Philippe Ledent
L’économie mondiale doit se réveiller en deuxième mi-temps !
Même si l’Euro 2024 ne restera pas comme un grand cru pour la Belgique, restons encore un peu dans l’ambiance du football pour examiner l’état de l’économie. Si une année était un match, la saison estivale en serait la mi-temps : l’activité marque une pause, mais c’est aussi l’occasion de faire l’analyse précise de la première mi-temps, d’en déduire les forces et les faiblesses et éventuellement d’ajuster la stratégie pour délivrer de meilleures performances.
A vrai dire, le sentiment après cette première moitié d’année est plutôt mitigé. Elle avait pourtant bien commencé. Depuis fin 2023, les signes d’amélioration conjoncturelle se multipliaient, tant du côté de l’offre de l’économie, au travers d’une stabilisation de l’activité dans l’industrie, que du côté de la demande, les ménages retrouvant un peu confiance. Le premier trimestre de l’année a confirmé ces premiers signes. Alors que l’activité stagnait en deuxième partie de 2023, le PIB de la zone euro a légèrement progressé au premier trimestre (+0,2%), la plupart des pays de la zone euro étant même proches de leur niveau de croissance tendancielle.
Après la lourde récession de l’industrie européenne en 2023, on pouvait donc espérer qu’au-delà d’une stabilisation, le 2e trimestre de l’année serait marqué par une accélération de l’activité manufacturière. Malheureusement, les conditions ne semblent pas encore réunies pour une telle amélioration. Au niveau mondial, l’industrie a du mal à repartir. C’est vrai aux Etats-Unis, mais surtout en Chine, où malgré un dumping sur les prix à l’exportation, les autorités n’arrivent pas à accélérer l’activité industrielle. En Europe aussi, la demande semble toujours trop faible, alors que le secteur est handicapé par des problèmes de compétitivité notamment liés aux prix de l’énergie.
Ursula von der Leyen – l’entraîneur – comprend enfin les faiblesses de son équipe et change de tactique.
Alors qu’on espérait une baisse supplémentaire du niveau des stocks dans les entreprises et des premiers signes de redressement des nouvelles commandes industrielles, rien ne s’est produit. Au contraire, la plupart des indicateurs cycliques (on pense ici notamment aux indices PMI ou aux indicateurs de confiance de la Commission européenne) ont récemment évolué dans la mauvaise direction.
Bref, la team Zone euro aurait bien besoin d’un discours motivant à la mi-temps, mais surtout d’un changement de stratégie. Car la deuxième mi-temps s’annonce turbulente : la politique va être au cœur de l’attention, avec de possibles bouleversements, surtout aux Etats-Unis. Les finances publiques pourraient encore provoquer des périodes de stress sur les marchés et rendre toute politique économique plus compliquée en zone euro. Il est donc indispensable de voir enfin l’activité industrielle européenne se redresser. C’est important pour la santé des entreprises du secteur, mais aussi pour l’ensemble des secteurs de services qui gravitent autour de l’industrie. C’est aussi une question stratégique, pour montrer que dans un monde qui se déglobalise, l’Europe est capable non seulement de produire ce dont elle a besoin, mais aussi d’innover et d’apporter des solutions industrielles.
Dans son premier discours au Parlement européen, Ursula von der Leyen a promis, dans les 100 premiers jours de son mandat, un plan industriel ambitieux fondé sur l’industrie propre et la compétitivité. Même si cela n’est pas très original au regard de l’Inflation Reduction Act proposé en 2022 déjà (!) par le président Biden, on se dit que l’entraîneur comprend enfin les faiblesses de son équipe et change de tactique. Espérons donc que cela porte ses fruits et que les joueurs n’aient qu’une chose en tête : “Remontada !”
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