Eddy Caekelberghs
L’Europe bouclier? La guerre booste l’intérêt pour les élections européennes
Si l’on en croit l’Eurobaromètre de printemps, 81% des Européens estiment que les incertitudes du contexte international (guerre, climat, etc.) leur intime la nécessité d’aller voter en juin prochain.
Soixante pour cent des personnes interrogées disent même s’intéresser aux prochaines échéances, ce qui représente – dans l’absolu – 11% de plus qu’en mai 2019. Mais, selon le moment où les sondés sont questionnés et les éléments d’actualité anxiogènes qui sont développés à cet instant T, les réponses peuvent évidemment varier.
Par ailleurs, faut-il se féliciter de ces chiffres ? Certes, 11 points de plus c’est une tendance lourde et significative. C’est sûr. Mais elle souligne aussi combien le sentiment d’identité européenne est demeuré faible. A défaut d’avoir opéré un approfondissement des institutions avant tout élargissement, l’Europe est très vite devenue lointaine et illisible pour ses ressortissants. Ni un Etat, ni une vraie fédération, ni même une confédération : c’est une collaboration renforcée dotée pour une partie de son territoire d’une monnaie unique et de cercles de coopération inter-étatiques comme l’espace Schengen ou Eurojust.
Ce n’est clairement pas assez pour développer un vrai enthousiasme européen à l’instar d’une identité américaine qui connaît pourtant aussi ses propres disparités d’un Etat à l’autre. Mais mettons que deux tiers des Européens qui s’y intéressent et plus des quatre cinquièmes qui comptent se rendre aux urnes augurent d’une relance. Pour autant le problème demeure : sans réformes profondes de ses structures, les complexités et lenteurs vont s’aggraver.
Le regain d’intérêt pour les élections européennes s’explique par la situation de guerre que connaissent plusieurs pays du monde.
Or, qu’est-ce qui motive l’engouement relatif pour les urnes de juin ? C’est en Allemagne que se trouve la réponse la plus convaincante dans les colonnes du quotidien de gauche Die Tageszeitung. Les citoyens attendent beaucoup du Parlement européen, croit savoir TAZ : “C’est triste à dire, mais le regain d’intérêt pour les européennes s’explique par la situation de guerre que connaissent plusieurs pays du monde. Le conflit au Proche-Orient, et bien sûr la guerre d’agression russe contre l’Ukraine. (…) Bien que l’on n’entrevoie toujours pas une fin de la guerre, les citoyen·ne·s de l’UE semblent placer leurs espoirs dans l’appareil européen, malgré sa lenteur, pour garantir la paix, la sécurité et la défense du continent. Ces aspects sont d’autant plus importants dans les pays où la menace russe est nettement plus pesante que dans d’autres, comme la Finlande ou la Lituanie. Mais aussi l’Allemagne. On y attend donc beaucoup du prochain Parlement européen”.
Voire en Finlande où l’on peut lire : “La rivalité entre les Etats-Unis et la Chine menace de marginaliser l’UE sur la scène internationale. Bruxelles doit elle aussi garantir la compétitivité de ses entreprises, puisque Washington et Pékin renforcent leurs mesures protectionnistes. (…) Outre les défis extérieurs, les questions de l’élargissement et de l’amélioration du processus décisionnel sont aussi au menu de l’Union. Les enjeux des européennes sont donc considérables”.
Pour autant l’euroscepticisme demeure présent aussi. En Tchéquie par exemple mais pas que ! Selon la presse tchèque, un tiers des électeurs tchèques croient que l’UE est en perte de vitesse. Dans le même temps, les Tchèques affirment que le poids politique de l’UE a augmenté sous l’effet du covid et surtout de l’invasion russe en Ukraine. Concernant le Parlement européen, ils préféreraient que les eurodéputés aient moins de compétences. Bref, ils n’ont pas confiance en l’Europe. Nous sommes encore loin de nous unir derrière l’hymne européen : un “hymne à la joie” !
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