Amid Faljaoui

L’économie est indifférente au conflit entre le Hamas et Israël

Alors que les médias n’ont d’yeux que pour le conflit entre le Hamas et Israël, l’économie, elle, semble avoir les yeux ailleurs. C’est un paradoxe, un divorce même entre les angoisses des uns et une forme d’indifférence des autres.

Prenons le cas du pétrole, son cours n’a quasi pas été affecté par cette poussée de fièvre au Moyen-Orient. Pour la simple raison qu’Israël n’est pas un pays exportateur de pétrole et que tant que le conflit ne contamine pas l’Iran ou l’Arabie Saoudite, le prix du pétrole ne bougera pas trop. Là encore, le raisonnement actuel est à nuancer, car comme l’expliquait l’économiste Patrick Artus, vu que le marché pétrolier est tendu, il suffit qu’il manque un million de barils par jour pour que le prix du baril grimpe aussitôt de 20 dollars. Et perdre un million de barils par jour, ça peut vite arriver. Mais on n’en est pas encore là.

Du côté des marchés financiers, c’est encore pire en termes d’indifférence au conflit qui se déroule en ce moment au Moyen-Orient. Les indices boursiers ont même grimpé pendant les 3 premiers jours de cette semaine. Pourtant Donald Trump avait déclaré que nous étions à l’aube d’une troisième guerre mondiale. Visiblement, Wall Street a dû penser que l’ancien président américain était incompétent en matière d’économie et de géopolitique puisque les indices boursiers ont continué de grimper.

En réalité, ce que l’on constate clairement en cette fin de semaine et alors que l’offensive terrestre israélienne n’a même pas encore démarré, c’est que les marchés financiers, les Bourses donc, ne sont intéressés que par une seule chose : l’évolution des taux d’intérêt.

La preuve via un autre paradoxe. Alors que les chiffres de l’emploi sont meilleurs que prévu aux Etats-Unis, ils ont été fraichement accueillis par la Bourse américaine. On devrait se réjouit que les taux d’emploi soit au plus haut. Eh bien, non, les investisseurs boursiers ne raisonnent pas comme vous et moi. Ils se disent que tant que le chômage n’augmentera pas, la pression sur les salaires va continuer, donc l’inflation va perdurer, et donc les taux d’intérêt vont rester élevés. Trop élevés et des taux d’intérêt élevés sont mauvais pour les ménages, pour les entreprises et pour l’Etat.

Et tant que l’on est dans les paradoxes, je continue. Savez-vous que la transition énergétique, qui est pourtant l’avenir de notre planète, est en ce moment menacée par la hausse des taux d’intérêt pour la simple raison que cette transition environnementale nécessite de grands projets souvent financés par endettement. Donc, plus les taux d’intérêt sont élevés, et moins ces projets sont rentables à court terme. Le résultat encore une fois est paradoxal, comme l’a fait remarquer le commentateur boursier Marc Fiorentino. Si vous regardez l’indice boursier S&P Global Clean Energy Index, un indice qui regroupe les sociétés actives dans le solaire, l’éolien et les autres énergies renouvelables, il est en baisse de 20% depuis deux mois. C’est sa plus mauvaise performance depuis 2013. Quant à l’indice boursier S&P Energy, qui regroupe les sociétés qui sont actives dans le pétrole et le gaz, cet indice « sale »  lui est en hausse de 6%. Cela signifie que d’un point vue strictement financier, il est plus rentable de miser sur les énergies fossiles – celles qui sont responsables du réchauffement climatique – que de miser sur les énergies renouvelables, celles du futur.

Comme je vous l’ai indiqué en début de séquence, la raison est liée à la hausse des taux d’intérêt. Autrement dit, la hausse des taux, c’est des craquements dans le marché immobilier, mais c’est aussi une pression de dingue sur les énergies renouvelables. La transition énergétique aura lieu, mais elle risque donc d’être retardée par cette hausse des taux d’intérêt. Et ça, ce n’est pas une excellente nouvelle. Nos étés vont continuer à être chauds, très chauds.

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