Six PDG américains plus forts que les Etats

Elon Musk et Narendra Modi - Indian Press Information Bureau (PIB) / Handout/Anadolu Agency via Getty Images
Amid Faljaoui

Et si nous parlions aujourd’hui des vrais maîtres du monde ? Non, ce ne sont pas les chefs d’État – pas même ceux des États-Unis, de la Chine, et encore moins de l’Europe. Je vous parle de six hommes, tous américains, tous occidentaux. Même lorsque les actions de leurs sociétés baissent en Bourse, ils pèsent quand même plus lourd que la plupart des États de la planète.

Je parle d’Elon Musk, patron de SpaceX, Tesla et X ; de Jeff Bezos, le patron d’Amazon ; de Mark Zuckerberg, patron de Facebook-Meta ; de Sergueï Brin et Larry Page, les fondateurs de Google ; et bien entendu de Bill Gates, le fondateur de Microsoft. Je vous parle de ces six hommes parce que le New York Times a consacré sa une de ce week-end à l’un d’eux, Elon Musk, et a démontré comment le patron de Tesla et SpaceX utilise son réseau social X pour promouvoir la politique de ses amis politiques. Que ce soit le nouveau président argentin, le président indien, le président chinois, le président turc ou son ami Donald Trump, tous, d’une manière ou d’une autre, sont fiers de connaître Elon Musk, s’affichent avec lui et le reçoivent avec les honneurs d’un chef d’État. En contrepartie, il obtient des faveurs, comme des droits de douane plus faibles pour les importations de ses Tesla en Inde et au Brésil. Quant à l’Argentine, son amitié avec le nouveau président argentin lui permet de sécuriser son accès au précieux minerai qu’est le lithium, si important pour les batteries des voitures électriques.

Au fond, cet article rejoint la thèse d’un livre brillant rédigé par ma consœur Christine Kerdellant, au titre très évocateur : « Ces milliardaires plus forts que les États ». Cet ouvrage démontre en moins de 300 pages ce que le New York Times a révélé ce week-end : à savoir que ces six hommes, dont Elon Musk, sont aujourd’hui « plus riches, plus rapides, plus influents que la plupart des États-nations ».

Revenons sur Elon Musk. Il possède, comme elle l’écrit, « un tiers des satellites de télécommunication en orbite autour de la Terre » et il les a lancés sans permission, avec un principe : premier arrivé, premier servi. Et alors, direz-vous ? Le côté positif, c’est que c’est grâce à lui que l’Ukraine peut affronter l’armée russe, car via ses satellites, il a permis aux forces ukrainiennes d’exploiter des renseignements, de coordonner des frappes d’artillerie et de permettre aux unités opérationnelles de dialoguer avec leurs états-majors. Personne ne va évidemment s’en plaindre. Mais le hic, comme le souligne ma consœur Christine Kerdellant, c’est qu’un homme seul, non élu, a un pouvoir qui fait trembler même le Pentagone. Que se passerait-il s’il avait refusé d’aider l’Ukraine ou s’il avait décidé d’aider plutôt la Russie ?

On pourrait multiplier les mêmes interrogations avec les cinq autres multimilliardaires, dont Mark Zuckerberg qui, avec son réseau social Facebook, rebaptisé Meta, porte une lourde responsabilité dans la montée de l’agressivité et du populisme dans le monde. Des réseaux comme Facebook sont des usines à colère, des machines à nourrir les clivages. Des dérapages dont sont préservés les enfants de ces maîtres du monde, car plusieurs enquêtes ont montré que ceux-ci interdisent à leurs enfants de posséder un portable avant l’âge de 14 ans et les inscrivent dans des écoles où les écrans sont interdits.

Le résultat de cette enquête du New York Times et de ce livre de Christine Kerdellant, c’est que face au pouvoir souvent exorbitant de ces six hommes, « ceux qui pourraient les arrêter ne le veulent pas, et ceux qui voudraient les arrêter ne le peuvent pas ».

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