Amid Faljaoui
Le patron de JP Morgan vend un million d’actions de sa propre banque : est-ce le signal qu’il faut s’attendre au pire ?
On dit souvent que la première victime d’une guerre, c’est la vérité. Dans le business et la haute finance, il est tout aussi difficile de démêler le vrai du faux. Je vous donne un exemple que tous les grands banquiers du monde ont ausculté à la loupe ces derniers jours.
Jamie Dimon, le patron de la plus puissante banque du monde, JP Morgan, le seul patron américain à avoir survécu à la crise bancaire de 2008. Cela fait 20 ans qu’il dirige sa banque. Il a annoncé qu’il vendait pour la première fois de sa vie un paquet d’un million d’actions JP Morgan, ce qui devrait lui rapporter 140 millions de dollars.
Bien sûr, il a encore en portefeuille 7 autres millions d’actions de sa propre banque. Il ne sera pas à la rue. Mais, quand le patron emblématique de la première banque des Etats-Unis vend des actions de sa propre banque, ça suscite des interrogations.
Il y a ceux et celles qui se contentent de lire le communiqué officiel lié à cette vente. En gros, Jamie Dimon, il est comme vous et moi, il a des besoins d’argent pour sa famille, c’est en résumé ce qu’il a déclaré. Ce qui prouve que les millionnaires sont des gens comme les autres, ils souffrent eux aussi, les pauvres, de l’inflation. Non, je plaisante bien entendu !
D’autres se disent, au contraire, que si le banquier le plus puissant de la planète vend des actions de sa propre banque, c’est qu’il se prépare à la quitter et qu’une succession est ouverte. Ce n’est visiblement pas la thèse défendue par le porte-parole de JP Morgan.
Reste évidemment la thèse choisie par des commentateurs boursiers que je ne vais pas qualifier de « complotistes » car aujourd’hui, dès qu’on ouvre la bouche, c’est la première insulte qui vient à l’esprit. Ces commentateurs boursiers écrivent à leurs abonnés: « c’est quand même bizarre que le patron d’une très grande banque vende ses titres alors que ce même patron disait il y a quelques mois qu’on était proche d’un ouragan économique ». Et donc, comme Jamie Dimon est supposé être un initié et un homme prudent, les auteurs de ces commentaires boursiers en profitent pour faire indirectement peur à leurs abonnés en leur expliquant ce qu’ils doivent faire pour se protéger contre cet ouragan économique.
Il est vrai que les menaces, on peut vraiment les ramasser à la pelle aujourd’hui. Je vous les cite en vrac comme ces commentateurs boursiers le font auprès de leurs lecteurs : la guerre en Ukraine, la guerre au Moyen-Orient, la crise énergétique, l’inflation record depuis les années ’70, des Etats surendettés, des taux d’intérêt en hausse brutale, des faillites d’entreprises qui se multiplient, un climat social explosif et une probabilité de récession, etc…quand vous lisez ça, vous êtes d’accord avec moi, vous avez juste envie de rester sous la couette.
Et puis, « heureusement » si je puis dire, il y a un petit graphe élaboré par la société d’investissement INVESCO qui montre que tous les conflits des dernières décennies ont stressé la bourse. Mais, qu’au final, 12 mois après – et encore c’est une moyenne – la Bourse a fini par se ressaisir et même par augmenter de 12,9%. Que ce soit pour la crise des missiles à Cuba, la guerre des Six Jours, la guerre du Kipour, la guerre en Afghanistan, la guerre des Malouines, la guerre Irak-Koweit, les attentats du 11 septembre 2001, la deuxième guerre du Golfe, les attentats de Paris ou la guerre en Ukraine, à chaque fois la Bourse a rebondi en moyenne de 12,9% après 12 mois. Je ne dis pas qu’il faut s’en réjouir, loin de là car derrière les chiffres, il y a d’abord et surtout les drames humains. Je dis juste que même en matière boursière, il y a des marchands de peur.
La peur est vendeuse même si le raisonnement derrière cette peur est souvent tronqué. Mais, je le reconnais, ces marchands de peur ont parfois raison, exactement comme ces montres arrêtées qui donnent l’heure exacte une fois par jour.
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