Eddy Caekelberghs

La seule préoccupation de Xi Jinping reste d’inonder nos marchés

Eddy Caekelberghs Journaliste à La Première (RTBF)

On connaît l’adage : “le riz tentant tenta le rat tenté”. C’est finalement un peu à ça que nous aurons assisté avec la visite à Paris du Grand Timonier chinois Xi Jinping. Dans la capitale française, Xi a été accueilli par Emmanuel Macron, qui avait tenu à la présence de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Donnant ainsi à suggérer une Union européenne unie dans un même élan. Relativisons… Le chancelier allemand Scholz, invité lui aussi, avait décliné, se souvenant qu’il était allé il y a peu, en cavalier seul, à Pékin, comme on va parfois à Canossa.

Et le quotidien économique néerlandais NRC Handelsblad insiste : “Dans le contexte multipolaire actuel, si l’Union ne veut pas être broyée, elle doit faire bloc autant que faire se peut, ce n’est plus la peine de le rappeler. Mais il ne faut pas en rester au stade symbolique. Il incombe à tous les Etats membres de ne pas oublier la mise en garde de Macron sur la vulnérabilité de l’UE.”

Cela a-t-il impressionné le président chinois ? Cela l’a-t-il amené à partager nos demandes de peser sur Moscou en faveur de la paix ? Pas le moins du monde. Il a enchaîné avec des visites en Serbie et Hongrie, deux pays très favorables à la Russie de Poutine, comme pour rappeler que la Chine reste maîtresse chez elle… voire ailleurs.

Et les mâles accents de Mme von der Leyen n’y changent rien. La présidente de la Commission européenne a reproché à Xi d'”inonder” l’Europe de biens subventionnés, et a menacé de prendre des “décisions douloureuses si Pékin continuait à fausser la concurrence”. Cela n’a pas eu d’impact. La Chine cherche à écouler ses stocks d’invendus pour sortir de sa panne de croissance. Comme le relève Jean-Marc Sylvestre dans le média français Atlantico : “Les dirigeants chinois ont beau jurer qu’ils veulent sortir leur pays du statut du pays d’émergent en changeant leur modèle de production pour exploiter les ressources de l’innovation et de la montée en gamme. La réalité qui s’impose à eux est beaucoup plus simple et inquiétante : ils ne peuvent pas changer de modèle. Le caractère autoritaire, pour ne pas dire dictatorial, du régime, oblige les dirigeants à garder un modèle de pays émergent par peur des libertés qui se multi­plieraient avec une société de consommation. Le souhait d’une économie de marché serait poli­tiquement ingérable.”

La Chine défend ses intérêts, elle ne se voit pas en exécutante de ce que Bruxelles ou Washington estiment nécessaires. “Incapables de se mettre d’accord, elles ne peuvent pas nier leur interdé­pendance. L’Europe et la Chine sont prisonnières d’une relation toxique permanente”, conclut le quotidien autrichien Kleine Zeitung. “Paris, Bruxelles ou Berlin seraient bien inspirées d’en prendre de la graine, elles qui s’imaginent être un étalon de référence”, conclut à Berlin Der Freitag.

Bref, le protectionnisme chinois reste entier, la Chine n’ayant pas ouvert son marché intérieur aux importations, sauf dans des secteurs très particuliers comme les produits de luxe et l’agroali­mentaire. Plus grave encore, la Chine n’a rien fait pour relancer la demande intérieure, les dirigeants chinois ont préféré soutenir leurs unités de production plutôt que les consommateurs… A tel point qu’aujourd’hui, les entreprises chinoises produi­sent beaucoup plus que ce que les consommateurs chinois peuvent acheter et cela dans tous les domai­nes : voitures automobiles, batteries, panneaux solaires, produits textiles, pétrochimie, pharmacie, etc. La seule préoccupation de Xi reste donc d’inonder nos marchés. C’est son seul souci. C’est aussi le nôtre !

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