Laurent Alexandre et Alexandre Tsicopoulos

L’éthique est devenue une industrie du frein

L’éthique était un garde-fou et une boussole. Elle est devenue une prison et une laisse. L’Europe, fascinée par sa propre vertu, s’est construite une bureaucratie morale qui entrave son destin technologique. Notre continent, en panne d’audace, punit les innovateurs et protège les médiocres pendant que l’Amérique et la Chine construisent les cerveaux artificiels qui vont tout bouleverser. Bruxelles organise des séminaires sur la “diversité et l’inclusion algorithmique” et finance des “observatoires des biais systémiques”. Pendant ce temps, Sam Altman, Elon Musk, Demis Hassabis et Xi Jinping codent l’avenir.

L’éthique de l’IA n’est plus un débat philosophique, mais un business. Des armées de consultants, de “chercheurs en valeurs” et de juristes en mal de légitimité ont capturé le discours public pour imposer une vision paralysante de la technologie. La morale y sert d’alibi au conservatisme. L’innovation devient coupable par défaut. La puissance est suspecte. L’avenir est “pathologisé”.

Le problème n’est pas l’éthique en soi, c’est sa capture par des acteurs qui ne prennent aucun risque, ne construisent rien, mais imposent des règles à ceux qui créent. Pendant que les ingénieurs bâtissent l’intelligence du 21e siècle, les éthiciens du 20e la censurent à coups de chartes et autres labels. L’obsession de la précaution devient un outil de domination par l’impuissance.

La super IA ne s’arrêtera pas pour attendre notre validation morale. Elle surgira dans les pays qui assument de prendre des risques militaires, culturels et politiques. Et nous regarderons, du haut de nos comités d’éthique, le monde nous écrabouiller.

Il faut rompre avec cette posture de surmoi technologique suicidaire. L’Europe doit redevenir stratégique, pas naïvement vertueuse. Cela implique de reconnaître que la morale sans puissance est une hypocrisie débile. Une civilisation qui produit plus de textes sur les droits de l’IA que de modèles d’IA sera une civilisation dominée.

Il est urgent de sortir l’innovation du carcan des professeurs de scrupules. Sinon, nous serons éthiquement protégés, mais gouvernés par les IA californiennes et chinoises. L’éthique de l’IA, version européenne, est devenue un écosystème subventionné entre think tanks moralistes, consultants aux airs de tartuffes et start-up du “responsible AI” qui n’ont jamais produit une ligne de code utile, mais parasitent ceux qui agissent. Cette armée de “scrupulologues” vit de la peur, de la suspicion et de l’immobilisme. L’ambition devient une faute de goût.

À ce rythme, nous serons bientôt éthiquement irréprochables, mais technologiquement colonisés.

On ne régule pas ce qu’on ne comprend pas. Alors on encadre, on freine et on stérilise. La Commission européenne jouit de voir notre continent devenir un castrat technologique. L’Europe se prend pour un phare moral, mais elle n’éclaire plus personne. Elle devient invisible dans la course à l’intelligence. À vouloir protéger l’humanité d’un futur non-conforme au catéchisme bureaucratique, elle l’abandonne à ceux qui, eux, osent.

Soyons lucides. L’éthique est devenue le refuge de ceux qui ont perdu le pouvoir technique. Ceux qui ne savent plus innover préfèrent légiférer. Les moralistes du digital ont remplacé les planificateurs soviétiques : même dogmatisme, même inefficacité, et même déni de la réalité. Leur ennemi n’est pas l’injustice, c’est la disruption.

L’enjeu n’est pas d’abolir l’éthique, mais d’en finir avec son industrialisation kafkaïenne. De la rendre à la philosophie, en la retirant à la bureaucratie. Car à ce rythme, nous serons bientôt éthiquement irréprochables, mais technologiquement colonisés.

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