L’IA, la grande oubliée de ces élections

Georges-Louis Bouchez - BELGA PHOTO BENOIT DOPPAGNE
Amid Faljaoui

Les résultats des élections en Belgique sont un soulagement pour le monde des entreprises. D’abord, parce que les extrêmes qu’ils soient de droite ou de gauche, même s’ils se maintiennent voire progressent en termes de représentativité, ne sont plus aujourd’hui en mesure de dicter l’agenda politique de la Belgique. Et ça, c’est bon pour le monde de l’entreprise, car l’attractivité d’un pays est également jugée sur ces critères de gouvernabilité par les investisseurs étrangers.

Et puis deuxième bonne nouvelle, même si ce ne sera pas une promenade de santé, des coalitions sont théoriquement possibles. Et rapidement. Le MR, Les Engagés et la N-VA sortent renforcés et peuvent donc se tendre la main avec l’aide du cd&v pour gouverner la Belgique. Bref, il ne faudrait plus attendre plus de 500 jours pour former un gouvernement comme c’était le cas par le passé.

Troisième leçon, positive à nouveau pour le monde des entrepreneurs, exit l’attelage improbable et difficile à gouverner de la Vivaldi. Bien entendu, ce gouvernement sortant n’a pas eu toutes les fées qui se sont penchées sur son berceau, car il serait injuste d’oublier que ce gouvernement a dû affronter la crises du covid et de l’énergie. Mais il n’empêche, au final, cette Vivaldi était aussi le gouvernement du surplace sur beaucoup de thématiques comme la réforme fiscale ou la réforme des pensions.

Cette fois, le mandat est plus clair : il y a une colonne vertébrale de centre droit sur laquelle on peut s’appuyer pour former un gouvernement cohérent. Mais attention aux désillusions des citoyens : en Belgique, on se focalise beaucoup (trop) sur les élections nationales, au risque d’oublier que l’Europe a son mot à dire et plus souvent que par le passé. Ne nous leurrons pas, les grands problèmes économiques, environnementaux et sociétaux ne seront pas réglés au niveau de la petite Belgique mais bien au niveau européen.

Or, en Europe, la droite radicale a gagné des sièges et à défaut d’avoir la majorité au Parlement européen, elle risque d’être un facteur de blocage sur certains dossiers. Pour le reste, il faut aussi rappeler la perte de pouvoir de nos députés. Ils ne le savent pas mais leur pouvoir a déjà été raboté au fil du temps. Déjà que l’intelligence artificielle n’était présente dans aucun débat, alors que cette grande absente des programmes électoraux va dicter notre avenir au cours des prochaines années. Plus inquiétant encore, aucun politique de gauche ou de droite ne s’intéresse à l’IA, ni en Belgique, ni en France, ni ailleurs. Erreur fatale. Faute professionnelle même.

Il n’y a pas un seul secteur (enseignement, secteur médical, marché du travail, conquête de l’espace, armement, audiovisuel, médias, divertissement) qui échappera à l’impact de l’IA. Pareille paresse intellectuelle s’avérera mortelle d’ici peu. Dommage de voir nos politiques aveugles à leur propre effacement du cours de l’histoire. Faut-il leur rappeler que le pouvoir monétaire (fixation des taux d’intérêt) a été confisqué aux politiques par la banque centrale européenne et les marchés financiers ?  Doit-on rappeler que le pouvoir budgétaire (autrement dit, la fiscalité et les dépenses sociales) à défaut d’être entièrement confisqué est déjà très encadré par les normes établies par la commission européenne ?

Et le maigre résidu de pouvoir qu’il leur reste, ces mêmes politiques risquent d’en être privés bientôt par les géants du numérique qui sont aux commandes de l’intelligence artificielle. Jeff Bezos (Amazon), Elon Musk (Tesla, X, SpaceX), Mark Zuckerberg (Meta) et Tim Cook (Apple) ont plus d’impact au quotidien sur nos concitoyens que nos ministres. Mais nos politiques regardent ailleurs et continuent de vivre avec le logiciel du passé.

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