Musk et l’AfD : le mariage improbable du patron de Tesla et de l’extrême droite allemande

Alice Weidel
Alice Weidel, cheffe du parti d’extrême droite allemand AfD. © Getty Images
Amid Faljaoui

“Seule l’AfD peut sauver l’Allemagne.” Voilà comment Elon Musk, le milliardaire américain, s’est jeté dans l’arène politique allemande en décembre dernier, tel un gladiateur convaincu de sa victoire.

À deux mois des législatives anticipées, il n’a pas hésité à afficher son soutien à Alice Weidel, cheffe du parti d’extrême droite AfD. Ce qui, au passage, a laissé plus d’un observateur perplexe. Entre les idéaux de l’AfD et les intérêts de Tesla, le fossé semble aussi large qu’un canyon californien.

Une tribune pour le chaos

Musk, jamais à court d’idées pour alimenter les polémiques, a publié une tribune en décembre dans le journal allemand Welt am Sonntag. Sous prétexte de son statut d’investisseur en Allemagne, il y dresse un portrait apocalyptique du pays : “au bord du gouffre économique et culturel.” Et de désigner l’AfD comme la seule lueur d’espoir dans cet univers sombre peuplé de “politiques qui ont échoué.” Ambiance.

Des attaques à 280 caractères

Toujours fidèle à son réseau social X (anciennement Twitter, pour ceux qui auraient raté l’épisode), Musk s’est lancé dans une campagne digitale contre le chancelier Olaf Scholz, qualifié de “fou furieux.” Une touche de finesse qui fait mouche dans le pays du dialogue policé. À grand renfort de tweets, il exhorte les électeurs allemands à voter pour l’AfD, ajoutant une pincée d’huile sur un feu politique déjà bien nourri.

Le grand paradoxe

Mais pourquoi diable Musk court-il après l’AfD ? Ce parti milite pour les moteurs à combustion, tandis que Tesla mise tout sur l’électrique. L’AfD rejette les subventions, là où Tesla en a largement profité. Et cerise sur le gâteau, Tesla bénéficie des limites d’émissions imposées aux moteurs thermiques par l’Union européenne, mesure honnie par l’AfD. Un politologue allemand, Wolfgang Schröder, résume le malaise : “Le techno-capitalisme de Musk n’a rien à voir avec l’AfD.” Tout est dit.

Une vieille rancune

Ce soutien étrange semble surtout guidé par une obsession : défaire Olaf Scholz et son gouvernement social-démocrate, trop proches des syndicats. Depuis l’ouverture de l’usine Tesla à Berlin, Musk se bat contre IG Metall, un puissant syndicat qui tente d’imposer à Tesla les règles locales des comités d’entreprise. Une hérésie pour Musk, grand chantre de l’individualisme entrepreneurial.

L’AfD en mode anti-Tesla

Ironiquement, l’AfD ne s’est jamais montrée très fan de Tesla. En novembre 2019, Alice Weidel dénonçait les batteries de Tesla comme des “déchets compliqués.” En janvier 2020, la branche locale de l’AfD réclamait un arrêt du projet d’usine dans le Brandebourg. Et même après l’embauche de 12 000 salariés, le parti continue de voir dans Tesla une menace pour l’industrie automobile allemande.

Musk, cheval de Troie des démocraties ?

Face à cette ingérence, la réaction politique ne s’est pas fait attendre. Le Premier ministre belge Alexander De Croo a appelé l’Union européenne à intervenir contre “les hommes riches et puissants actifs dans les médias” qui manipulent l’opinion publique. “Nous sommes soumis à des attaques constantes contre notre souveraineté,” a-t-il martelé, insistant sur la nécessité de réglementer ces pratiques.

L’AfD : un choix stratégique ou un malentendu ?

Finalement, le soutien de Musk à l’AfD ressemble à un mauvais script de film dystopique : un milliardaire électrique allié à des populistes fossiles. Une alliance paradoxale qui soulève bien des questions, mais laisse une certitude : quand Elon Musk décide de s’en mêler, le chaos n’est jamais bien loin.

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