’intérêt selon qu’ils sont hauts ou bas peuvent refléter en quelque sorte nos préférences collectives de manière inconsciente. Selon que le curseur des taux d’intérêt et en bas à gauche, vous favorisez l’avenir et la jeunesse, et si ce même curseur est en haut à droite, nous favorisons sans le savoir le passé et les rentes. D’ailleurs, prenez la presse économique à laquelle j’appartiens, elle évoque souvent la baisse de l’immobilier comme si c’était nécessairement une calamité, sans doute parce que ceux et celles qui l’achètent sont majoritairement propriétaires. Mais cette même presse économique oublie parfois que l’avenir ce sont les jeunes. Et que ceux-ci doivent aussi pouvoir avoir un bien immobilier. Et qu’être propriétaire permet aux jeunes de se projeter plus sereinement dans l’avenir. Or, justement lorsque l’immobilier résiste à un certain niveau de prix et que les taux augmentent brutalement comme ils l’ont fait depuis 18 mois, c’est la double peine pour ces jeunes qui entrent dans la vie.

De même, pour un jeune commerçant, une baisse de l’immobilier, c’est sans doute aussi un pas de porte moins cher, et l’occasion aussi de se lancer à bon compte. Bref, dans la presse économique, nous avons parfois un regard biaisé et trop souvent centré sur une partie de la population. Nous avons en quelque sorte un regard parfois hémiplégique. Je viens donc de faire une sorte de Mea Culpa. Et même une Mea Maxima Culpa.

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