Amid Faljaoui

Le retour du Bitcoin et des pompiers pyromanes?

C’est à désespérer de la crédulité humaine, comme le disait mon ancien professeur de mathématiques. Lorsqu’un élève avait des difficultés à appréhender la notion d’infini, il lui recommandait de penser à la naïveté ou crédulité humaine.

Or, si vous me lisez en ce moment, et que vous pensiez que le Bitcoin, et ses petits frères et sœurs étaient entrés dans un long hiver de léthargie, vous vous trompez – comme moi d’ailleurs. Dans la nuit de lundi à mardi, la reine des cryptomonnaies, le Bitcoin a bondi de plus de 10% et a tutoyé la barre des 35.000 dollars. En réalité, cela fait quelques jours déjà que le Bitcoin et d’autres cryptomonnaies semblent sortir de l’hiver où je pensais que ces fausses monnaies étaient condamnées. Et c’est vrai qu’en un an et demi, le monde de la cryptomonnaie a été secoué par le crash de Terra, puis celui de Celsius, de 3AC, de la plateforme d’échange FTX, de la hausse des taux d’intérêt, et même par plusieurs procès toujours en cours. Mais voilà, malgré tous ces déboires, le canard est toujours vivant, le Bitcoin ne semble pas près de mourir, et une banque comme Morgan Stanley vient même de publier une étude à la mi-octobre où elle annonce un « printemps des cryptos ».

Pourquoi ce nouvel intérêt pour les cryptomonnaies ? Les spécialistes voient au moins deux raisons. La première, la plus faible, c’est que depuis la guerre entre Israël et le Hamas, les cryptomonnaies s’essaient – à nouveau – à jouer le rôle de valeur refuge. Pour l’instant, les vraies valeurs refuges sont l’or, le franc suisse, l’argent (je parle du métal) et quelques obligations d’État. Et donc le Bitcoin essaie aussi de jouer ce rôle de valeur refuge, et cela semble marcher aux yeux de certains. Mais la vraie raison de l’intérêt accru pour le Bitcoin vient du monde de la finance. Les grands fonds ont les yeux rivés sur une décision de justice américaine ; la cour d’appel fédérale de Washington a confirmé ce lundi une victoire d’un gestionnaire d’actifs en cryptomonnaies qui voulait convertir son fonds en un fonds indiciel indexé sur le Bitcoin. C’est assez technique comme demande et je n’entrerai pas dans les détails, mais la SEC, le gendarme financier américain, avait refusé cette demande. Or la SEC vient d’être déboutée par la justice américaine, et donc les financiers américains salivent, car ils pensent que le gendarme financier américain (qui je le rappelle est aussi là pour protéger les épargnants) ne pourra plus s’opposer à la création de ce genre de fonds indexés sur les cryptos.

Donc, pour ces financiers, le Bitcoin deviendrait un produit d’épargne comme un autre et que l’on pourrait même intégrer à des plans de retraite.

C’est dingue comme attitude de la part de ces gestionnaires de fonds. L’assureur Allianz vient de publier une étude récente qui montre que l’épargnant moyen européen ne connaît pas les rouages de l’économie et maîtrise mal – c’est un euphémisme – les concepts financiers. La Belgique en a donné un exemple magistral avec la ruée sur les bons d’Etat alors qu’il y avait des produits plus intéressants et tout aussi rentables, voire plus, et avec la même sécurité. Et là, le Bitcoin et autres cryptomonnaies volatiles, au lieu de rester dans l’hiver auxquelles ces « fausses monnaies » étaient confinées, se retrouvent au purgatoire avant de passer au printemps des cryptos, souhaité par certains financiers qui, sauf avis contraire, et documenté, me semblent jouer un remake du pompier pyromane. J’espère ne pas être vieux jeu pour nos plus jeunes lecteurs, mais là, c’est moi qui bugge, car je ne comprends pas la logique, du moins, s’il y en a une…

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