Philippe Ledent
Situations politiques belge et françaises: qui faut-il blâmer?
La très récente dégradation de la note de la France par l’agence de notation Moody’s nous rappelle que la situation budgétaire de certains pays européens, parmi lesquels on peut aussi citer la Belgique, nécessite des décisions fortes que l’instabilité politique ne permet pas de prendre.
Michel Barnier, le désormais “ancien” Premier ministre français, a comme tout le monde ses qualités et ses défauts. Néanmoins, il me semblait être l’homme de la situation pour trouver des compromis au sein d’un parlement éclaté et coincé entre les extrêmes. Outre le fait qu’il n’avait plus rien à prouver et que sa carrière politique était derrière lui, son passage comme négociateur en chef de l’Europe pour le Brexit avait marqué les esprits. Arriver à tourner à son avantage une négociation face aux Anglais reflète une capacité rare de négociation.
Ceci étant, même le meilleur des négociateurs ne peut rien quand il s’agit d’implémenter des mesures d’économie. Pour un parti politique, être dans l’opposition durant une telle période reste la position la plus confortable. Être au pouvoir et prendre des mesures difficiles d’assainissement des finances publiques ou engager des réformes structurelles, c’est s’assurer une montagne de critiques, un climat social difficile et la perte d’une partie de son électorat. En France, à deux ans des présidentielles, c’est une mission devenue quasi impossible.
La Belgique n’est pas en reste et c’est probablement pour les mêmes raisons qu’aboutir à un accord fédéral est devenu si difficile. Au-dessus des salles de négociations plane l’ombre de “celle-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom” et qui a pesé sur le triste passé de la Grèce ou du Portugal : l’austérité. Et que dire de la région de Bruxelles-Capitale, pour laquelle chaque jour nous en apprend un peu plus sur sa situation financière catastrophique. C’est malheureusement le propre des économies dans lesquelles les institutions en tous genres et entreprises publiques, les subsides et les aides sont devenus dominants. La moindre mesure d’économie ou d’amélioration de l’efficacité concerne trop de personnes, mécontente trop de monde. Qui aurait envie d’y mener une cure d’austérité… Pardon !… de qui vous savez… ?
Quel que soit le nouveau gouvernement, en France comme en Belgique, il fera donc face à de fameux vents contraires .
Et pourtant, qui faut-il vraiment blâmer dans de telles situations ? Celles et ceux qui veulent prendre le taureau par les cornes, prendre les mesures d’urgence et engager les réformes nécessaires, ou bien celles et ceux qui ont mené l’économie dans une telle situation ? Critiquer un gouvernement qui veut faire des économies, c’est oublier un peu vite qu’un autre gouvernement a laissé les choses se dégrader et a fait croire que le train de vie mené jusqu’ici nous était collectivement dû et acquis.
La seule porte de sortie pour un gouvernement d’économies et de réformes, c’est d’obtenir rapidement quelques résultats positifs, pour valider ses choix, pour justifier les efforts demandés et surtout pour redonner de l’espoir aux ménages et aux entreprises. Malheureusement, ces résultats sont autant le fruit des mesures prises que de la conjoncture économique et des chocs externes. Or, les perspectives économiques restent ternes pour 2025, et l’arrivée de Trump au pouvoir en janvier prochain nous promet quelques nouveaux chocs négatifs en Europe.
Quel que soit le nouveau gouvernement, en France comme en Belgique, il fera donc face à de fameux vents contraires dans les prochains mois. À lui de garder le cap malgré tout, et malgré le jeu facile de l’opposition. Et que celle-ci fasse preuve d’un peu d’humilité : qui faut-il réellement blâmer ?
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