Typhanie Afschrift

Écoles et liberté de choix: une promesse trahie ?

Typhanie Afschrift Professeure ordinaire à l'Université libre de Bruxelles

Il vaut la peine de lire la déclaration de politique générale de la Fédération Wallonie-Bruxelles, notamment en ce qui concerne l’enseignement. Certainement pas parce qu’il y aurait des mesures de grand intérêt, mais parce que c’est là le modèle du plus complet conservatisme : le MR et Les Engagés, qui voulaient absolument se débarrasser du Parti socialiste, ne font rien de significatif qui soit différent de la politique de ce dernier parti.

On a vu les libéraux se plaindre depuis plus de dix ans du décret inscription, cette mesure qui porte atteinte à la liberté de l’enseignement. Ils avaient bien raison de critiquer ce décret, qui empêche les parents, en première secondaire, de choisir l’école pour leurs enfants. Ce décret, plusieurs fois remanié, aboutit toujours à ce que, dans les zones très demandées, une instance administrative choisit à la place des parents. Et, chaque année, ce système aboutit à une liste de malheureux élèves qui doivent attendre que cette autorité leur trouve une école que leurs parents n’avaient pas choisie. Cela n’arrivait jamais avant ce décret.


Aujourd’hui qu’ils sont au pouvoir, ces partis ne font rien, absolument rien, pour abolir, ou même pour modifier, cette mesure inique. Tout se passe comme s’ils avaient capitulé, et comme si la liberté de choix de l’école de ses enfants était une chose de peu d’importance. Comment peut-on, pour les uns se déclarer défenseurs de “l’école libre” et pour les autres s’affirmer “fiers d’être libéraux, lorsqu’on n’exerce pas son pouvoir pour mettre fin à un système incompatible avec l’une des libertés les plus fondamentales ?

Pour le reste, c’est la philosophie du système, typiquement socialiste, qui est maintenue. Pour nos gouvernants, en ce compris ceux de la majorité actuelle, on parle toujours de “l’École”, et non des écoles. À l’exemple de cette mesure infime, pourtant montée en épingle par la presse, qui consiste à empêcher les élèves d’emmener leur téléphone portable à l’école. C’est évidemment une idée de bon sens, en tout cas en ce qui concerne l’usage pendant les cours eux-mêmes. Mais faut-il vraiment que cela soit décidé par un gouvernement, et imposé par une ministre ? À quoi sert-il encore d’avoir des directeurs d’école si tout doit venir d’en haut ? Ce n’est là bien sûr qu’un exemple, mais le programme gouvernemental concerne l’ensemble de l’enseignement, quels que soient les réseaux et sans distinction entre les écoles.

On maintient la conception qu’il importe peu que les écoles soient mauvaises, pour autant qu’elles soient mauvaises pour tous.

On reste dans l’idée qu’il faut un enseignement unique, le même pour tous. On oublie que les élèves sont différents, et ont des besoins également différents. On reste obsédé par l’idée qu’il faut entre eux exactement le même traitement, quels que soient leurs besoins et leurs qualités. Impossible de faire comprendre à ces gens, toujours habités par la conception socialiste d’un enseignement identique pour tous, qu’il devrait être possible de permettre aux directions d’école – et, pourquoi pas, aux enseignants eux-mêmes – d’innover, de se démarquer, de proposer quelque chose de nouveau à leurs élèves, quelque chose qui n’ait pas nécessairement été approuvé par la bureaucratie ministérielle et des politiciens qui n’y connaissent en réalité rien.

Des dirigeants réellement libéraux auraient compris, comme l’a expliqué Milton Friedman, il y a déjà 60 ans, que dans l’enseignement aussi, la concurrence fait progresser l’ensemble des intervenants, au bénéfice des élèves. Au lieu de cela, on maintient la conception qu’il importe peu que les écoles soient mauvaises, pour autant qu’elles soient mauvaises pour tous.

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