Alors, cette fameuse taxe sur les plus-values… on en parle depuis des années, certains en rêvent, d’autres en font des cauchemars. Et à en croire le tumulte politique actuel, elle est sur le point de naître… ou d’exploser en vol.
Parce que soyons clairs : cette taxe, c’est un peu comme un bébé de divorce. Personne n’est vraiment d’accord sur qui va l’élever, combien elle va coûter, et surtout à qui elle va ressembler. À la base, c’était une revendication de Vooruit, le seul parti de gauche dans cette étrange créature qu’est la coalition Arizona.
Vooruit a dit : “OK pour limiter les allocations de chômage dans le temps – ce que réclament MR et N-VA – mais en échange, vous nous donnez une taxe sur les plus-values.” Bref, une sorte de donnant-donnant socialo-libéral à la belge. Mais très vite, les complications sont arrivées.
Parce que voilà, taxer les plus-values, c’est plus facile à proposer qu’à mettre en oeuvre. Mais dès qu’on met les mains dans le cambouis, tout le monde crie au scandale. Exemple ? L’épargne-pension. Il y a 4 millions de Belges qui ont ce type de produit financier. Et si on les taxe sur les plus-values qu’ils réalisent après 30 ans de bons et loyaux versements, ça revient, comme le dit Sammy Mahdi (CD&V), à leur faire payer deux fois pour la même chose. D’ailleurs, il a fait les comptes : plus de 7.000 euros de taxes potentielles sur une vie d’épargne. Merci, mais non merci.
Magnette ne votera pas la taxe si elle est trop molle
Du côté du PS, on ne dit pas non. Paul Magnette, stratège tranquille, regarde la chose avec un certain flegme. Il ne votera pas la taxe si elle est trop molle – 10 %, c’est à peine un pourboire fiscal – mais il se réjouit qu’on pose enfin les rails. Parce que quand la taxe existera, même toute petite, elle pourra ensuite être modifiée sans devoir en recréer une nouvelle. En clair, ce qu’il dit explicitement, c’est : “On la laisse passer, puis on montera les taux, on retirera les exemptions… et là, ça deviedra sérieux.”
Et puis, pour corser le tout, il y a ce flou permanent. Qui est la classe moyenne ? Qui a “les épaules les plus larges” ? Tout le monde utilise ces expressions, mais personne ne les définit. A dessein évidemment. Résultat : on ne sait pas vraiment qui va payer. Mais tout le monde a peur d’être dans le lot. C’est ça, l’art fiscal belge, notre moment Magritte : faire peur à tout le monde pour finalement ne fâcher personne.
Un monstre administratif ?
Et comme souvent dans notre beau pays, à force de vouloir satisfaire tout le monde, on accouchera sans doute d’un monstre administratif. Le genre de texte que même les inspecteurs du fisc devront lire trois fois avec une aspirine.
La date limite, c’est le 1er juillet. Et d’ici là, chaque parti va essayer de sauver “ses” électeurs. Le CD&V défend l’épargne-pension, le MR défend la classe moyenne (sans trop dire qui c’est), Vooruit veut sauver l’honneur à gauche, et le PS regarde tout ça en se frottant les mains pour la suite.
Alors, à quoi ressemblera cette taxe au final ? À un gruyère fiscal, pour reprendre les mots de Maxime Prévot ? À une taxe zombie, ni vraiment morte, ni vraiment vivante ? À un cheval de Troie pour une vraie réforme fiscale plus tard sous la houlette du PS ? Réponse le 1er juillet. Peut-être.
En attendant, chers lecteurs, vous pouvez continuer à épargner. Mais n’oubliez pas : en Belgique, le fisc finit toujours par sonner à la porte. Même si c’est avec dix ans de retard et une calculette cassée.